Spiritualized
“Everything Was Beautiful” BELLA UNION/PIAS
On ne sait pas le type de maladie que soigne la musique de Spiritualized, mais la couverture de ce nouvel album semble les positionner dans la course au vaccin contre le Covid. Plus sérieusement, ce retour d’un groupe fondé voilà trentedeux ans par Jason Pierce, alias J Spaceman, reste assez fidèle à ce son space rock déjà présent dans les albums de Spacemen 3, son précédent combo. Dès “Always Together With You”, on s’envole pendant près de sept minutes dans les limbes, sous la forme d’une chanson d’amour étrange où J s’adresse à l’être aimé en lui proposant de traverser les galaxies en sa compagnie, comme une version psyché pop du “Ne Me Quitte Pas” de Jacques Brel. On plonge dans une ambiance stonienne avec “Best Thing You Never Had (The D Song)”, aux accents “Paint It, Black” avec un axe cosmique floydien, quelque part entre les riffs de Keith et la folie de Syd. Le reste part dans tous les sens, avec une ballade classique, “Crazy”, qui peine à convaincre, et une composition à la Stone Roses, “The Mainline Song”, six minutes avec des vocaux qui débarquent à mi-chemin, après trois minutes dans la voie lactée. “The A Song (Laid In Your Arms)” et son vortex free-jazz-rock-space-prog-électro-noisy-kamoulox est le genre de composition qui ne semble fonctionner qu’avec l’adjonction de psychotropes puissants… Mais voilà qu’arrive la conclusion “I’m Coming Home Again”, et là, c’est open bar, dix minutes de grand n’importe quoi, avec ses moments grandioses, ses références médicamenteuses (oui, il est ici question du Lorazepam) et son space gospel, dont on retiendra une phrase qui fait mouche quand on sait que Jason a monté son premier groupe voilà quarante ans: “I’m gonna sing till the day I die”.
OLIVIER CACHIN
Calexico
“El Mirador” CITY SLANG
Passé une cascade de cuivres sortie d’un film d’aventure des années cinquante, s’agrègent peu à peu percussions latines, basse reptilienne, cordes, guitare, accordéon, par-dessus lesquels s’élèvent deux voix, l’une masculine, l’autre féminine, mettant en garde contre le mirador. Les paroles parlent de migration et, comme souvent avec le groupe fondé voici vingt-cinq ans par le guitariste-chanteur Joey Burns et le batteur John Convertino, il est question de frontières. La deuxième impression est combien cette paire-là, justement, les a effacées ces frontières, et jusqu’au cœur de sa musique. Les premiers albums du groupe reposaient sur une dualité relativement claire: vignettes latines d’un