Rock and Folk

Disques pop rock

Kelley Stoltz

“Ah! (etc)”

AGITATED

Toujours aussi prolifique, le singersongwriter californien Kelley Stoltz n’a pas laissé 2020 perturber son insatiable besoin de créer et d’enregistrer de la musique. Après s’être un peu éparpillé ces deux dernières années (avec le faux album live du projet funk fantôme Strat, un album rock’n’roll vintage sous le nom de Falcon/ Falkland et deux albums solos très marqués new wave), Kelley Stoltz vient de publier coup sur coup deux albums d’excellente facture. “Hard Feelings”, sorti en juillet, était un album empli d’énergie, entre power pop et pub rock. “Ah! (etc)”, qui vient égayer notre hiver, montre à nouveau que ce touche-à-tout génial n’a rien perdu de son sens de la mélodie. C’est l’album le plus classieux, le plus pop, le plus typiquement stoltzien en somme, publié par son auteur depuis longtemps. Enregistré dans son homestudio Electric Duck à San Francisco, c’est un festival de chansons immédiates dans lequel Stoltz revisite ses genres de prédilection: la pop sixties de “Never Change”, “Tomorrow” et “Some Other Time”, la new wave douce de “The Quiet Ones” (portée par un fabuleux solo psychédélique de Will Sergeant, son ex-collègue d’Echo & The Bunnymen), la power pop de “Team Earth”. Evidemment, Kelley Stoltz restant ce doux excentrique, il ne peut s’empêcher de proposer sur “Moon Shy” un titre de muzak aux accents bossa nova qui s’achève sur un monologue parlé de Will Sergeant. Et évidemment, c’est absolument brillant. Les arrangements riches (piano, synthétiseurs, guitares carillonnantes, harmonies) et la diversité des chansons font de “Ah! (etc)” un disque chaleureux, et une belle réussite.

ERIC DELSART

M Ward

“Think Of Spring”

ANTI/ PIAS

Le rock devient vieux. Alors il se rapproche du jazz. Comme ces gars qui avaient deux ans de moins au collège, et que l’on considérait comme des gamins. Quelques décennies plus tard, l’écart est devenu insignifiant. Le rock et le jazz s’assoient sur un banc et discutent, entre vieillards. Matt Ward n’est pas vieux, mais c’est un drôle d’oiseau. Apparu dans le sillage de Howe Gelb au début du siècle, il a publié de nombreux albums folk-pop, en totale indépendance. Il a également créé le groupe She And Him avec Zooey Deschanel, plus pop, qui a notamment enregistré des standards de Noël, mais aussi, consécration suprême, un titre avec Brian Wilson. On n’est donc qu’à moitié étonné de le voir se lancer dans ce projet dingue: reprendre un album entier de Billie Holiday seul à la guitare… Sur “Lady In Satin”, paru en 1958, dernier album publié du vivant de la chanteuse, elle était accompagnée par un grand orchestre, dans l’esprit de Frank Sinatra. Décrié à sa sortie, il est aujourd’hui devenu mythique. M Ward ne s’est pas remis de sa découverte. Comme d’autres: trois titres repris ici figurent également sur le dernier Chrissie Hynde, le somptueux “Valve Bone Woe”. Sauf que Chrissie avait choisi l’option luxuriante: grand orchestre, grosse production. Là, c’est l’exact contraire. Tout est interprété à la guitare sèche avec des accordages bizarres pour recréer les harmonies complexes originales, enregistré sur un vieux quatre pistes. Il fallait oser. M Ward a le goût du risque. Il chante bien, joue bien, le minimum pour se lancer là-dedans, et c’est une vraie réussite, surprenante. Et si ça incite des gens à réécouter ou découvrir “Lady In Satin”, c’est encore mieux.

STAN CUESTA

Cabaret Voltaire

“Shadow Of Fear”

MUTE/ PIAS

(et toujours ouvert en 2020), a déployé ses machines et son discours dissident dès 1974. Vétéran de la scène electro, et précurseur de ce qui deviendra la musique industrielle avec l’avènement de Throbbing Gristle, Richard H Kirk, désormais seul membre du collectif fantôme, ne désarme pas avec ce quinzième album studio qui réutilise les mêmes ingrédients que sur les classiques “Nag, Nag, Nag” ou “Drinking Gasoline”: des sons distordus, des voix trafiquées, des rythmiques brutales et synthétiques. Enregistré au studio Western Works comme tous ses prédécesseurs, “Shadow Of Fear” n’a pas à rougir de la comparaison avec le reste de la discographie de Cabaret Voltaire. Si le groupe avait cessé toute activité depuis “The Conversation”, le précédent LP sorti au siècle dernier (1994), sa présence au festival Berlin Atonal en 2014 annonçait sa renaissance après vingt ans de silence. Six ans plus tard, c’est le come-back dans les bacs avec ces huit titres rétro-futuristes. De “Vasto”, le premier single, au frénétique “Papa Nine Zero Delta United”, le capitaine Kirk retrouve le son anxiogène du Cabaret, bien en phase avec l’air du temps paranoïaque et complotiste. , a-t-il déclaré. Enregistré avec ses vieilles machines suite au crash de son ordinateur,

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