Les dirigeants bolcheviques ont clamé qu’ils avaient fait surgir du néant une puissante aviation. Pourtant, 1917, l’année de leur prise de pouvoir, n’est pas l’an 1 des ailes russes. La Russie tsariste a pleinement participé, dans les années 1909-1914, à l’aventure mondiale de l’aéronautique. Le régime a vivement encouragé la construction des premières usines, des premiers centres d’expérimentation, de tout un réseau d’aéroclubs et d’écoles de pilotage. En 1914, l’aviation impériale est forte de 263 appareils – pas moins que les autres belligérants. Elle en recevra 5600 autres durant les hostilités, surtout des Nieuport, Farman et Voisin assemblés sous licence dans 18 usines concentrant 10000 ouvriers.
En 1917, le nouveau pouvoir bolchevique hérite de 1500 appareils. Son radicalisme politique et social détruit l’infrastructure aéronautique en forçant à la fuite ingénieurs (comme Sikorsky), pilotes – souvent d’origine aristocratique – et entrepreneurs. En 1922, après une guerre civile où l’aviation n’a joué qu’un rôle marginal, il ne reste que 300 appareils obsolètes. Mais le souvenir du premier essor de l’aviation russe n’est pas perdu, même si subsistent certains de ses traits négatifs: la dépendance à la technologie étrangère, une inclination à voir dans le gigantisme et le spectaculaire la preuve du rattrapage de l’Occident, la faible collaboration entre en russe). Un moyen désespéré – Nesterov est tué – appelé à se perpétuer…