LA FÊTE EST FINIE
Le procès France Télécom-Orange qui s’est tenu au printemps 2019 restera une borne dans l’histoire sociale et politique française. Trente-neuf salariés s’y sont portés partie civile. Au centre du procès, dix-neuf suicides. Un désespoir inédit. Quelque chose contre lequel on butte. Des chiffres qui perdent jusqu’à leur sens. Sur le bancPar la possession littéraire, elle nous fait éprouver les enjeux d’un procès, au-delà de la simple recension journalistique d’une telle tragédie. On pourrait dire que Sandra Lucbert s’inscrit pleinement dans l’héritage des comptes rendus de grands procès, à l’instar d’un Joseph Kessel assistant à celui de Nuremberg. Mais c’est surtout aux analyses de Victor Klemperer sur la (« la langue du Troisième Reich ») que l’on pense ici, puisqu’il s’agit pour Sandra Lucbert de saisir à quel point un langage technique dominant peut conduire à l’inhumanité. C’est bien ce qui est à l’œuvre quand une entreprise, celle-ci ou une autre, souhaite se débarrasser de 20000 salariés sans plan social, pour générer du Ce moment où l’individu devient une variable d’ajustement au profit des actionnaires. De cela, France Télécom-Orange sera reconnu pleinement coupable pour tous les salariés de l’entreprise – les peines pourront être jugées dérisoires au regard des suicides et du harcèlement moral subis, mais même symbolique, cette condamnation vaut espoir.
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