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JIMI HENDRIX L’INFINI CHANT DES POSSIBLES

IL Y A DES ANNIVERSAIRES auxquels on ne peut échapper. C’est là la destinée des légendes, des icônes sacrifiées, des demi-dieux de posterssymboles d’une époque idéalisée – “Back to the garden”, comme le chanta Joni Mitchell –, dont le génie restera à jamais inexpliqué. Et Jimi Hendrix est incontestablement une légende. La plus grande que la mythologie rock ait jamais créée, peut-être. Il en arbore tous les stigmates au sens le plus christique du terme. Le brelan fatal au grand poker de la déveine, à la fois héros et victime: trajectoire fulgurante fracassée par la plus stupide des morts, imprévisible et solitaire, après avoir absorbé le funeste cocktail alcool-barbituriques qui en emporterait tant d’autres, dans une chambre d’hôtel, à Londres. Transporté, inconscient, dans une ambulance et déclaré “dead on arrival”… Ce soir, sur la chaîne américaine ABC, un terne présentateur blond se fabriquerait une mine de circonstance avant de prononcer les mots: “The Jimi Hendrix Experience, c’est terminé… Le musicien d’acid rock (sic) est mort aujourd’hui dans un hôpital londonien apparemment d’une overdose de drogues.” C’était il y a cinquante ans, le 18 septembre 1970 et, depuis, le fantôme du “Voodoo Child” n’a jamais cessé de hanter un seul jour, une seule nuit, les rives du grand fleuve boueux de la musique noire américaine, ses méandres et ses affluents, tant la sienne, extraterrestre, aura bouleversé les âmes. Un héritage considérable, complexe, trituré post-mortem, mais d’une richesse inouïe, foisonnante, presque embarrassante.

Hendrix… Hendrix donc. Bombardé au rang de mythe d’une jeunesse brisée, donc appelée à devenir éternelle. Comme Marilyn Monroe – jusque dans la théorie du complot. Tel James Dean au volant de sa Porsche Spyder, surpris par cet éclat de soleil meurtrier sur la route de Salinas, un jour de septembre 1955. Tel Brian Jones, l’ange-démon blond des Stones, retrouvé noyé dans sa piscine d’un bleu de paradis artificiel. Insatiable Cronos, la culture populaire, en Amérique, se nourrit aussi de ses propres enfants, qu’elle dévore sans remords dès lors qu’on les a trop aimés. Hendrix… Le premier de la liste aussi, la sinistre litanie des seventies, décennie camée, au bord du gouffre, revenue de tout. Parti juste avant Janis Joplin, son amie, Jim Morrison, Gram Parsons, Keith Moon et les autres. Mais Hendrix était différent Pas seulement à cause de son talent surnaturel, de son charisme, de sa façon, faussement timide, de s’excuser d’embrasser le ciel, au moment où il est apparu, sur la scène du Bag O’Nails, à Londres… Bien plus, déjà, que “la sensation de la semaine” importée de New York par son manager Chas Chandler.

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