À propos de ce livre électronique
À PROPOS DE L'AUTRICE
Lucie Denner est une ancienne professeure de l’Éducation nationale. Curieuse et passionnée, elle s’intéresse de près à la littérature, à la musique, au cinéma et à la géopolitique. Si les mots sont son seul véritable terrain d’expression, elle les explore avec liberté et conviction, portée par le désir de comprendre et de raconter le monde.
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Aperçu du livre
Sûrs de rien - Lucie Denner
Absences
Thomas Barbizon se qualifiait lui-même de professeur « à l’ancienne ». Par ailleurs, rien dans son comportement ou sa tenue vestimentaire ne révélait une volonté affichée de s’assurer une quelconque popularité auprès de ses élèves, de ses collègues ou de sa hiérarchie. Âgé de quarante-cinq ans, il officiait depuis presque une décennie dans un établissement de province appartenant à la catégorie hybride communément appelée « lycées de centre-ville », quelle que soit la taille de la commune dans la réalité. Personne ne le connaissait vraiment bien, même si quelques rumeurs faisaient état de son statut d’irréductible célibataire sans enfant. Professeur de lettres féru de littérature classique, il ne lui serait jamais venu à l’idée de faire travailler ses élèves sur le sens des paroles d’une chanson à succès ou sur un extrait de roman récent réputé pour être un « best-seller ». Thomas avait une haute idée de la littérature, de la « vraie », celle qu’il considérait en tout cas comme la seule valable, les romans contemporains ne l’intéressant pas le moins du monde, alors même que plusieurs œuvres de leurs auteurs (es) figuraient dans le programme officiel de ses différentes classes. Il s’arrangeait cependant pour ne leur consacrer que le minimum de temps nécessaire tout en ponctuant ses analyses de réflexions sibyllines sur l’écriture ou le propos relatifs à ces œuvres imposées par la commission nationale des programmes. Globalement, les lycéens ne pipaient mot pendant ses cours ; Thomas était persuadé que la majorité d’entre eux ne lisaient que des bandes dessinées, des mangas de préférence. Le professeur en imposait, son impassibilité devant la moindre velléité de rébellion doublée d’un autoritarisme larvé lui permettant parfois de monologuer pendant toute la durée de son cours sans être interrompu. Quelques lycéens s’en étaient plaints à mots couverts auprès d’autres professeurs, mais ces derniers considéraient que si Thomas Barbizon était un peu « particulier », sa culture littéraire était impressionnante et ses méthodes pédagogiques n’avaient rien de répréhensible. Ce point de vue étant entièrement partagé par le proviseur, personne n’y trouvait à redire d’autant que l’enseignant ne s’était jamais absenté au cours des dix années qu’il avait passées dans l’établissement. À l’occasion des conseils de classe semestriels (l’établissement faisait partie des rares lycées ayant opté pour ce type de fonctionnement), il restait généralement évasif, se contentant de fustiger le trop grand nombre de fautes d’orthographe ou de syntaxe qu’il avait découvertes dans les copies de ses élèves après les avoir soulignées au stylo rouge d’un trait appuyé, presque rageur. À plusieurs reprises, des élèves avaient constaté que leur copie présentait des déchirures par endroits, ce qui avait fini par les amuser après avoir considéré dans un premier temps que « c’était abusé ». Thomas n’ignorait pas qu’il était depuis longtemps surnommé « le déchireur » sans en être affecté pour autant : ses objectifs pédagogiques restaient immuables. L’année précédente, un incident fâcheux s’était produit au cours de l’inspection quinquennale qui frappe en général la majorité des enseignants. Assis à une table du dernier rang au fond de la salle de classe, l’Inspecteur avait assisté sans sourciller à l’intégralité du cours dispensé par Thomas (comme il est d’usage de le faire), semblant apprécier le calme absolu qui régnait dans la pièce. Il avait demandé à quelques élèves de lui remettre des copies d’anciens devoirs corrigés par leur professeur, sans doute pour permettre à ce dernier de décompresser un moment hors du champ de vision de son visiteur imposé. Au cours de l’entretien de fin d’inspection (qualifié depuis des lustres « d’épreuve du confessionnal » par quelques enseignants taquins), le référent pédagogique de Thomas l’avait félicité pour son « assurance tranquille » tout en lui signalant plusieurs fautes d’orthographe oubliées çà et là dans l’une des copies. Thomas s’était senti profondément vexé par cette observation assassine qui l’avait contrarié toute la soirée. Heureusement, leur échange s’était déroulé à huis clos ; il aurait mal supporté le sourire narquois dont certains élèves l’auraient immanquablement gratifié. Excepté ce regrettable, mais inhabituel défaut d’attention, Thomas se sentait intouchable, car certain de sa légitimité de professeur agrégé de littérature assortie d’une boulimie de lectures. Si d’aventure quelqu’un s’était introduit par effraction à son domicile, le cambrioleur potentiel aurait été stupéfait de découvrir des murs de bouquins en lieu et place de papier peint. Mais cette particularité n’était connue que de l’enseignant lui-même dans la mesure où il n’invitait jamais personne chez lui. Il s’accordait de temps à autre le plaisir coupable d’assister à une séance de cinéma chaque fois que l’œuvre d’un auteur classique avait inspiré un réalisateur, mais uniquement si le film en question n’avait pas été trop éreinté par la critique. « Illusions perdues » d’après « Les illusions perdues » de Balzac ne lui avait pas déplu, estimant que le cinéaste avait « limité les dégâts ». Il avait détesté en revanche les différentes adaptations cinématographiques de « Madame Bovary » au point qu’il ne pouvait plus relire le roman sans que les visages des différents acteurs se superposent et s’imposent à lui, brouillant ainsi les souvenirs émerveillés du lycéen qu’il avait été en découvrant le chef-d’œuvre de Gustave Flaubert. Il s’était alors juré qu’on ne l’y reprendrait plus et avait dépensé en conséquence la moitié de son traitement en livres brochés, publiés de préférence pendant la période de l’immédiat après-guerre (celle de 1939-1945). S’il continuait à regarder avec une certaine assiduité les rares émissions littéraires proposées par la télévision, il n’était pas rare qu’il aille se coucher avant la fin par lassitude ou par dépit. Pour lui, les écrivains d’aujourd’hui n’arrivaient pas à la cheville de leurs prédécesseurs quand il s’agissait de décrire des lieux, des sentiments et surtout les contours de « l’âme humaine ». Thomas participait rarement aux conversations tenues dans la salle des professeurs, excepté lorsque celles-ci tournaient autour de l’inculture supposée des jeunes générations, de leur indifférence à l’égard des questions économiques et sociales ou de la politique en général. Ses collègues lui avaient souvent fait remarquer que la grande majorité de leurs élèves n’avaient pas encore le droit de vote tout en lui rappelant que les générations précédentes dont il faisait partie lui aussi n’étaient guère préoccupées par ce type de sujet à seize ou dix-sept ans, excepté les lycéens de 1968 (qui n’avaient pas tous participé aux manifs non plus). Ce genre de considération laissait Thomas de marbre dans la mesure où il n’affichait lui-même aucune conviction tranchée, non parce qu’il ne s’intéressait pas à la politique, mais parce qu’il méprisait la classe politique dans son ensemble. Ce qui le désolait le plus était le manque de profondeur des débats du moment autour de la répartition des richesses et le fait que les choix des électeurs soient davantage conditionnés par la personnalité des candidats que par le contenu de leur programme. La lecture des œuvres classiques (françaises ou étrangères) lui avait permis de se forger sa propre philosophie, concluant que « l’histoire finissait toujours par repasser les mêmes plats, mais sous une forme différente ». Rompant avec sa tradition habituelle de neutralité, il s’était une fois violemment disputé avec l’un de ses collègues, un syndicaliste du SNES (Syndicat National des Enseignants du Second Degré) quand ce dernier avait demandé à Thomas s’il envisageait de participer la semaine suivante à une manifestation de défense de la laïcité dans les établissements scolaires. Thomas lui avait rétorqué « qu’il n’en avait rien à foutre » (il pouvait parfois se montrer vulgaire) estimant que ce n’était pas « LE » problème prioritaire de l’Éducation nationale. La conversation avait dérapé, le syndicaliste reprochant à son interlocuteur son inconséquence, Thomas soutenant que le port d’un foulard dans l’espace scolaire contrairement à celui d’une burqa ou autre voile intégral n’entraînait aucune difficulté dans plusieurs pays européens en ajoutant que les jeunes filles concernées n’étaient pas toutes des terroristes en puissance. Il avait mis fin à la conversation par une assertion sans appel du style : « Au lieu de se focaliser sur l’arbre, il serait plus opportun de s’intéresser à la forêt » avant de quitter la salle des professeurs en claquant la porte sous les regards ébahis ou indignés de ses collègues présents. Depuis cette altercation, il ne s’était plus jamais exprimé sur aucun thème politique ou religieux et personne ne l’avait interrogé en retour pour lui demander son avis. Parfois, l’étiquette qu’on colle à une personne finit par garantir à celle-ci une forme de protection durable contre les agressions verbales découlant de divergences d’opinion sur les questions « sensibles ». Thomas s’en trouvait plutôt soulagé, appréciant par-dessus tout le fait de pouvoir consacrer enfin son énergie aux choses qui comptaient vraiment pour lui-même et son métier d’enseignant sans avoir à perdre son temps en débats stériles.
Si d’aucuns auraient jugé l’existence de Thomas étriquée et totalement dénuée de fantaisie, le principal intéressé considérait au contraire qu’il la traversait de la manière la plus agréable qui soit. N’ayant aucune ambition particulière sur le plan professionnel, il était conscient que son travail d’enseignant avait un caractère en partie alimentaire lui permettant de s’adonner par ailleurs aux plaisirs de la lecture et de l’écriture (cette dernière activité relevant de son domaine secret). Toutefois, le professeur de lettres était suffisamment lucide pour comprendre que la solitude, même choisie délibérément, a souvent pour corollaire un sentiment d’inachevé. Il n’avait aucun plan à deux pour l’avenir, préférant savourer ses moments de liberté en solitaire. Sa mère lui téléphonait une fois par semaine sous prétexte de s’enquérir de l’état de santé de son fils, accessoirement de ses éventuelles sorties. Thomas savait entendre entre les phrases, conscient que l’interrogation maternelle sous-jacente tenait en quelques mots : A-t-il enfin rencontré quelqu’un ? Il répondait rituellement qu’il n’était pas vraiment sorti excepté pour se rendre à son travail, ce qui n’était pas tout à fait exact puisqu’il fréquentait régulièrement la médiathèque ainsi que les différentes librairies de sa ville. Deux ou trois fois par an, il traversait la France en train pour aller rendre visite à sa mère qui n’avait jamais osé lui demander frontalement comment se passait sa vie sentimentale (s’il en avait une). C’était une femme réservée qui vivait seule depuis le décès de son mari. Elle ne souhaitait pas contrarier son fils unique qu’elle ne voyait déjà pas si souvent. Dans ses rêves les plus fous, elle imaginait le jour où Thomas lui présenterait une compagne ou un compagnon, cette dernière hypothèse n’ayant pas la moindre importance à ses yeux tellement elle aurait été heureuse dans les deux cas de figure. Elle avait surmonté la douleur d’avoir perdu l’homme qu’elle aimait le plus au monde, même si celui-ci resterait éternellement présent dans ses pensées. Le jour des obsèques de son mari, elle avait demandé qu’on passe la chanson de Dominique A chantée par Alain Bashung « Immortels », Thomas en avait eu les larmes aux yeux même si le choix maternel ne l’avait pas particulièrement surpris. C’était une femme qui avait fréquenté assidûment les concerts de rock dans sa jeunesse et dont les centres d’intérêt étaient diversifiés. Passionnée par les questions de défense de l’environnement, elle n’avait pas hésité l’année précédente à se joindre au cortège des manifestants mobilisés contre les projets de retenues d’eau sur le territoire de Sainte-Soline dans les Deux-Sèvres malgré les mises en garde de son fils. Ce dernier lui avait fait remarquer que la situation pouvait s’avérer dangereuse en raison des gaz lacrymogènes et autres instruments de dissuasion policière utilisés lors de ce genre d’événement. Les choses avaient effectivement dégénéré, mais sa mère en était sortie indemne, plus que jamais remontée contre ce qu’elle considérait être l’accaparement par quelques-uns d’une ressource vitale pour tous. Thomas vouait une sincère admiration à sa mère, sans jamais le lui montrer pour autant. Les relations mère-fils avaient toujours été empreintes d’une extrême pudeur depuis l’enfance de Thomas, ces deux-là se comprenant le plus souvent sans avoir à prononcer une seule parole. Cependant, ses relations personnelles se résumaient à des relations professionnelles, si tant est qu’on puisse les appeler ainsi. Il pouvait malgré tout compter sur son voisin de palier, un veuf d’une soixantaine d’années prénommé Paul qu’il avait dépanné à l’occasion lorsque ce dernier s’était trouvé confronté à un obscur problème informatique. C’était vraiment le voisin idéal, ni bruyant, ni intrusif, d’une politesse et d’une bienveillance infinies. Paul avait pris sa retraite depuis quelques mois après avoir perdu sa femme deux ans auparavant. Les deux hommes se saluaient régulièrement, échangeaient des généralités sur la météo du jour, les insondables arcanes des systèmes numériques ou les prochains travaux prévus dans leur immeuble par l’assemblée générale des copropriétaires. D’un tempérament pudique, Paul n’aurait jamais osé inviter son voisin à dîner même s’il en brûlait d’envie. Un jour peut-être, se disait-il régulièrement… De son côté, Thomas n’y pensait pas vraiment, estimant qu’il avait beaucoup trop de choses à faire pendant son temps libre pour le perdre en discussions, aussi agréables puissent-elles être.
À la rentrée scolaire suivante, un événement particulier se produisit sans que Thomas réalise tout de suite à quel point son existence allait en être bouleversée. Le jour de la prérentrée, il se présenta au lycée sans état d’âme particulier comme chaque année, avec pour seul regret d’avoir failli à effectuer toutes les tâches qu’il s’était fixées pendant la durée des vacances scolaires. La reprise des cours ne l’avait jamais inquiété ni perturbé depuis qu’il était entré dans l’Éducation nationale. Il savait qu’il avait encore une vingtaine d’années à enseigner avant de pouvoir disposer librement de son temps, autant s’y résigner. De toute façon, il n’envisageait pas une seconde de se reconvertir en prenant un virage à 180°, ou postuler à un emploi administratif au sein d’un quelconque ministère, plutôt mourir… Son traitement de professeur agrégé suffisait amplement à satisfaire un train de vie plus que raisonnable ; il n’aimait pas voyager loin, se fichait éperdument de rouler dans une voiture affichant 150 000 kilomètres au compteur, de porter une montre Swatch, de s’habiller avec des vêtements de seconde main ou de posséder un smartphone datant de plus de cinq ans. Il était en revanche propriétaire de son appartement, seule concession à avoir fait au système selon lui. Ce gage de stabilité le rassurait plus qu’il ne le comblait, estimant que
