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Werner Rügemer Amitié fatale: La conquête de l'Europe par les Etats-Unis Première phase: de la Première à la Deuxième Guerre mondiale
Werner Rügemer Amitié fatale: La conquête de l'Europe par les Etats-Unis Première phase: de la Première à la Deuxième Guerre mondiale
Werner Rügemer Amitié fatale: La conquête de l'Europe par les Etats-Unis Première phase: de la Première à la Deuxième Guerre mondiale
Livre électronique531 pages6 heures

Werner Rügemer Amitié fatale: La conquête de l'Europe par les Etats-Unis Première phase: de la Première à la Deuxième Guerre mondiale

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À propos de ce livre électronique

Le capitalisme des États-Unis en plein essor se présentait au monde avec Freedom, Democracy et prospérité. Mais les pratiques de lʼ"American First", avec le génocide, l'exploitation du travail, le pillage par la guerre de biens étrangers, n'ont été que modernisées. La Première Guerre mondiale est devenue la première entreprise mondiale, les partenaires alliés sont devenus dépendants. Après la guerre, les entreprises des USA ont investi en Europe occidentale. Mussolini a été submergé de crédits.
Les entreprises des USA ont approvisionné Franco et ont équipé l'armée allemande pour une guerre contre la « Russie ».
En Suisse, la nouvelle banque centrale dirigée par les États-Unis blanchissait l'or volé par les nazis. La persécution des juifs a été occultée. Avec le largage de deux bombes atomiques sur la population civile, de nouvelles guerres ont commencé contre de nouveaux ennemis – en violation systématique du droit international.

Dr. Werner Rügemer, Köln ( Cologne) / Allemagne, publiciste et philosophe engagé. Depuis les années 1980, il publie sur la dégradation politique et morale de la société capitaliste guidée par les Etats Unis, sur l'opposition extrême entre riches et pauvres, sur les relations entre l'armée, les services secrets et la haute technologie, sur la destruction de l'environnement et les atteintes à la santé des travailleurs immigrés bien peu rémunérés.
LangueFrançais
Éditeurtredition
Date de sortie26 juil. 2024
ISBN9783384305800
Werner Rügemer Amitié fatale: La conquête de l'Europe par les Etats-Unis Première phase: de la Première à la Deuxième Guerre mondiale
Auteur

Dr. Werner Ruegemer

Dr. Werner Rügemer, doctorate in philosophical anthropology, pubicist and activist for human rights labor relations and for international law international relations. political-historical city guide in his city Cologne/Germany. last book: The Capitalists of the 21st Century. An Easy-to-Understand Outline on the Rise of the new Financial Players, tredition 2019

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    Aperçu du livre

    Werner Rügemer Amitié fatale - Dr. Werner Ruegemer

    I. Amitié, infortune, mort possible

    «  It may be dangerous to be America’s enemy, but to be America’s friend is fatal. » (a)

    «  Il peut être dangereux d’être l’ennemi de l’Amérique ; mais être l’ami de l’Amérique, cʼest fatal. »

    C’est le bilan dressé par Henry Kissinger, ancien chef du département d’État et conseiller de plusieurs présidents des États-Unis pendant de nombreuses années. Dans les années 1970, lui-même et le président Richard Nixon courtisèrent ainsi la République populaire de Chine et elle fut reconnue diplomatiquement et soutenue économiquement. Tant que la Chine était faible économiquement et que les superprofits d’Apple, Microsoft, Ford & Co. étaient élevés, la Chine restait l’amie. Lorsque la Chine se développa sur le plan industriel et technologique, qu’elle augmenta les salaires, assura une grande prospérité aux personnes jusque-là pauvres et eut du succès avec une mondialisation alternative dépourvue de toute intervention militaire, elle devint, sous le président Barack Obama à l’affable sourire, l’ennemie mortelle du système, dénigrée par la politique et les médias, sanctionnée économiquement et encerclée militairement.

    C’est ainsi que des amis deviennent des ennemis mortels – mentionnons quelques autres exemples :

    - Union soviétique  : Au début des bouleversements révolutionnaires de 1917 en Russie, les banquiers de Wall Street firent tout pour réaliser encore plus d’investissements lucratifs, et ils embobinèrent les nouveaux gouvernements.

    Après l’échec de l’intervention militaire d’une alliance à laquelle participaient également les États-Unis, les investissements de Ford, General Electric, Radio Corporation of America, Harriman & Co. débutèrent. L’Union Soviétique se renforça sur le plan industriel, mais aussi sur d’autres plans, et le bien-être des personnes jusque-là pauvres s’accrut.

    En 1933, le président des États-Unis Franklin D. Roosevelt a reconnu l’Union soviétique. Mais pour Ford & Co., l’Union Soviétique devint un ennemi mortel. Dans un revirement stratégique, ils armèrent la Wehrmacht hitlérienne. L’Union Soviétique devait désormais être détruite.

    - Cuba  : à la fin du XIXe siècle, les États-Unis soutinrent d’abord le mouvement de révolte démocratique de José Martí contre la puissance coloniale espagnole. Après la victoire, le mouvement national d’insurrection fut mis à l’écart et les États-Unis mirent en place des dictateurs, une pratique maintes fois répétée dans les «  arrière-cours » des États-Unis en Amérique latine et en Asie.

    - Vietnam  : lors des négociations de paix à Versailles, Woodrow Wilson, le prédicateur des États-Unis pour la paix, éconduisit le mouvement de libération du Vietnam dirigé par Hô Chi Minh.

    Puis, lors de la Seconde Guerre mondiale, dans la lutte contre l’occupant japonais, les États-Unis ont brièvement soutenu Hô Chi Minh, mais pour le déclarer ennemi mortel immédiatement après la guerre, armer la puissance coloniale française contre Hô Chi Minh, puis se lancer eux-mêmes dans une guerre d’extermination encore bien plus cruelle.(b)/¹

    Le Département d’État : des prétentions sur chaque coin de la planète

    Depuis la fondation des États-Unis en 1787, les amitiés et hostilités des États-Unis se sont alternées. Elles reposent sur une perception de soi-même toujours en vigueur aujourd’hui : les États-Unis sont le seul état important à ne pas avoir de ministère des Affaires étrangères, mais un State Department, un Département d’État. Ainsi, les territoires les plus proches comme les plus lointains de la planète sont, dans «  l’intérêt national », potentiellement des zones sous la souveraineté, l’influence ou la domination des États-Unis.

    La revendication d’exclusivité et de toute-puissance est complétée bibliquement par «  God’s own Country » et «  God bless America », par le concept de «  nation élue », mais aussi par «  America First », «  American Century » et «  New American Century » et par «  l’exceptionnalisme américain » ou encore «  Nous sommes la seule puissance mondiale ». Tout cela fait partie des gènes des États-Unis.

    D’abord dans les arrière-cours, puis en Europe et dans le monde entier – C’est ainsi que la petite bande de terre de l’État esclavagiste, déclaré démocratique, sur la côte est de l’Amérique du Nord s’est progressivement étendue, d’abord par des conquêtes et des annexions en Amérique du Nord (à l’exception du Canada britannique, qui ne put être conquis), génocide des indigènes compris. Plus tard, ce fut le tour des arrière-cours latino-américaines, caribéennes et asiatiques, et ensuite, de la Première Guerre mondiale jusqu’à aujourd’hui, le tour de l’Europe et de la planète entière, sous l’emprise conjointe d’investissements, de crédits, de l’armée, des services secrets et de fallacieuses relations publiques.

    A l’aide de coups d’état et de guerres civiles, des dictateurs furent mis en place ou soutenus. C’est ce qui s’est passé en Europe dans la première moitié du XXe siècle :

    • Le premier dictateur fasciste, Mussolini, qui avait écrasé le mouvement démocratique et ouvrier en plein essor, fut submergé de crédits et devint une star politique aux États-Unis.

    • Le généralissime Franco qui a fait un coup d’état contre la République espagnole fut approvisionné par des compagnies états-uniennes d’armement et de pétrole et soutenu militairement par Mussolini et Hitler, jusqu’à la victoire commune.

    • Hitler devint une star des médias, notamment avec l'aide d’Hollywood. Le comité olympique des États-Unis ainsi que ceux d’Angleterre, de France, du Japon, de Finlande et d’Afrique du Sud, sauvèrent les Jeux Olympiques de 1936 pour Hitler à Berlin contre le mouvement de boycott international, y compris juif. Les USA armèrent la Wehrmacht contre l’Union soviétique.

    En dehors de tout ordre international – La prétention d’être la seule puissance mondiale inclut le fait que les États-Unis ne cessent de proposer des règles au niveau international, mais qu’ils contournent les institutions mises en place et mettent en place leur propre contre-ordre international, contre le droit international et les droits de l’homme.

    C’est ainsi que les États-Unis proposèrent la création de la Société des Nations après la Première Guerre mondiale, mais n’y ont pas adhéré, préférant conclure après le Traité de Versailles des traités particuliers avec tous les belligérants et soutenir des dictatures fascistes en Chine, en Italie, en Grèce, en Allemagne, au Japon et en Espagne. Après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis agiront de la même manière avec l’ONU.

    Maintenant, les États-Unis décident sans relâche de mener des guerres en fonction de leurs besoins. Si le Conseil de sécurité de l’ONU décide d’une guerre, très bien ; si ce n’est pas le cas, les États-Unis mènent la guerre seuls ou dans une alliance bricolée avec leurs vassaux consentants.

    Avec Wall Street, de Mussolini à Adenauer

    Après l’écrasement du mouvement ouvrier s‘amplifiant pendant la guerre, Benito Mussolini devint une star politique aux États-Unis. Le dictateur, béni par le pape, fut conseillé sur place, à Rome, par l’avocat de Wall Street John McCloy et il fut submergé de crédits des États-Unis.

    McCloy a également représenté les intérêts de sociétés états-uniennes dans l’Allemagne nazie. Le comité olympique des États-Unis a combattu avec succès le mouvement international de boycott, y compris juif, contre la tenue des Jeux Olympiques de 1936 à Berlin : ceux-ci purent alors se dérouler avec faste et furent bénéfiques à la réputation internationale du régime nazi. McCloy put ainsi s’asseoir avec son épouse à la tribune d’honneur du stade olympique de Berlin, aux côtés de Göring et Hitler.

    À partir de 1949, McCloy fut haut-commissaire des États-Unis pour la République fédérale d’Allemagne. McCloy conseilla ou surveilla le premier chancelier fédéral, le politicien chrétien Konrad Adenauer, qui avait été l’un des premiers fans de Mussolini. McCloy et Adenauer protégèrent ensemble les complices allemands et états-uniens de la dictature hitlérienne contre toute révélation et dénonciation.

    Vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’anticommuniste Churchill avait fait élaborer par ses chefs militaires le plan Operation Unthinkable. Selon ce plan, des troupes états-uniennes et britanniques, renforcées par des éléments de la Wehrmacht, devaient conquérir l’Union soviétique immédiatement après l’armistice avec l’Allemagne nazie.² Vu la force de l’Armée rouge et l’état d’esprit de l’opinion publique en Grande-Bretagne, on y renonça. Mais l’intention est restée. Elle fut et est poursuivie par d’autres moyens, sous la direction des États-Unis, plus anticipatifs et plus puissants.

    Pendant la Première et la Deuxième Guerre mondiale, les banques et les entreprises états-uniennes ont soutenu les guerres des alliés. Ensuite, à la fin de la guerre, les militaires des États-Unis purent remporter des victoires relativement faciles dans les zones de guerre épuisées.

    Et sous le drapeau d’une aide amicale, la puissance victorieuse pouvait se consacrer à la lucrative reconstruction : Promotion des investissements états-uniens, introduction de marchandises états-uniennes et établissement de bases militaires des États-Unis.

    Comme cela avait commencé à Hiroshima et Nagasaki, l’Europe (occidentale), qui semblait si aimablement soutenue, se vit en outre imposer une tâche mortelle : Avec leur doctrine de la première frappe nucléaire, les États-Unis firent de l’Europe le site d’une éventuelle guerre nucléaire contre l’Union soviétique ; c’est toujours le cas aujourd’hui.

    Wilson, Obama : promesses de paix et guerre perpétuelle

    Le président des États-Unis Woodrow Wilson, du parti démocrate, avait gagné sa campagne électorale en 1913 en faisant une promesse solennelle : Les États-Unis ne participeront jamais à la guerre qui se prépare en Europe.

    Dès le début de la guerre, Wall Street et les entreprises états-uniennes ont financé et approvisionné les belligérants en Europe, encourageant ainsi la guerre de manière lucrative. La banque Morgan jouait un rôle de premier plan.

    En 1917, Wilson rompit sa promesse en se servant de relations publiques professionnelles et, au nom de Dieu, il annonça le contraire : l’entrée militaire des États-Unis dans la guerre européenne : «  War to end all wars » – nous faisons maintenant la guerre pour mettre fin à toutes les guerres. Depuis lors, les États-Unis ont mené et mènent encore de nombreuses guerres en violant le droit international.

    Le président des États-Unis Barack Obama, également du parti démocrate, avait gagné sa campagne électorale en 2008 avec une promesse tout aussi solennelle : Nous allons désarmer et abolir les armes nucléaires ! Nous allons sauver l’environnement ! La banque Morgan fut l’un des grands donateurs de la campagne électorale d’Obama.

    Pendant son mandat, Obama imposa le réarmement aux membres européens de l’OTAN, réarma les États-Unis en invoquant Dieu, renouvela la doctrine de la première frappe, affaiblit les lois sur l’environnement et le travail en faveur de l’extraction par fracturation, une industrie nuisible à l’environnement et souvent mortelle pour les riverains, et déclara la Chine comme nouvel ennemi principal, de concert avec les managers de BlackRock dans son gouvernement. Il réarma l’Ukraine par le biais de sociétés états-uniennes et prépara la guerre contre la Russie.

    Aussi perspicace que myope : l’auto-aveuglement professionnel

    En 1935, l’artiste Mabel Dwight représenta dans une lithographie les banquiers de Wall Street qui avaient réalisé d’énormes profits avec la Première Guerre mondiale et ses nombreux millions de morts en Merchants of Death, des marchands de mort : ils «  détestent l’idéal de la démocratie, mais se réjouissent du relâchement des rênes et de l’espace de liberté qu’elle leur laisse ». En raison des profits, selon Dwight, ces marchands de mort sont «  particulièrement perspicaces, mais irrémédiablement myopes »³.

    Avec des relations publiques professionnelles comme avec le Committee on Public Information (CPI) pendant la Première Guerre mondiale, avec les universités d’élite et les médias de masse qu’ils financent, les capitalistes des États-Unis disposent de professionnels et de scientifiques très bien payés et hautement qualifiés : Ceux-ci présentent chaque guerre, même la plus cruelle, comme un exemple de démocratie, d’humanité et de volonté de paix.

    C’est ainsi que les profiteurs de guerre, et bien sûr aussi les pollueurs etc., et leurs complices s’approuvent et se renforcent mutuellement en permanence au prétendu service de leur philanthropie.

    Ils se montrent très vigilants à l’égard de toute opportunité lucrative que présentent les guerres, les atteintes à l’environnement et à la santé, et en même temps très myopes quant aux conséquences humaines et sociales : un auto-aveuglement professionnel.

    -------------------------------------

    (a) Fatal a également le sens de mortel.

    (b) Comme dans la guerre contre le mouvement de libération au Vietnam, Kissinger a été complice de nombreux autres crimes de guerre, directement ou par le biais d’opérations secrètes menées par des tiers, notamment au Cambodge, au Laos, au Chili et dans d’autres pays d’Amérique latine, avec des millions de morts civils et des génocides (Pakistan oriental, Indonésie).

    II. Les travaux fondateurs de la seule puissance mondiale

    L’Angleterre et la France, puissances coloniales qui conquirent à partir du XVIe siècle le territoire à eux inconnu de l’Amérique du Nord et se firent la guerre entre elles, ne pouvaient pas savoir ce qu’il en adviendrait. Les colons riches et pauvres qui émigrèrent d’abord d’Europe et s’imposèrent ne le savaient pas non plus. Et les maîtres coloniaux ne le savaient pas non plus, eux qui s’enrichirent grâce aux plantations de tabac et de coton, aux esclaves et au commerce, eux qui déclarèrent leur indépendance vis-à-vis de la puissance coloniale anglaise en 1776 et qui adoptèrent la constitution de l’État esclavagiste démocratique des États-Unis d’Amérique en 1787. Mais ils ont développé, ensemble et les uns contre les autres, une logique qui conduisit à ce qui constitue aujourd’hui la plus grande menace pour la paix, le bien-être et l’avenir de l’humanité et de la planète : la prétention d’être la «  seule puissance mondiale » qui régule et qui gagne à tous les niveaux.

    1. La Doctrine Monroe : interdiction d’intervenir

    Le Congrès des États-Unis, qui entre-temps était passé de 13 États fondateurs à 24 États, adopta en 1823 la doctrine Monroe.

    Selon cette doctrine, il est interdit aux autres États d’intervenir sur le territoire des États-Unis. Cette règle est encore aujourd’hui en vigueur. Cela serait de fait en parfaite conformité avec le droit international.

    On entendait cependant par territoire des États-Unis non pas les Etats-Unis, mais toute l’Amérique du Nord qui devait être conquise par le petit États-Unis et dans un premier temps également toute l’Amérique latine. Le revers de la médaille de l’extension de cette doctrine est donc toujours valable aujourd’hui : les États-Unis peuvent intervenir partout sur la terre, sur tous les continents, et les autres Etats ne doivent pas les gêner.⁴

    L’intérêt national : Prétention à la terre entière

    Jusqu’à aujourd’hui, le Département d’État s’occupe des affaires à l’étranger : pour les dirigeants des États-Unis, l’étranger n’est que provisoirement ou partiellement étranger. Avec et depuis sa création, il ne s’agit pas pour les États-Unis de développer des relations d’égalité avec d’autres États, mais d’étendre l’État-capital et d’ancrer ses différentes méthodes d’influence, d’appropriation et de pouvoir dans d’autres États.

    C’est pourquoi la conquête de territoires et d’États étrangers n’est pas considérée comme une conquête, mais comme une question de «  sécurité nationale » (National Security) et d’«  intérêt national » (National Security). Les États-Unis ne connaissent pas ce que d’autres États appellent la politique étrangère : Pour les États-Unis, il s’agit d’une politique d’État.

    Cet «  intérêt national » signifie pouvoir constamment étendre le territoire national. Au début, cela concernait chaque lieu, chaque population et chaque autre État d’Amérique du Nord. Plus tard et jusqu’à aujourd’hui, cela concerne chaque personne, chaque entreprise, chaque État, chaque activité en tout point du globe, sur tous les continents. La traduction habituelle de State Department par Ministère des Affaires étrangères des États-Unis est erronée et euphémisante.

    Le gouvernement des États-Unis a ainsi décidé seul où il souhaitait étendre son territoire, tout d’abord en Amérique du Nord sur le plan économique, militaire, des services secrets, des médias, de la science ou par d’autres moyens et avec quelles personnes, organisations etc. de son propre choix.

    Le juriste de la cour de Hitler, Carl Schmitt, fait de même

    Carl Schmitt, le juriste-clé de la cour de Hitler, fonda le droit international du régime nazi sur le modèle des États-Unis : la doctrine Monroe serait «  le précurseur d’un principe de grand territoire en droit international ». L’ «  interdiction d’intervention pour des puissances étrangères à son territoire » s’appliquait également à la politique étrangère de l’Empire allemand. Comme dans le cas de la doctrine Monroe, cela incluait le droit d’intervenir même dans d’autres États. Schmitt considère les annexions et les occupations d’autres États par l’Allemagne hitlérienne comme une «  confirmation importante » de la doctrine Monroe.⁵

    Les conquêtes

    Nous ne pouvons pas énumérer ici toutes les conquêtes par lesquelles les États-Unis ont élargi par prédation leur territoire, d’abord petit, à l’est de l’Amérique du Nord, pour finalement atteindre 50 États et un territoire bien plus vaste. Nous nous limiterons aux étapes importantes.

    Texas, Floride – Le Texas se libéra de la domination coloniale espagnole et rejoignit le Mexique, qui s’était également libéré des Espagnols en 1821 et avait fondé une république en 1824. On pourrait naïvement penser que les États-Unis auraient apprécié une telle libération anticoloniale et la fondation d’une république, puisqu’ils s’étaient également libérés de la domination coloniale et avaient fondé une république. Mais les États-Unis n’étaient pas et ne sont toujours pas une force anticoloniale, ils font juste semblant quand cela les arrange.

    C’est dans ce contexte qu’est apparue une autre justification de l’usage extraterritorial de la force : la «  destinée évidente » (manifest destiny) de la nation serait de s’étendre par ordre divin et de prendre possession de «  l’ensemble du continent que la Providence nous a confié (…) pour propager la grande expérience de la liberté ».

    Cette «  providence » divine devait légitimer le fait que les États-Unis furent autorisés à apporter la lumière de la civilisation aux colons de l’Ouest jusqu’au Pacifique, dans les territoires non encore annexés, et à chasser les animaux sauvages et les Indiens.⁶

    Le Mexique avait d’abord encouragé l’immigration en provenance des États-Unis dans cette région peu peuplée. Des membres des États-Unis achetèrent des terres et constituèrent une armée. Ils nommèrent le général et homme politique états-unien Sam Houston commandant en chef. Ils purent compter sur la complicité du gouvernement de Washington et de son armée et déclarèrent le Texas république indépendante en 1836. Celle-ci fut annexée par les États-Unis en tant qu’État fédéral en 1845. Les États-Unis menèrent une guerre de plusieurs décennies contre les indigènes séminoles de Floride et déclarèrent également en 1845, toujours en pleine guerre, la Floride nouvel État fédéral.

    La Californie, l’Arizona, le Nevada, l’Utah… – Devenus de ce fait encore plus effrontés, les conquérants coloniaux firent la guerre à l’ensemble du Mexique. Au cours de plusieurs batailles entre 1846 et 1848, culminant par l’occupation de la capitale Mexico, l’armée et la marine des États-Unis, techniquement supérieures, ont vaincu la République du Mexique. L’armée fut portée à 100 000 soldats et la marine des États-Unis, jusqu’alors modeste, fut transformée en une puissance maritime internationale. Les crimes de guerre commis notamment par les «  Texas Rangers » contre la population civile étaient partie intégrante de la campagne militaire.

    La Californie comptait à l’époque environ 25 000 indigènes, 10 000 Mexicains et 500 colons.⁷ Ces derniers appliquèrent la méthode texane : Ils déclarèrent la Californie comme République, le gouvernement de Washington envoya l’armée pour la protéger et la Californie fut également annexée en tant qu’État.

    Furent également annexés l’Arizona, le Nevada, l’Utah et certaines parties des États actuels du Nouveau-Mexique, du Kansas, du Colorado et du Wyoming, en tout une réduction de moitié du Mexique.

    L’État qui s’était détaché de l’État colonial anglais prédateur devint lui-même État prédateur. Plus tard, cette expansion a pris d’autres formes qui n’ont pas abouti à une intégration formelle dans le territoire des États-Unis, mais qui ressemblaient à peu près à ceci :

    • territoires et îles annexés en tant que «  territoires d’outre-mer »,

    • bases militaires imposées plus ou moins amicalement à d’autres États dans le monde entier,

    • filiales de groupes états-uniens qui respectent le moins possible les lois en vigueur dans d’autres états, et ce de manière pragmatique, partielle et temporaire – ou pas du tout.

    America First, American Century …

    Les formules telles que America First sont des expressions ultérieures de cette identité. Elles sont ressorties de la boîte à outils de l’expansion états-unienne, en particulier dans les situations historiques tendues.⁸

    Cela vaut également pour American Century. En référence à l’empire britannique et à sa prétention au titre d’Imperial Century, cette formule est également élargie sur le plan géopolitique depuis le XXe siècle. Ainsi, le tycoon médiatique Henry Luce a déclaré dans son article The American Century en 1941 : «  La démocratie des États-Unis accomplira son œuvre mystérieuse (mysterious work) pour élever la vie de l’humanité du niveau des animaux à celui que le psalmiste a qualifié de quelque peu inférieur à celui des anges. »⁹

    2. Violation systémique de la Constitution : «  God’s own Country » (le pays choisi par Dieu)

    Parmi les légendes de la superpuissance figure sa naissance dans la candeur chrétienne, la Bible à la main.

    Les «  Pères pèlerins »

    Selon la légende, les «  Pères pèlerins » établirent une colonie permanente dans la colonie britannique d’Amérique du Nord.

    Des puritains anglais radicaux voulaient une autre répartition des richesses, se considéraient comme des saints et déclaraient que chaque paroisse avait sa propre relation avec Dieu, sans la médiation des évêques qui en Angleterre étaient nommés par le roi.

    En 1620, 102 pèlerins prirent la mer à bord du «  Mayflower » en direction de l’Amérique du Nord. Ils nommèrent leur colonie près de Plymouth, dans l’actuel État du Massachusetts, «  God’s own Country », le pays choisi par Dieu.

    Dans un premier temps, ils échangèrent de la nourriture avec des autochtones étonnés et amicaux. Mais après quelques années, et cela n’est pas dit dans la légende, les colons pillèrent les réserves des Indiens et leur firent la guerre. Le mélange avec les religions indigènes était considéré comme une atteinte à l’âme chrétienne. Des légendes complotistes se répandirent : Les Indiens veulent nous tuer. On pourrait mentionner que les Indiens tuaient certes des colons lorsque ceux-ci leur volaient leurs terres et leur nourriture. Les colons justifièrent donc des attaques préventives et détruisirent les récoltes des autochtones. Le gouverneur britannique les autorisait volontiers. Par exemple, lors du massacre de Mystic en 1637, les milices des Pères pèlerins ont abattu et brûlé environ 700 personnes, les survivants furent réduits à l’esclavage. Cette victoire sacrée sur la tribu des Pequot marqua en outre le début de l’extermination des Amérindiens.¹⁰

    Les Pères pèlerins célébrèrent cette victoire meurtrière lors de leur Thanksgiving de 1637, une fête traditionnelle, comme «  un doux sacrifice et nous prions tous Dieu pour le remercier de son aide ».¹¹

    La Bible et la référence à Dieu servirent à justifier la conquête des terres, le massacre et l’esclavage d’autres ethnies, en l’occurrence des différentes tribus indiennes. La légende de relations amicales des «  Pères pèlerins » envers les autochtones n’a été mise en scène qu’au XIXe siècle. La fête nationale de Thanksgiving aux États-Unis se réfère également à la célébration enjolivée de Thanksgiving des «  Pères pèlerins » de 1637.

    Constitution des États-Unis à vrai dire sans référence à Dieu …

    La Constitution des États-Unis de 1787 ne contient aucune référence à Dieu. Elle commence dans l‘esprit des Lumières, démocratique et laïque par «  Nous, le peuple ».

    Elle se démarque ainsi du droit divin des monarchies européennes. Le premier amendement de la Constitution de 1791 stipule : le Congrès nʼest pas autorisé à voter des lois qui restreignent la liberté d’opinion, de presse, de réunion et de religion ; et il ne peut y avoir de loi «  ayant pour objet l’établissement d’une religion d’État ».

    Mais la Constitution fut continuellement violée et l’est encore. L’hymne national de 1812, toujours en vigueur, proclame : «  le pays sauvé par le ciel » et «  Notre devise doit être : Nous avons mis en Dieu notre confiance ».

    Divinisation du fondateur de l’État : la montée au ciel de Washington

    Après la victoire des Nordistes dans la guerre civile en 1865, le fondateur de l’État, George Washington, fut déifié dans une peinture monumentale.

    Vêtu d’un costume pourpre, il monte au ciel. Il est accompagné de la déesse romaine de la liberté, Libertas, et de la déesse grecque de la victoire, Nike, ainsi que de 13 vierges symbolisant les 13 États fondateurs des États-Unis.

    La peinture orne depuis lors la coupole du Capitole, le siège du Parlement, à Washington.

    Cette chrétienté diffuse fait appel à d’autres représentations de Dieu, ici celles des sociétés esclavagistes romaine et grecque, plus tard également par exemple celle des juifs ; et alors que la chrétienté était d’abord protestante, la variante catholique s’y est ajoutée au XXe siècle avec le soutien des dictatures de Mussolini, Franco, Salazar et Piłsudski et les nouvelles relations avec le Vatican (a) (voir V, 7 et 8 ; VI, 1-5).

    Serment des présidents et des soldats : «  So help me God »

    Tous les présidents depuis George Washington ont prêté serment sur la Bible avec la formule «  So help me God ». Un seul président a fait exception : En 1825, Quincy Adams prêta serment sur la Constitution au lieu de la Bible, contrairement à l’usage.

    Après leur formation de base, tous les soldats jurent qu’ils protégeront la Constitution avec la même formule «  So help me God ». L’armée de terre, l’armée de l’air et la marine rémunèrent des aumôniers militaires au grade d’officier. Les églises sont protégées par l’État et exemptées d’impôts. Le Dieu des États-Unis bénit toutes les guerres.

    Contre l’Union soviétique : «  In God we Trust »

    Au plus fort de la lutte contre le «  danger bolchevique » et le «  communisme impie » en Union soviétique, le Congrès des États-Unis décida en 1956 que la devise officielle de l’État serait «  In God we Trust ».

    Face au socialisme, dénoncé également par le Vatican comme impie, les capitalistes états-uniens voulaient incarner l’idée religieuse et divine d’un ordre supérieur. Au XIXe siècle, la devise avait déjà été occasionnellement frappée sur des pièces de monnaie.

    Mais depuis 1957 et jusqu’à aujourd’hui, elle est imprimée sur le principal moyen de paiement symbolique, les billets de dollars : Dieu et le dollar ne font qu’un. La devise IN GOD WE TRUST est également gravée sur la pièce en or Liberty de 5 dollars émise en 2001.

    Lorsque le président des États-Unis fait un discours sur la situation de l’Union, il se tient à la tribune du Capitole sous la devise gravée dans la pierre «  In God we trust ».

    Habilement, le législateur a fait de cette devise non pas une loi, mais une déclaration (declaration). Malgré les critiques, la Cour suprême a jugé que cette devise n’était pas une religion d’État, mais qu’elle avait un «  caractère cérémoniel ». Une telle approbation juridique de la violation de la loi et de la constitution fait partie des outils du «  God’s own Country ».

    Obama : diriger et réguler le monde au nom de Dieu

    Selon la conception dominante, les États-Unis furent choisis par Dieu lui-même : Ainsi, on utilise depuis la fondation de l’État lors d’occasions importantes cette formule : Nous sommes «  God’s own Country » – le pays choisi par Dieu. Une autre formule est tirée de la Bible, en référence au Sermon sur la montagne de Jésus-Christ : les États-Unis sont «  la ville sur la colline » (city upon the hill). C’est la divinité modernisée du Moyen-Âge féodal et «  chrétien ».

    Le président Barack Obama, qui se montre particulièrement éclairé, déclara par exemple aux futurs officiers de l’académie militaire de West Point le 28 mai 2014, lors des guerres menées par les États-Unis en Irak et en Afghanistan : «  Que Dieu vous bénisse. Que Dieu bénisse nos hommes et nos femmes qui portent l’uniforme. Et que Dieu bénisse les États-Unis d’Amérique. »¹²

    A cette occasion, Obama, comme d’autres présidents, présenta les États-Unis comme «  la nation exceptionnelle ». Elle est au-dessus de toutes les autres nations (exceptionalism).

    Tout comme le pape de l’Église catholique est considéré comme le représentant de Dieu sur terre et donc infaillible, les dirigeants des États-Unis se considèrent eux aussi comme les représentants de Dieu et infaillibles lorsqu’ils s’acquittent de leur tâche qui est de diriger et de réguler le monde à titre d’unique superpuissance, même si pour cela, le pillage, les interventions militaires, les guerres, les massacres et la mise en esclavage sont nécessaires ou «  surviennent » comme dommages collatéraux. Tout cela est permis, car : Nous agissons au nom de Dieu.

    «  Libérer le monde du Mal »

    Mais les dirigeants états-uniens se placent même au-dessus de Dieu. Ils veulent, ce qui n’est pas du tout attribué au Dieu chrétien, libérer le monde de tout mal, éradiquer complètement le mal, «  to rid the world of evil », comme l’annonça le président George W. Bush en 2001, trois jours après le 11 septembre¹³, et comme l’ont également répété tous ses successeurs : Obama, Trump et Biden. Et ce sont les dirigeants états-uniens qui décident de ce qui est actuellement le mal ou le méchant. Ainsi, la Constitution est violée de manière multiple et constante au nom de Dieu.

    D’autres peuvent aussi le prétendre, par exemple Hitler : «  Dieu avec nous »

    Nous voulons être justes : D’autres responsables politiques se sont également référés à Dieu, même à la période en principe démocratique après la Première Guerre mondiale. C’est ainsi qu’Adolf Hitler, soutenu depuis les années 1920 par des personnalités états-uniennes et par la suite également approvisionné en armes, se référa à la volonté de Dieu et à sa création dans son «  Mein Kampf » et ses discours.

    Hitler sollicita avec succès les grandes églises chrétiennes qui furent complices de son système capitaliste d’injustice. Ses soldats ont prêté serment devant Dieu. «  Nous avons besoin de soldats, de soldats croyants. Les soldats croyants sont les plus précieux. Ils s’engagent à fond », déclara Hitler en 1933 à l’évêque catholique Wilhelm Berning qui l’approuva et fut nommé par Hitler au Conseil d’État prussien.¹⁴ «  Gott mit uns » (Dieu avec nous) était inscrit sur la boucle du ceinturon des soldats de la Wehrmacht qui envahirent l’Europe et l’Union soviétique «  impie ».

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    (a) C’est entre autres pour cette raison que les États-Unis ont soutenu les partis catholiques en Europe après la Seconde Guerre mondiale et qu’avec J. F. Kennedy un catholique a été élu pour la première fois président des États-Unis.

    3. La démocratie de l’État esclavagiste

    La légende veut que les pères fondateurs des États-Unis aient fondé une démocratie en se révoltant contre la puissance coloniale anglaise.

    Dans la Déclaration d’indépendance de 1776, on peut lire, comme dans les Lumières de l’Europe occidentale alors en vogue : «  Nous tenons pour évidentes par elles-mêmes les vérités suivantes : tous les hommes sont créés égaux ; ils sont dotés par le Créateur de certains droits inaliénables ; parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté et la recherche du bonheur. Les gouvernements sont établis parmi les êtres humains pour garantir ces droits.

    Leur juste pouvoir émane du consentement des gouvernés. Toutes les fois qu’une forme de gouvernement agit à l’encontre de cet objectif, le peuple a le droit de le changer ou de l’abolir et d’établir un nouveau gouvernement. » Ce serait effectivement la démocratie et la reconnaissance fondamentale des Droits de l’homme.

    Constitution des États-Unis : les esclaves sont autorisés

    La déclaration d’indépendance faisant référence aux droits de l’homme n’était qu’une déclaration d’intention populiste. Quand les choses devinrent sérieuses, elle fut oubliée. Les déclarations selon lesquelles tous les hommes sont créés égaux, qu’ils ont des droits inaliénables et que le peuple a le droit et le devoir d’éliminer les gouvernements injustes, tout cela ne figure ni dans la lettre ni dans l’esprit de la Constitution de 1787. Au contraire, les termes «  démocratique » et «  démocratie » n’apparaissent nulle part dans la Constitution.

    De plus, ni la Déclaration d’indépendance ni la Constitution n’exigent l’abolition de l’esclavage, celle-ci n’est même pas mentionnée. Le droit de trafiquer, de posséder, d’exploiter et de punir de mort des esclaves

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