Les Nouvelles Nourritures terrestres
Par André Gide
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À propos de ce livre électronique
André Gide
André Gide (1869 - 1951) was a French author described by The New York Times as, “French’s greatest contemporary man of letters.” Gide was a prolific writer with over fifty books published in his sixty-year career with his notable books including The Notebooks of André Walker (1891), The Immoralist (1902), The Pastoral Symphony (1919), The Counterfeiters (1925) and The Journals of André Gide (1950). He was also known for his openness surrounding his sexuality: a self-proclaimed pederast, Gide espoused the philosophy of completely owning one’s sexual nature without compromising one’s personal values which is made evident in almost all of his autobiographical works. At a time when it was not common for authors to openly address homosexual themes or include homosexual characters, Gide strove to challenge convention and portray his life, and the life of gay people, as authentically as possible.
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Aperçu du livre
Les Nouvelles Nourritures terrestres - André Gide
Les Nouvelles Nourritures terrestres
Les Nouvelles Nourritures terrestres
LIVRE PREMIER
I
II
III
IV
LIVRE DEUXIÈME
LIVRE TROISIÈME
I. 3
II. 3
III. 3
LIVRE QUATRIÈME
I. 4
II. 4
Page de copyright
Les Nouvelles Nourritures terrestres
André Gide
LIVRE PREMIER
I
Toi qui viendras lorsque je n’entendrai plus les bruits de la terre et que mes lèvres ne boiront plus sa rosée – toi qui, plus tard, peut-être me liras – c’est pour toi que j’écris ces pages ; car tu ne t’étonnes peut-être pas assez de vivre ; tu n’admires pas comme il faudrait ce miracle étourdissant qu’est ta vie. Il me semble parfois que c’est avec ma soif que tu vas boire, et que ce qui te penche sur cet autre être que tu caresses, c’est déjà mon propre désir.
(J’admire combien le désir, dès qu’il se fait amoureux, s’imprécise. Mon amour enveloppait si diffusément et si tout à la fois, tout son corps, que, Jupiter, je me serais mué en nuée, sans même m’en apercevoir.)
La brise vagabonde
A caressé les fleurs.
Je t’écoute de tout mon cœur,
Chant du premier matin du monde.
Ivresse matinale,
Rayons naissants, pétales
Tout poissés de liqueur…
Cède sans trop attendre
Au conseil le plus tendre
Et laisse l’avenir
Doucement t’envahir.
Voici que se fait si furtive
La tiède caresse du jour
Que l’âme la plus craintive
S’abandonnerait à l’amour.
*
Que l’homme est né pour le bonheur,
Certes toute la nature l’enseigne.
Une éparse joie baigne la terre, et que la terre exsude à l’appel du soleil – comme elle fait cette atmosphère émue où l’élément déjà prend vie et, soumis encore, échappe à la rigueur première… On voit des complexités ravissantes naître de l’enchevêtrement des lois : saisons ; agitation des marées ; distraction, puis retour en ruissellement, des vapeurs ; tranquille alternance des jours ; retours périodiques des vents ; tout ce qui s’anime déjà, un rythme harmonieux le balance. Tout se prépare à l’organisation de la joie et que voici bientôt qui prend vie, qui palpite inconsidérément dans la feuille, qui prend nom, se divise et devient parfum dans la fleur, saveur dans le fruit, conscience et voix dans l’oiseau. De sorte que le retour, l’information, puis la disparition de la vie imitent le détour de l’eau qui s’évapore dans le rayon, puis se rassemble à nouveau dans l’ondée.
Chaque animal n’est qu’un paquet de joie.
Tout aime d’être et tout être se réjouit. C’est de la joie que tu appelles fruit quand elle se fait succulence ; et, quand elle se fait chant, oiseau.
Que l’homme est né pour le bonheur, certes toute la nature l’enseigne. C’est l’effort vers la volupté qui fait germer la plante, emplit de miel la ruche, et le cœur humain de bonté.
*
Le ramier qui exulte parmi les branches, – Les rameaux qui se balancent dans le vent, – Le vent qui penche les barques blanches, – Sur la mer luisant à travers les branches, – Les flots dont la crête blanchit, – Et le rire, et l’azur et la clarté de tout ceci, – Ma sœur, c’est mon cœur qui se raconte, – Qui raconte au tien son bonheur.
*
Je ne sais trop qui peut m’avoir mis sur la terre. On m’a dit que c’est Dieu ; et si ce n’était pas lui, qui serait-ce ?
Il est vrai que j’éprouve à exister joie si vive, que parfois je doute si déjà je n’avais envie d’être, alors même que je n’étais pas.
Mais nous réserverons pour l’hiver la discussion théologique, car il y a de quoi se faire beaucoup de mauvais sang là-dessus.
Table rase. J’ai tout balayé. C’en est fait ! Je me dresse nu sur la terre vierge, devant le ciel à repeupler.
Bah ! Je te, reconnais, Phoibos ! Au-dessus du gazon givré tu répands ta chevelure opulente. Viens avec l’arc libérateur. À travers ma paupière fermée, ton trait d’or pénètre, atteint l’ombre ; il triomphe, et le monstre intérieur est vaincu. Apporte à ma chair la couleur et l’ardeur, à ma lèvre la soif, et l’éblouissement à mon cœur. De toutes les échelles de soie que tu lances du zénith à la terre, je saisirai la plus charmante. Je ne tiens plus au sol ; je me balance à l’extrémité d’un rayon.
Ô toi que j’aime, enfant ! je te veux entraîner dans ma fuite. D’une main prompte saisis le rayon ; voici l’astre ! Déleste-toi. Ne laisse plus le poids du plus léger passé