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Le Sanctuaire
Le Sanctuaire
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Livre électronique322 pages4 heures

Le Sanctuaire

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À propos de ce livre électronique

LE PASSÉ REVIENT LES HANTER.

Dan, Abby et Jordan demeurent traumatisés par l’été qu’ils ont passé ensemble à l’asile de Brookline. Malgré tous leurs efforts pour tourner la page, quelqu’un est bien déterminé à garder la terreur vivante et envoie aux ados des photos d’un carnaval d’époque, sans nom ni message. Dan finit par recevoir une liste de coordonnées qui désignent des maisons abandonnées dans le village à proximité de Brookline et il est convaincu que le seul moyen de mettre fin à ce cauchemar une fois pour toutes est de retourner au Collège de New Hampshire pour suivre cette piste.

Cependant, quand Dan et ses amis arrivent au Collège, sous le couvert d’un week-end réservé aux étudiants potentiels, ils découvrent que le carnaval de leurs photos est non seulement réel, mais est de passage sur le campus pour la première fois depuis de nombreuses années. Tandis qu’ils échappent au regard attentif des collégiens qui sont leurs hôtes pour le séjour, ils visitent les maisons sur leur liste et découvrent des secrets plus sombres qu’ils n’auraient pu l’imaginer.
LangueFrançais
Date de sortie17 févr. 2017
ISBN9782897676612
Le Sanctuaire
Auteur

Madeleine Roux

Madeleine Roux is the New York Times and USA Today bestselling author of the Asylum series, which has sold over a million copies worldwide. She is also the author of the House of Furies series and several titles for adults, including Salvaged and Reclaimed. She has made contributions to Star Wars, World of Warcraft, and Dungeons & Dragons. Madeleine lives in Seattle, Washington, with her partner and beloved pups.

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    Aperçu du livre

    Le Sanctuaire - Madeleine Roux

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    Copyright © 2014 HarperCollins Publishers

    Titre original anglais : Sanctum

    Copyright © 2017 Éditions AdA Inc. pour la traduction française

    Cette publication est publiée en accord avec HarperCollins Publishers.

    Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit sans la permission écrite de l’éditeur, sauf dans le cas d’une critique littéraire.

    Éditeur : François Doucet

    Traduction : Roxanne Berthold

    Révision linguistique : Nicolas Whiting

    Correction d’épreuves : Nancy Coulombe, Féminin pluriel

    Images de la couverture : La fille : © 2014 Eva Van Oosten / Trevillion Images, Texture : © 2013 Naoki Okamoto / Getty Images, Photo de bordures : © 2013 iStockphoto, Les clés : © 2013 Dougal Waters / Getty Images, L’enfant : © Chip Pix / Shutterstock

    Conception de la couverture : Cara E. Petrus

    Montage de la couverture : Mathieu C. Dandurand

    Mise en pages : Sébastien Michaud

    ISBN papier 978-2-89767-659-9

    ISBN PDF numérique 978-2-89767-660-5

    ISBN ePub 978-2-89767-661-2

    Première impression : 2017

    Dépôt légal : 2017

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    Bibliothèque et Archives Canada

    Éditions AdA Inc.

    1385, boul. Lionel-Boulet

    Varennes (Québec) J3X 1P7, Canada

    Téléphone : 450 929-0296

    Télécopieur : 450 929-0220

    www.ada-inc.com

    info@ada-inc.com

    Imprimé au Canada

    Participation de la SODEC.

    Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.

    Gouvernement du Québec — Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC.

    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Roux, Madeleine, 1985-

    [Sanctum. Français]

    Le Sanctuaire

    Traduction de : Sanctum.

    Suite de : L’Asile.

    «Tome 2».

    Pour les jeunes de 12 ans et plus.

    ISBN 978-2-89767-659-9

    I. Berthold, Roxanne. II. Titre. III. Titre : Sanctum. Français.

    PZ23.R698Sa 2016 j813’.6 C2016-942273-9

    Diffusion

    Canada : Éditions AdA Inc.

    France : D.G. Diffusion

    Z.I. des Bogues

    31750 Escalquens — France

    Téléphone : 05.61.00.09.99

    Suisse : Transat — 23.42.77.40

    Belgique : D.G. Diffusion — 05.61.00.09.99

    Conversion au format ePub par:

    Lab Urbain

    www.laburbain.com

    À ma famille, qui ne cesse jamais de m’étonner par sa confiance, son soutien et son amour. S’il existe de meilleures personnes sur Terre, elles n’ont pas croisé ma route.

    « Une réalité niée revient nous hanter. »

    — Philip K. Dick

    Prologue

    C ’était une fantaisie de lumières, de sons et d’odeurs, de tentes de travers aux rayures multicolores et de rires qui éclataient comme le feu de canons le long des sentiers sinueux. Des curiosités attendaient derrière chaque tournant. Un homme crachait des flammes depuis un podium. L’odeur des gâteaux frits et du maïs soufflé restait suspendue dans l’air, sucrée et lourde, alléchante jusqu’à vous en donner la nausée. Puis, dans la toute dernière tente se trouvait un homme à la très longue barbe qui ne promettait ni fortune, ni excentricités, ni aperçu de l’avenir. Non, l’homme dans la dernière tente promettait ce que le petit garçon convoitait plus que tout.

    Le contrôle...

    Chapitre No 1

    Les amis, vous n’allez pas le croire, tapa Dan tout en secouant la tête devant son écran d’ordinateur. Un « expert en manipulation de la mémoire » ? Est-ce que ça existe réellement ? De toute façon, visionnez la vidéo, et dites-moi ce que vous en pensez !

    Son curseur survola la dernière ligne — il s’en dégageait un ton vraiment désespéré. Mais bon, Dan commençait à ressentir le désespoir. Ses trois derniers courriels étaient restés sans réponse ; il ignorait si Abby et Jordan les avaient même lus.

    Il appuya sur le bouton d’envoi.

    Dan se pencha derrière et fit des étirements au niveau de son cou. Il entendit les doux craquements de sa colonne qui se replaçait. Puis, il ferma le couvercle de son portable — avec peut-être un peu trop de force — et se leva avant d’enfoncer l’ordinateur dans son sac, entre des feuilles et des dossiers. La cloche sonna au moment où il refermait son sac, et Dan sortit de la bibliothèque pour gagner le couloir.

    Les étudiants dans le vaste corridor avançaient en une longue colonne. Dan reconnut quelques jeunes de son cours de calcul de la troisième période, et ils lui envoyèrent la main quand il s’approcha de leur rangée de cases. Missy, une petite brunette au nez tavelé de taches de rousseur, avait tapissé la porte de sa case de tous les autocollants et cartes postales de la série Doctor Who sur lesquels elle avait pu mettre la main. Un grand garçon dégingandé du nom de Tariq sortait des livres de la case voisine, et à ses côtés se tenait le plus petit garçon de terminale, Beckett.

    — Salut, Dan ! le salua Missy. Tu nous as manqué au déjeuner. Où es-tu allé ?

    — Oh, j’étais à la bibliothèque, dit Dan. Il fallait que je termine un truc pour le cours avancé en littérature.

    — Bon sang, vous avez tant de boulot à faire pour ce cours, dit Beckett. Je suis content d’être resté dans le cours d’anglais ordinaire.

    — Dis, Dan, nous parlions justement de Macbeth avant que tu arrives. Tu planifies y assister ?

    — Ouais, à ce qu’on m’a dit, le décor est incroyable, affirma Tariq, qui referma la porte de sa case avec fracas.

    — Je ne savais même pas que l’école présentait la pièce Macbeth, dit Dan. C’est une production du club d’art dramatique ou quoi ?

    — Oui, et Annie Si y tient un rôle. Une raison suffisante pour y aller.

    Beckett décocha un sourire espiègle vers les garçons, que Dan lui rendit à peine, puis le groupe s’engagea dans le couloir. Dan ne savait pas quel était le prochain cours des trois comparses, mais même s’il n’avait pas réellement fait de boulot à la bibliothèque, sa destination était bel et bien le cours avancé de littérature au deuxième étage. Ce n’était pas son cours préféré, mais Abby avait lu la majorité des livres du syllabus et avait promis de lui donner un résumé à un moment ou l’autre, ce qui améliorait les choses.

    — Nous devrions aller voir la pièce, fit Tariq.

    Il portait un pull trois fois trop grand pour lui et un pantalon moulant. Sa tenue lui donnait l’air d’une de ces figurines à la tête géante qui bouge.

    — Et tu devrais te joindre à nous, Dan. J’arriverai peut-être à obtenir des billets gratuits. Je connais le technicien en chef.

    — Je ne sais pas. Je n’ai jamais vraiment aimé Macbeth. Ça affecte trop les gens comme moi qui souffrent d’un TOC, dit Dan, pince-sans-rire, tout en frottant avec acharnement une tache invisible sur sa manche.

    Missy et Tariq le fixèrent d’un regard vide.

    — Vous savez ? fit-il avec un faible gloussement. « Va-t’en, tache damnée¹ ! » ?

    — Oh, c’est une réplique de la pièce ? demanda Tariq.

    — Ouais, c’est… C’est, euh, l’une des répliques les plus connues.

    Il fronça les sourcils. Abby et Jordan auraient saisi la blague. La pièce Macbeth ne faisait-elle pas partie des lectures obligatoires à l’école ?

    — En tout cas, à plus tard, les amis.

    Dan se sépara du groupe pour monter au deuxième étage. Il sortit son téléphone et décocha un texto rapide à Jordan et à Abby : « Personne ici ne comprend mon sens de l’humour. À l’aide ! » Vingt minutes plus tard, alors qu’il était assis, mort d’ennui, dans sa classe, Jordan n’avait toujours pas répondu, et Abby lui avait envoyé un tiède « MDR ».

    Qu’est-ce qui clochait ? Où étaient passés ses amis ? Ce n’était pas comme s’ils étaient terriblement occupés… La semaine précédente, Jordan lui avait indiqué lors d’une discussion sur Facebook que ses cours étaient mortellement assommants et qu’ils ne représentaient aucun défi, après les cours du programme préparatoire du Collège du New Hampshire. Dan avait sympathisé, mais pour parler franchement, les cours constituaient l’élément le moins marquant de son été au New Hampshire. C’étaient les événements survenus dans leur résidence, Brookline — un ancien hôpital psychiatrique dirigé par un directeur à l’esprit tordu, Daniel Crawford —, qui repassaient constamment dans sa tête.

    Cependant, quand il n’était pas occupé à se remémorer ce petit détail à propos du directeur, il songeait à Jordan et Abby. Dans les premières semaines après leur retour du campus collégien, il avait reçu un flux constant de textos et de courriels, mais à présent, ils se parlaient à peine. Missy, Tariq et Beckett n’étaient pas trop mal, au fond, mais Jordan et Abby étaient différents. Jordan savait comment jouer avec ses nerfs, mais il s’y prenait toujours de façon bon enfant et faisait rire le groupe. Et si Jordan poussait un peu trop la note, Abby était là pour le réprimander et rétablir l’équilibre. En réalité, elle était le pilier qui gardait le groupe solide — un groupe qui, dans l’esprit de Dan, méritait de rester uni.

    Dans ce cas, pourquoi ses amis l’ignoraient-ils ?

    Dan jeta un coup d’œil à l’horloge et poussa un grognement. Il restait encore deux heures avant la fin de la journée, deux heures avant qu’il puisse filer à la maison et aller en ligne pour voir si ses amis avaient envie de bavarder.

    Il soupira et s’affaissa sur son siège, puis rangea son téléphone à contrecœur.

    Il était étrange de songer qu’un lieu aussi dangereux que Brookline les avait rapprochés alors que la vie normale les éloignait les uns des autres.

    x x x x x x

    Un sandwich au beurre de cacahuètes à moitié mangé était posé sur une assiette près de son portable. À ses pieds, des feuilles d’arbre s’empilaient sur le manuel de son cours avancé en histoire. Habituellement, l’air vif de l’automne l’aidait à se concentrer, mais plutôt que de faire ses devoirs (comme il aurait dû le faire), il passait en revue le dossier qu’il avait monté sur Brookline. Au terme du programme préparatoire, Dan s’était assuré d’organiser ses notes, la recherche qu’il avait effectuée et les photographies qu’il avait recueillies dans un seul dossier bien en ordre.

    Il fut surpris en constatant qu’il le consultait plus souvent qu’il aurait dû. Même avec tous ces documents originaux, l’histoire du directeur était terriblement incomplète. Après avoir appris qu’il était peut-être parent de celui-ci par l’entremise de ses parents biologiques — et que cet homme horrible était peut-être son grand-oncle ou même son homonyme —, Dan avait l’impression qu’il y avait un trou dans son histoire personnelle, un mystère qu’il avait besoin d’élucider.

    Pour l’heure, cependant, son dossier n’était qu’une distraction lui permettant de passer le temps tandis qu’il attendait que Jordan et Abby ouvrent une session. Quelle était l’expression que son père avait l’habitude de dire déjà ? « Dépêche-toi d’attendre… »

    — Est-ce que je pourrais être plus pitoyable ? marmonna Dan, qui enfonça les deux mains dans sa chevelure sombre et ébouriffée.

    — Je crois que tu es très bien comme tu es, mon chéri.

    Bon, il valait mieux qu’il garde pour lui ses apartés moroses à l’avenir. Dan leva les yeux et aperçut sa mère, Sandy, qui lui souriait depuis la véranda. Elle tenait une tasse fumante de chocolat chaud qui, il l’espérait, lui était destinée.

    — Tu travailles fort ? demanda-t-elle en faisant un signe de tête vers son manuel d’histoire oublié à ses pieds.

    — J’ai presque terminé, répondit-il avec un haussement d’épaules.

    Il accepta la tasse de chocolat chaud de ses mains courbées ; les manches de son pull recouvraient ses doigts.

    — Je pense que j’ai droit à une pause de temps à autre.

    — C’est vrai, dit Sandy en lui adressant un demi-sourire contrit. C’est seulement que… Eh bien, il y a quelques mois, tu semblais si impatient à l’idée d’envoyer une demande d’admission anticipée à l’Université Penn, mais nous voilà en octobre, et l’échéance approche à grands pas.

    — Je dispose encore de bien du temps, fit Dan d’un ton peu convaincu.

    — C’est peut-être le cas pour la rédaction de ta dissertation. Mais ne crois-tu pas que les gens du bureau d’admission trouveront étrange que tu aies cessé toutes tes activités parascolaires durant ta dernière année ? Ne pourrais-tu pas obtenir un stage ? Même si ce n’est qu’un jour par fin de semaine, je crois que ça ferait toute la différence. Et peut-être que tu devrais visiter d’autres campus aussi. Tu sais, les demandes anticipées, ce n’est pas pour tout le monde.

    — Je n’ai pas besoin d’activités parascolaires tant que je maintiens ma moyenne. Et par ailleurs, le CPNH va être un atout extra sur ma demande.

    Sandy fronça ses sourcils pâles, et un vent frisquet vint ébouriffer ses cheveux qui lui allaient jusqu’aux épaules tandis qu’elle détournait le regard pour fixer les arbres entourant la véranda. Elle serra les bras autour d’elle et secoua la tête. C’était toujours la même réaction quand le sujet du CPNH venait sur le tapis. Jordan et Abby avaient pu maquiller et masquer la vérité au sujet de Brookline à leurs parents, mais ceux de Dan connaissaient toute l’histoire, plus ou moins. Ils avaient été présents lors de l’interrogatoire de la police, avaient entendu Dan relater le moment où il avait été attaqué et plaqué au sol… Simplement mentionner l’endroit en leur présence était comme chuchoter un juron.

    — Mais c’est d’accord, fit Dan avant de souffler sur son chocolat chaud. Je peux essayer de trouver un stage ou un truc du genre. Pas de soucis.

    Le visage de Sandy se détendit, et ses bras retombèrent contre ses flancs.

    — Vraiment ? Ce serait génial, mon grand.

    Dan opina de la tête et alla même jusqu’à ouvrir une nouvelle fenêtre de navigation sur son portable pour lancer une recherche. Il tapa « Stage dans un zoo » dans le moteur de recherche et inclina légèrement l’écran hors de la vue de sa mère.

    — Merci pour le chocolat chaud, ajouta-t-il.

    — Avec plaisir.

    Elle lui ébouriffa les cheveux, et Dan poussa un soupir de soulagement.

    — Tu ne sors pas beaucoup, dernièrement. Ce n’est pas l’anniversaire de Missy bientôt ? Je me rappelle que tu es allé à une fête chez elle autour de l’Halloween l’an dernier.

    — Probablement… répondit-il avec un haussement d’épaules.

    — Et tes… autres amis ?

    Elle avait trébuché sur le mot « amis ».

    — Abby, c’est ça ? Et le garçon ?

    Elle faisait toujours ça : elle s’informait d’Abby comme si elle ne parvenait pas tout à fait à se remémorer son nom. C’était tout comme si elle n’arrivait pas à croire ni à accepter que Dan puisse avoir une petite-amie — en quelque sorte. S’il se montrait honnête, Dan ne parvenait pas toujours à y croire lui-même.

    — Ouais, fit-il dans un grognement évasif. Ils sont occupés, par contre. Tu sais… l’école, le travail et tout.

    « Quelle réplique géniale, Dan ! Ton Oscar est en route. »

    — Travail ? Donc, ils ont un emploi ?

    — Subtil, maman, marmonna-t-il. Je peux comprendre ton sous-entendu…

    — J’en suis convaincue, mon chéri. Oh, avant que j’oublie — le courrier a été livré. Il y avait quelque chose pour toi…

    Voilà qui était inhabituel. Il ne recevait jamais quoi que ce soit par la poste traditionnelle. Sandy feuilleta les enveloppes qu’elle avait rangées dans la poche de son blouson et en laissa tomber une sur sa cuisse. On aurait dit qu’elle avait affronté un cycle de lavage avant d’être traînée dans la poussière. Dan vérifia l’adresse de l’expéditeur, et une douleur froide lui traversa le ventre.

    Sandy hésita dans les parages.

    — C’est probablement de la pub, dit Dan d’un ton léger avant de jeter l’enveloppe sur ses livres.

    Sa mère saisit le message. Elle lui adressa un sourire pincé, puis tourna les talons. Il entendit à peine la porte se refermer quand Sandy disparut dans la maison. Dan se jeta sur la lettre.

    Lydia et Newton Sheridan

    Sheridan ? Comme Félix Sheridan ? Son ancien compagnon de chambre, celui qui avait essayé de le tuer au cours de l’été, parce qu’il était devenu fou ou… possédé ? Quand il fermait les yeux, Dan pouvait encore voir le rictus maniaque de Félix. Possédé ou non, Félix avait cru fermement être la réincarnation du Sculpteur.

    Les mains de Dan tremblèrent tandis qu’il déchirait l’enveloppe. Il se dit alors qu’il s’agissait peut-être de simples excuses. Il était tout à fait possible que les parents de Félix souhaitent lui tendre la main pour lui communiquer leurs regrets pour tous les torts que leur fils lui avait causés.

    Dan inspira profondément et s’assura d’être bien seul. Par la fenêtre entrouverte, il entendit Sandy laver la vaisselle dans la cuisine.

    Cher Daniel,

    Tu es probablement surpris de recevoir une lettre de ma part, et j’aurais aimé éviter de le faire, mais il m’apparaît évident qu’il s’agit de ma seule option.

    Je n’ai aucun droit de te demander une telle chose, mais je te prie de me téléphoner dès que tu recevras cette lettre. Si tu ne communiques pas avec moi… Eh bien, je ne pourrai pas t’en vouloir.

    603-555-2212

    Je t’en prie, appelle-moi.

    Sincères salutations,

    Lydia Sheridan


    1. N.d.T.: Dans la traduction française de la pièce par Victor Hugo.

    Chapitre No 2

    D an hésita entre balancer la lettre dans les ordures ou composer le numéro tout de suite. Dans la maison, il entendait toujours le doux cliquetis de sa mère qui lavait et essuyait la vaisselle. Il lut la lettre une autre fois et tapota la feuille contre ses jointures tandis qu’il examinait ses options.

    D’un côté, il aurait été parfaitement heureux d’oublier jusqu’à l’existence de Félix, mais d’un autre…

    D’un autre côté, il aurait menti en affirmant ne pas être curieux à propos de l’état de son ancien compagnon de chambre. Toute l’histoire s’était terminée sans être résolue. La sensation froide dans son ventre refusait de disparaître.

    « Félix a probablement besoin de ton aide. Tu as besoin d’aide, toi aussi. Est-ce vraiment juste de déclarer qu’une personne est une cause perdue ? »

    Il fixa la fenêtre à sa droite. Sa mère fredonnait, à présent, et la musique flottait doucement jusqu’où il était assis. Quelques feuilles tombèrent de l’érable qui plombait sur la véranda. Paul avait beau émonder ses branches encore et encore, l’arbre continuait de tendre vers la maison. Mais ça n’empêchait pas son père de persévérer.

    Dan agrippa son téléphone cellulaire et composa le numéro de Lydia Sheridan avant de trouver une raison de se désister.

    La ligne sonna et sonna encore, et l’espace d’un instant, il fut persuadé qu’elle n’allait pas répondre. Il espéra presque qu’elle n’en fasse rien.

    — Allô ?

    — Allô, Lydia — Madame Sheridan ?

    Sa propre voix parut aigüe et étrange à ses oreilles.

    — C’est moi… Qui est-ce ? Je ne reconnais pas le numéro.

    Elle avait le même ton doux et réservé que Félix, mais il s’agissait d’une version plus détendue et féminine de la voix dont il se souvenait.

    — C’est Dan Crawford à l’appareil. Vous m’avez envoyé une lettre pour me demander de vous téléphoner. Alors… eh bien, c’est ce que je fais.

    Le silence s’installa à l’autre bout du fil pendant ce qui parut être une éternité. Enfin, il entendit les inspirations irrégulières de la mère de Félix.

    — Merci, dit-elle d’une voix qui donnait l’impression qu’elle était sur le bord des larmes. Nous sommes… Nous ne savons plus quoi faire. Il semblait mieux se porter. Les médecins qui le soignent croyaient réellement que son état s’améliorait. Mais à présent, c’est comme s’il avait frappé un nœud. Il ne fait rien d’autre que te demander, jour après jour : Daniel Crawford, Daniel Crawford.

    Cette nouvelle était plus que troublante.

    — Je suis désolé d’entendre ça, mais je ne comprends pas trop ce que vous attendez de moi, dit Dan.

    C’était peut-être une attitude froide, mais que pouvait-il bien faire ? Il n’était pas médecin.

    — Ça va probablement passer. Je parie qu’il ne lui faut qu’un peu de temps, dit Dan.

    — Et toi ? demanda Lydia.

    Dan redressa brusquement la tête, saisi par la pointe glaciale soudaine dans la voix de la femme.

    — Est-ce que ça a passé pour toi ? lança-t-elle avant de soupirer. Je suis désolée. Je… je ne dors pas. Je suis si inquiète pour lui. Je déteste vraiment te demander une telle chose…

    — Mais ? demanda Dan pour l’encourager à continuer.

    Ce n’était pas nécessaire. Il pouvait voir la question venir à un kilomètre.

    — Si tu pouvais simplement venir à Morthwaite pour le voir… Je ne sais pas. Je te supplie à ce stade, comprends-tu ? Je te supplie. Je veux seulement qu’il prenne du mieux. Je veux que tout ceci se termine.

    Dan entendit les larmes lui casser la voix encore une fois.

    — Ce n’est pas terminé pour lui, Dan. Est-ce terminé pour toi ?

    Il lui fallait en rire. Avait-il l’impression que c’était terminé ? Non, pas du tout. Les rêves persistaient, toujours aussi terrifiants, et mettaient souvent en vedette le directeur en personne. Ce n’était pas terminé, et aussi tordu que ça puisse paraître, Dan était un peu soulagé de ne pas être le seul dans cette situation.

    — Ça ne fonctionnera peut-être pas, dit Dan lentement. Je pourrais empirer son état. Vous en êtes consciente, n’est-ce pas ?

    « Je ne veux pas vivre avec ce fardeau. Je ne le peux pas. »

    Il se sentait déjà assez coupable d’avoir entraîné Abby et Jordan dans ses ennuis à Brookline. À tout le moins, dans le cas de Félix, il avait réussi à se convaincre de son innocence : cette hypocrite de professeure Reyes avait pratiquement admis avoir appâté Félix dans le sous-sol, où son esprit était… eh bien, où son esprit était resté, selon les apparences.

    — Mais tu vas venir ? dit madame Sheridan d’un ton qui semblait heureux, plein d’espoir. Oh, merci. Je t’en prie, je… Merci.

    — Donc, où vais-je aller, exactement ? demanda Dan, dont l’estomac s’était serré en un nœud géant de peur. Et comment vais-je m’y rendre ?

    Chapitre No 3

    L e samedi suivant, Dan se retrouva assis dans le siège du passager de la Prius gris anthracite de Lydia Sheridan. Grande et svelte, elle agrippait son volant, le dos voûté. Des bouclettes serrées et brunes échappaient à une pince papillon à motif d’écailles de tortue qui peinait à retenir ses cheveux. Des lunettes à la monture légère glissaient sur l’arête de son nez.

    — Es-tu certain que tes parents sont à l’aise avec cette visite ? avait demandé madame Sheridan à Dan à son approche de sa voiture plus tôt cet après-midi-là.

    — Ouais, bien sûr, avait-il répondu tandis qu’il attendait qu’elle déverrouille la portière du côté passager. C’est seulement qu’ils rénovent la maison. Il y a des camions partout. Nous ne pouvons même pas nous garer dans la cour en ce moment. Mais ils ont été heureux d’apprendre que j’allais voir Félix.

    Après cet échange inconfortable de civilités (dans le stationnement d’un restaurant McDonald’s), Dan était monté à bord, et le voyage s’était déroulé en silence depuis.

    Il ne mourait certainement pas d’impatience de savoir ce qui l’attendait exactement. Cependant, il ne parvenait pas à réunir le courage nécessaire pour le lui demander.

    Il garda plutôt les yeux rivés à son téléphone pour lire la réponse d’Abby et de Jordan à un message qu’il leur avait envoyé le matin même pour les informer de sa visite à Félix. Il tenait là la preuve que ses amis lisaient toujours ses messages, à tout le moins. Mais en cet instant, Dan se disait qu’il

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