Le Vertige de Gabrielle
Par Marie Gray
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À propos de ce livre électronique
Gabrielle danse. C’est toute sa vie! Son nouveau chum apprécie cette relation pas compliquée. Elle aimerait bien, elle, que les liens soient plus solides entre eux, mais l’ex-copine de Nico a laissé des cicatrices.
Puis les rêves de Gabrielle s’envolent en fumée. Ses étourdissements et ses nausées ne sont pas les symptômes d’une maladie, non… L’impensable s’est produit: elle est enceinte. Les questions se bousculent dans sa tête. Qu’est-ce qui va se passer? Comment Nico réagira-t-il? Et ses parents? Peut-elle envisager d'avoir un bébé à 16 ans? L’avortement, est-ce un meurtre, comme certains le disent? En plein vertige, Gabrielle sent son monde s’écrouler.
Gabrielle, ça pourrait être toi. Si tu étais dans sa situation, qu’est-ce que tu ferais à sa place?
Un roman sans tabous qui parle des vraies choses. Même de ça.
Bien connue pour ses ouvrages destinés aux adultes (Histoires à faire rougir, Baiser, Sois belle et tais-toi) qui ont connu un énorme succès, Marie Gray s’adresse aux ados (qu’elle adore!) de façon réaliste, explicite et respectueuse dans des romans qui ne laissent pas indifférent.
«Un livre touchant, poignant, une histoire émouvante et très réaliste sur un sujet tabou.»
Le Journal de Montréal
Marie Gray
Enjouée, espiègle, Marie Gray est reconnue pour son charme et sa spontanéité. Bien connue pour ses ouvrages destinés aux adultes (les Histoire à faire rougir) qui ont obtenu un immense succès mondial, elle a su conquérir son lectorat avec sa prose captivante et intrigante. C'est d'ailleurs dans ce style qui lui réussit si bien, poussée par son intérêt pour l'univers des adolescents et son désir de communiquer avec eux, que l'auteure a lancé la collection Oseras-tu? pour les jeunes de 14 à 18 ans. Convaincue de la pertinence d'une série de romans traitant de façon réaliste et explicite des sujet qui touchent de près les jeunes, comme les premières relations sexuelles, la pression des pairs, l'intimidation, le harcèlement et bien d'autres choses encore, Marie Gray aborde ces thèmes sans morale ni préjugés, sans censure ni vulgarité. Par le biais d'une fiction proche de leur réalité, elle interpelle les jeunes et les invite à faire des parallèles entre leurs expériences personnelles et celles vécues par les personnages de la série
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Aperçu du livre
Le Vertige de Gabrielle - Marie Gray
INTRODUCTION
Faux pas
Je danse. Comme toujours, lorsque je danse, je suis dans mon propre univers, dans ma bulle. La scène est immense, la salle aussi : danser ici, dans cet endroit presque mythique, c’est l’accomplissement d’un rêve que je caresse depuis que j’ai l’âge de quatre ans.
Dans la première rangée de spectateurs, je peux voir mes parents et mon frère, Julien, avec sa copine, Zoé. Ils sourient, semblent contents d’être là, fiers de partager ce grand moment avec moi. Je vois aussi mes amies Maude et Laurence ; Maude est plus loin, comme si elle ne voulait pas vraiment être ici, Laurence, tout en avant. Et Nico est là, lui aussi. Il me regarde de ses yeux trop bleus, trop tristes aussi.
Je les vois, leur présence me fait du bien, mais, en même temps, je n’ai pas besoin d’eux. Je danse, et c’est tout ce qui compte. Je ne réfléchis pas, mon corps sait bien ce qu’il doit faire et il exécute les mouvements à la perfection, je le sais, je le sens. Tant d’heures de pratique, d’entraînement, d’étirements ! Je me sens comme un cygne, comme si je volais, comme si, lorsque mes pieds touchaient le sol, mon corps était aussi léger qu’une plume.
Je suis tellement absorbée par ma danse que, quand les spectateurs se mettent à disparaître, tout doucement, je ne m’en rends pas compte. C’est seulement lorsque le bébé se met à pleurer qu’une faille dans ma concentration me permet de voir qu’ils ne sont plus là. À leur place, un précipice. Je l’ai déjà vu, ce gouffre qui me semble sans fond, mais il me terrifie toujours autant.
Un vertige s’empare de mon corps, et ce vertige-là aussi m’est familier. Je fais un extraordinaire effort de volonté pour le chasser, mais le poupon – je le vois maintenant, dans un petit panier, tout au fond de la scène, tout seul comme s’il m’attendait – se remet à pleurer. De petits sanglots d’une tristesse incroyable qui me bouleversent. Mes jambes fléchissent, mon corps faiblit. Qui est-il, cet enfant ? Je devrais savoir, pourtant. Je n’ai jamais vu son visage, mais je sais que c’est le mien.
J’essaie de continuer de danser, mais je suis étourdie, déchirée. Devrais-je arrêter pour aller le consoler, le prendre dans mes bras ? Oui, mais je ne peux pas arrêter de danser, pas maintenant, ce moment est le plus important de toute ma vie. Qu’arrivera-t-il si je le laisse là ? Continuera-t-il de pleurer ou se calmera-t-il de lui-même ? Non, ses pleurs s’intensifient déjà. Si ma mère était toujours là, je pourrais lui demander de s’occuper de lui, mais elle a disparu, et il ne reste devant moi que ce précipice qui menace de m’avaler à tout moment. Un minuscule faux pas et ça y est…
La musique devient discordante, plusieurs pièces s’emmêlent et tout se met à tourner de plus en plus vite. Le bébé m’appelle, m’espère, et essayer de l’ignorer est futile. Je ne veux pourtant pas l’ignorer, car il a besoin de moi ! Mais moi, j’ai besoin de danser, sinon je sais que je vais tomber dans le vide, que je tomberai pendant des heures, des jours, des années. Et qu’est-ce qui m’attend tout au fond de ce trou ?
Je me réveille en sueur. Encore. Je croyais que c’en était fini de ce rêve, du moins, de cette version de mon rêve… Je croyais que je n’entendrais plus ce bébé pleurer, que je n’aurais plus peur de tomber. Tout le monde m’a dit que j’arriverais à oublier, mais c’est long, trop long. Suis-je trop impatiente ? Est-ce que je vais faire ce maudit rêve pour le reste de mes jours ? Je me croyais plus forte que ça, quand même. Je me suis toujours crue plus forte, plus déterminée, plus mature que les filles de mon âge. Peut-être, mais ça ne m’a pas servi tant que ça, apparemment. Et en fait de maturité, autant je me croyais vieille pour mon âge, autant je me rends compte que mon cœur ne suivait pas toujours ma tête et que ça ne m’a pas empêchée de me retrouver là où je me suis ramassée…
CHAPITRE 1
Un automne mouvementé
— Gabrielle, viens-tu ? On t’attend, Julien va être en retard !
J’avais décidé d’aller voir la partie de hockey de mon frère, Julien, d’abord parce que j’aimais le voir jouer, mais surtout parce que je venais de me disputer avec mon copain, Jean-Christophe. Je n’avais pas envie qu’il vienne chez moi pour qu’on « parle » ; cette fois-ci, il était allé un peu loin et je voulais bouder un peu. Je ne lui avais pas dit que j’allais à l’aréna. Il serait sans doute venu me rejoindre même s’il déteste le hockey.
Ce n’était pas une partie officielle – la saison ne faisait que commencer –, seulement un de ces matchs hors saison qui permet de voir comment se présentent les équipes. Mais ça valait tout de même mieux que discuter sans fin d’un sujet qui revenait trop souvent à mon goût : j’avais envie de sortir et de m’amuser avec des amis, et ça ne plaisait pas à Monsieur. Il disait que mes amies n’avaient rien à dire, qu’elles ne parlaient que de danse. Moi, je trouvais que les siens étaient aussi ennuyants que lui, ce qui n’était pas peu dire.
Nous sortions ensemble depuis deux mois et je m’interrogeais de plus en plus sérieusement sur mon avenir avec Jean-Christophe. Cette relation avait, bien sûr, ses bons moments. Il était toujours très attentionné et gentil avec moi. Comme il était aussi très beau, je savais que plusieurs filles m’enviaient, ce qui n’était pas totalement déplaisant. Mais je n’étais pas certaine qu’il m’attirait tant que ça, au-delà des apparences. Il avait plusieurs qualités : il était très généreux, doux, patient et romantique, mais il avait aussi plusieurs défauts que ses nombreux bons côtés arrivaient de moins en moins à me faire oublier. Il était très pessimiste, trop calme et ne semblait jamais avoir d’enthousiasme pour quoi que ce soit. Avant que nous commencions à sortir ensemble, il passait ses soirées à écouter de la musique, à flâner au parc à fumer joint sur joint avec des amis sans rien faire d’autre que de graver des messages sans intérêt sur les modules, regarder des vidéos de musique sur YouTube ou critiquer presque tout le monde. Au début, je me disais que le fait de changer d’activités le ferait sûrement changer d’attitude, mais plus le temps passait, plus je trouvais qu’il manquait d’énergie, qu’il était amorphe, que rien ne l’excitait. Il prétendait que ceux qui ne pensaient pas comme lui étaient cons.
J’avais fini par lui en parler, et il avait avoué que j’avais raison et qu’il était parfois plutôt borné, mais il s’était défendu en disant qu’il ne s’en rendait pas toujours compte. Il m’avait promis qu’il essaierait de se corriger si je voulais bien l’aider… et ça avait marché, du moins, pour un temps. L’autre chose qui m’agaçait était sa « consommation ». Quand je l’avais rencontré, il m’avait avoué qu’il fumait presque tous les soirs, mais que ça aussi, ça changerait. Depuis, il me jurait qu’il gardait ça pour la fin de semaine. J’avais un peu de mal à le croire, mais je lui faisais confiance jusqu’à preuve du contraire. Il m’avait bien sûr offert d’essayer, ce que j’avais fait, par curiosité. La première fois, j’avais tellement toussé que j’avais cru m’évanouir et n’avais ressenti qu’un énorme mal de tête. La deuxième fois, il m’avait fait respirer la fumée refroidie par de l’eau dans une bouteille de plastique. C’était effectivement moins étouffant et là j’avais bien ressenti quelque chose. Cependant, même si je pouvais comprendre le plaisir qu’il pouvait y avoir à rire pour rien et se sentir… comment dire, libre, peut-être, moi, j’avais détesté la perte de contrôle qui venait avec. Je n’aimais pas le fait de ne pas pouvoir redevenir « normale » au moment où je le voulais. Je n’aimais pas non plus cette envie irrésistible de manger tout ce qui me tombait sous la main et je détestais, plus que tout, cette impression que toutes les conneries qu’on trouve idiotes en temps normal nous paraissaient, sous l’effet du pot, tout à fait acceptables ou même brillantes. J’avais donc conclu que ce n’était pas pour moi. Je ne critiquais pas Jean-Christophe puisqu’il était bien libre de faire ce qu’il voulait, comme je l’étais aussi.
Or, depuis quelque temps, je savais qu’il avait recommencé à fumer plus souvent même s’il refusait de l’avouer. C’était quand même assez évident ! Je me demandais d’ailleurs comment il réussissait à s’acheter autant de pot. Lui qui n’avait pas d’emploi avait pourtant toujours de l’argent sur lui. Il me disait qu’il avait travaillé pour son oncle, ce qu’il faisait effectivement à l’occasion. Je commençais cependant à me douter que quelque chose clochait. Bien assez pour me demander si, en plus de tout le reste, je voulais continuer de sortir avec lui ou non…
Même si j’assistais presque toujours aux parties de Julien, j’aurais eu envie, cet après-midi-là, d’aller au cinéma ou au centre commercial, mais mes amies n’étaient pas disponibles : Maude travaillait et Laurence gardait. Y aller seule ne m’attirait pas tellement et la partie de hockey de mon frère aurait au moins le mérite de me changer les idées. Et puis, de passer un peu de temps avec mes parents ne me déplaisait pas totalement non plus, du moins, comme deuxième choix. Alors que plusieurs de mes amies ne font que se plaindre de leurs parents, moi, les miens, je les trouve relativement acceptables. Évidemment, ils me tombent régulièrement sur les nerfs – ma mère dit d’ailleurs que c’est réciproque ! –, mais on ne se chicane pas trop et je sens qu’ils me font confiance la plupart du temps, ce que j’apprécie pas mal. Et puis, même si je ne l’ai pas toujours réalisé, ils en font beaucoup pour moi et je sais que ça leur demande des efforts. C’est grâce à eux, après tout, que je peux continuer mes cours à l’École supérieure de ballet. Ce serait plus simple pour eux si j’allais à l’école « normale », en autobus scolaire, comme tout le monde. Comme ils savent à quel point je veux danser, ils acceptent de me laisser à la gare chaque matin et m’y reprendre le soir afin que je n’aie pas à me taper trois autobus pour me rendre et revenir de mon école située au centre-ville. Ils assistent à chacun de mes spectacles, m’emmènent à chacune de mes auditions, m’encouragent depuis que j’ai commencé à danser à l’âge de quatre ans en plus de faire la même chose pour le hockey de Julien. Je ne réalisais pas avant ce que ça pouvait représenter comme casse-tête pour eux. Je trouvais tout ça normal ; c’est le travail des parents, non ? Puis, un jour, je les ai critiqués parce que j’étais arrivée en retard et que j’avais manqué mon train, ce qui était pourtant en partie ma faute. Alors, ils m’ont fait voyager en autobus pendant deux semaines. Maintenant, je comprends un peu mieux et j’apprécie ce qu’ils font.
Mes parents ne se doutaient sans doute pas qu’en m’emmenant voir Casse-Noisette, alors que je n’avais même pas commencé la maternelle, ils changeraient ma vie. C’est pourtant depuis ce jour que je danse. Je me souviens que mon père, qui a toujours eu du mal à me refuser quoi que ce soit, m’avait acheté ce jour-là un chausson qui avait appartenu à une ex-danseuse étoile. Cette pointe-là s’était dressée, avait porté une véritable ballerine en chair et en os, vêtue d’un costume fabuleux, et je voulais que ce soit moi un jour. Je le souhaite toujours autant, et mes parents, partagés entre tous mes cours, mes spectacles et les parties de hockey de mon frère, font tout ce qu’ils peuvent pour rendre ce rêve possible.
Mon frère participe aussi, à sa façon, même s’il n’a pas le moindre intérêt envers la danse. Nous n’avons que dix-huit mois de différence, lui et moi, mais c’est lui le « grand », et nous nous entendons bien. Nous avons bien sûr eu nos moments plus difficiles, lorsque nous étions plus jeunes, mais depuis quelques années, il est devenu un de mes meilleurs amis.
Après avoir tâté tous les styles de danse, depuis le début de mon secondaire, je fréquente l’École supérieure de ballet, l’endroit qui me permettra d’atteindre les plus hauts sommets de la danse. La formation classique a ses bons et ses mauvais côtés ; je ne suis pas totalement amoureuse de la rigidité du ballet, mais je sais bien que je dois maîtriser cette technique avant d’entreprendre quoi que ce soit d’autre de sérieux. Plusieurs de mes amies adorent justement l’aspect conventionnel de ce style de danse. Petite, moi aussi, j’étais folle des chignons bien serrés. Je voulais ressembler à ces belles ballerines, parfaites comme des poupées de porcelaine, à la démarche fluide et au port de reine. Aujourd’hui, j’aimerais bien parfois laisser flotter mes cheveux librement, porter des bijoux plus voyants, me maquiller, mais tout ça est rigoureusement interdit à l’école. C’est pourquoi la fin de semaine, je me permets d’être différente ; je cherche toujours mon style, j’imagine. « T’es pas comme les autres danseuses », me dit parfois Julien pour me narguer. Je sais qu’il me trouve talentueuse et qu’il aime ce petit côté rebelle en moi… même si du lundi au vendredi, je redeviens le joli petit bibelot exigé par l’école. Les cours coûtent assez cher et même si ma famille est à l’aise financièrement, nous ne sommes pas millionnaires. Mes parents font des sacrifices pour me permettre ça, normal que je travaille aussi fort pour devenir la grande danseuse que je sais pouvoir devenir. La danse, c’est ma vie, et je leur montrerai, un de ces jours, qu’ils ont bien fait de croire en moi.
Ce samedi-là, donc, j’ai suivi mes parents à l’aréna. À moins de contraintes scolaires ou de conflits d’horaire, j’assistais chaque fois que je le pouvais aux parties de Julien, et lui en faisait de même pour mes spectacles de danse. J’adorais quand il venait me voir danser. Julien a toujours pris son rôle de grand frère très au sérieux et même s’il accepte que je sorte avec certains de ses amis ou connaissances, il doit d’abord donner son approbation. Au début, ça m’agaçait jusqu’à ce que je me rende compte que je faisais la même chose pour lui : mon frère est très populaire auprès de mes amies et l’a toujours été. Je lui en ai évité, des pertes de temps avec des princesses qui ne le méritaient pas ! C’est d’ailleurs lui qui m’a fait comprendre, il n’y a pas très longtemps, que certains gars « tripaient » sur les danseuses de ballet. Et moi, je l’agaçais en lui disant qu’il ne venait voir mes spectacles que lorsqu’il cherchait une blonde…
— Arrête donc, c’est pas ça !
— Avoue donc que les filles en maillot, minces et aux grandes jambes, tu les aimes encore plus depuis que t’as compris qu’on porte rien en dessous !
Il m’avait jeté un regard assassin en rougissant. Puis il avait admis que c’était normal.
— Alors, ça te dérange pas que tes chums me regardent en pensant à des affaires de même ?
Il avait rougi encore plus et s’était mis en colère.
— Je laisserai pas un de mes chums triper sur toi juste parce que t’es danseuse.
— Ah, mais que toi tu tripes sur mes amies précisément pour la même raison, c’est correct ?
— Toi, c’est pas pareil, t’es ma sœur !
Devant cette logique aussi implacable que douteuse, nous avons fini par convenir, lui et moi, que si un gars se montrait intéressé à moi et que Julien le jugeait « acceptable », nous éviterions de révéler que je dansais, afin de voir si le gars en question était vraiment intéressé à moi. Je trouvais ça bien compliqué pour rien, mais c’était aussi assez comique. Comme si nous avions un gros secret. J’aimais bien partager des secrets avec Julien !
Dans le stationnement de l’aréna, ce fameux jour-là, je n’ai pas pu m’empêcher de remarquer un des joueurs au moment où il descendait de la voiture de ses parents. Il était grand, plus grand encore que Julien, et au-dessus de ses larges épaules trônait un visage incroyable, percé de deux yeux bleu tellement pâle qu’ils me firent penser à ceux d’un chien husky. Ses cheveux noirs brillaient sous le soleil d’automne. Il venait de me faire une impression monstre et je voulais, en un instant, tout savoir sur lui. J’espérais tant qu’il soit dans l’équipe de Julien, comme ça, je pourrais éventuellement le connaître ! Toute pensée au sujet de Jean-Christophe s’était envolée, autant de ma tête que de mon cœur, comme par magie.
J’ai attendu fébrilement le début de la partie pour voir quel chandail il porterait, celui de notre équipe ou non. Je l’ai reconnu aussitôt qu’il a grimpé sur la patinoire malgré l’équipement qui lui cachait une bonne partie du visage. Mon cœur s’est emballé lorsque j’ai constaté qu’il était dans l’équipe de Julien : je le verrais donc tout l’hiver. Quel joueur il était ! Il se démarquait de la plupart des autres et c’est lui qui a permis à l’équipe de gagner ce premier match 4-0. Il semblait danser sur la glace, comme s’il flottait, et se déplaçait à une vitesse incroyable sans avoir l’air de fournir le moindre effort. J’aurais pu le regarder jouer pendant des heures.
Une fois la partie terminée, j’ai insisté pour aller attendre Julien dans l’entrée, au grand étonnement de mes parents. En effet, c’est habituellement pendant que mon frère se change et prend sa douche que je m’éclipse pour aller marcher un peu, appeler Jean-Christophe ou une amie. C’est si long parfois ! Mais ce jour-là, je tenais à être bien présente lorsque Julien, et particulièrement un de ses coéquipiers, sortirait du vestiaire.
Je me trouvais un peu méchante envers Jean-Christophe de ressentir autant d’excitation pour quelqu’un que je ne connaissais même pas alors que j’avais déjà un copain, très amoureux de moi, en plus. J’ai cependant réussi assez facilement à me déculpabiliser. Après tout, je ne faisais rien de mal : je m’informais, tout simplement.
Près d’une demi-heure plus tard, Julien est sorti du vestiaire accompagné, comme par hasard, du joueur mystère. J’ai retenu mon souffle : il était encore plus beau de proche. Il avait un sourire absolument irrésistible, et lorsque ce sourire s’est dirigé vers moi, j’ai senti la température de la pièce augmenter drastiquement. Peut-être était-ce seulement mon cœur qui battait tellement vite que j’avais aussi chaud que lorsque je dansais depuis des heures ? Peu importait. Je voulais lui parler, mais j’avais la gorge sèche et pas la moindre idée de ce que je pourrais bien lui dire. J’étais devenue muette et idiote, mon cerveau fondant à vue d’œil comme une boule de crème
