L’analogie dérange. Imaginer, au sein de notre propre corps, un organe retrouvé habituellement dans les assiettes, et surtout rendu intentionnellement malade via une spectaculaire technique de gavage des oies et des canards – le tube directement dans le gosier… Et puis quoi encore ? Pourtant, la maladie du foie gras non alcoolique (ou NAFLD pour Non-Alcoholic Fatty Liver Disease) mérite son nom : le nôtre peut bien se retrouver saturé de graisse, exactement comme celui d’une oie gavée.
Plus encore, ce mal est massivement répandu aujourd’hui : 18 % des adultes en France sont concernés, jusqu’à 30 % aux États-Unis. “C’est une épidémie mondiale, et les chiffres sont en progression”, alerte Laurent Castera, hépatologue à l’hôpital Beaujon de Clichy.
ORGANE RÉSILIENT
Pourquoi n’en avons-nous pas – ou si peu – entendu parler ? En fait, le foie, situé à l’interface du tube digestif et de la circulation sanguine, et dont le rôle est de traiter nutriments et toxiques (polluants, alcool…), est un organe extrêmement résilient. Il est même capable de régénérer des parties qui lui ont été enlevées afin de pouvoir continuer à fonctionner ! Conséquence : la maladie du foie gras reste souvent sans symptômes, la majorité des porteurs ne s’en rendent jamais compte.
Le problème, c’est que dans 2 % des cas, elle mène à de graves complications comme la cirrhose, avec le risque de développer un, poursuit le spécialiste. La maladie est même en train de détrôner l’alcool comme première cause de cirrhose… Or, lorsque ce stade est atteint, il est souvent trop tard : , pointe Jérôme Boursier, hépatologue au CHU d’Angers. Diagnostiquer, parmi les très nombreux porteurs de foie gras, la frange susceptible de développer des complications est donc devenu un enjeu sanitaire majeur. Et un véritable défi : , résume l’expert.