Dans l’Occident chrétien, le récit biblique constitue la matrice des généalogies, avec l’idée que tous les hommes descendent d’Adam et Ève. »
Entretien avec Valérie Pietri
Cahiers de Science & Vie: Vos recherches ont d’abord porté sur la noblesse de l’Ancien Régime. Comment vous ont-elles emmenée vers la généalogie ?
Valérie Pietri: Quand on étudie des groupes sociaux sur un temps long, il nous faut toujours reconstituer leurs généalogies. Dans mon travail de thèse, j’ai commencé par chercher à identifier les familles de la noblesse au tournant du XVIIe siècle. J’ai très vite constaté que c’était compliqué. Je me suis en effet appuyée sur des généalogies écrites à l’époque par les intéressés, par des érudits, mais aussi sur des dictionnaires généalogiques qui se sont particulièrement développés à cette époque. Or ces différentes sources d’information ne concordaient pas toujours entre elles. Et j’ai finalement fait le lien entre la construction de ces généalogies et la question de l’identité nobiliaire.
CSV : À quand remontent les débuts de la généa-logie ? S’inscrit-elle dans la continuité des grands mythes d’origine?
Nous nous sommes posé. Et il est impossible d’y répondre simplement. Disons qu’il existe une grande diversité de mythes fondateurs, et qu’ils n’ont pas tous une teneur généalogique. Dans les mythes romains, par exemple, on trouve plutôt des héros fondateurs de cités – bien que la question de la généalogie soit extrêmement présente à l’Antiquité dans les sociétés romaines, où les Patriciens tirent leurs privilèges et leur pouvoir de leur naissance. Mais dans l’Occident chrétien, le récit biblique constitue la matrice des généalogies émergeant au Moyen Âge, avec l’idée que tous les hommes descendent d’Adam et Ève.