Ni opéra ni oratorio, la Rappresentatione di Anima e di Corpo met en scène quatorze figures allégoriques. Ce divertissement moralisateur – le premier à être intégralement chanté – fut conçu pour les prélats et l’aristocratie romaine réunis dans l’église Santa Maria della Valicella pour les festivités de l’année sainte 1600. Il ne comprend guère de péripétie mais introduit ballets et machines spectaculaires.
Si la partition a été plutôt bien servie par le disque (la gravure de René Jacobs pour HM éclipsant en 2014 ses rivales), on ne disposait, en vidéo, que d’un concert filmé (avec Gasdia et Zanassi, sous la direction de Lorenzo Tozzi, Trinidad Entertainment). La production acclamée en 2021 au Theater an der Wien vient donc combler un manque.
La mise en scène de Robert Carsen, avec son décor dépouillé (une double-porte centrale sur une scène nue) et ses costumes contemporains, renouvelle la spiritualité de l’œuvre par un jeu de symboles transparents. Le choeurprincipal, métaphore d’une humanité chamarrée, diversement confrontée à d’identiques vicissitudes (le temps, le bien, le mal). Chaque existence est un voyage (prologue) qui invite à des rencontres, dont le caractère (bénéfique ou néfaste) est souligné par le jeu subtil des lumières (superbes) et des habits (du rouge démoniaque au blanc paradisiaque, en passant par le bleu Denim).