Nous allons au concert le soir, écoutons le soir, dansons le soir. Comme le lys, l’oreille se dresse après le jour. Jean-Jacques Rousseau confirme dans son Dictionnaire : « Le silence de la nuit, qui bannit toute distraction, fait mieux valoir la musique et la rend plus délicieuse. »
Encore le siècle des Lumières n’accorde-t-il à la nuit qu’un pouvoir fugace. Le suivant la tiendra pour l’essence même de notre discipline. « La musique, art de la nuit et de la pénombre », écrit Nietzsche dans Aurore. Seul art, en tout cas, dont on ne perde rien les yeux fermés. Refuge de l’angoisse et médecine contre l’angoisse, il cherche l’obscurité qu’il redoute. La part romantique de la musique romantique est nocturne. Tous les mouvements lents de toutes les sonates, tous les quatuors et toutes les symphonies ne font-ils pas la nuit entre deux jours ?
Champ trop vaste pour nos trois pages. Essayons d’y mettre un peu d’ordre. Tenonsnous aux thèmes et aux formes.
Parmi les formes écartons d’abord le , dont nous avons parlé ailleurs (), et le , genre à soi seul comme la berceuse, et sur lequel nous reviendrons. Remettons aussi à plus tard les digressions métaphoriques – sans horaire ; où Falla, sonate à peine déguisée ; politiques de Xenakis, synonyme d’oppression…