L’année 1945 est une année charnière dans l’histoire des opérations amphibies. Elle marque d’une part l’apogée de la maîtrise par lesAlliés – lesAméricains en particulier – des grands assauts amphibies impliquant simultanément plusieurs divisions, voire corps d’armées. Le degré de préparation, la complexité et la puissance des moyens engagés dans les derniers débarquements menés dans le Pacifique garantissent quasiment la réussite: en dépit des pertes lourdes que peuvent infliger les défenses côtières, il n’est plus question d’échec. Pourtant, la fin de la guerre ferme également cette ère faste. L’origine de cet apparent paradoxe ne se trouve en fait ni en mer, ni à terre, mais dans les airs.
Une ombrelle antiaérienne perméable
Qu’il s’agisse de la Normandie, des Mariannes, des Philippines ou des assauts sur Iwo Jima et Okinawa, les grandes concentrations de navires et de troupes sur un espace réduit devant et sur les plages constituent autant de cibles aisées à identifier, et terriblement vulnérables. Les difficiles combats pour Okinawa (mars-juillet 1945) l’ont bien montré: la flotte américaine, coincée à proximité de l’île pour appuyer la lente et douloureuse progression des forces terrestres, subit sous les coups des kamikaze ses pires pertes depuis Guadalcanal.
Encore les Américains disposent-ils à Okinawa d’une supériorité totale, en nombre et en qualité. Nombre d’aviateurs japonais des « unités d’attaque spéciale » n’ont en effet que quelques dizaines d’heures de vol à peine et pilotent de vieux appareils à bout de souffle. Ils sont de plus désavantagés par le long parcours qui sépare leurs bases d’Okinawa, facilitant détection et destruction précoces. Néanmoins, les taux de pertes très lourds subis lors les derniers assauts de