SANS NOURRITURE en quantité suffisante, il n’y a que le chaos. Le président russe Vladimir Poutine le sait mieux que quiconque, et il en a fait une arme. Avec l’invasion de l’Ukraine, il a délibérément perturbé l’approvisionnement en blé et a déclenché une crise alimentaire mondiale. L’Ukraine est le sixième exportateur de blé de la planète, ce qui signifie que le marché est aujourd’hui amputé d’environ 20 millions de tonnes de céréales. La production mondiale de blé étant d’environ 850 millions de tonnes, cela ne provoquera pas une famine généralisée, mais c’est suffisant pour faire bondir le prix du blé de plus de 60 % pour la seule année 2022. Aux États-Unis, où l’Américain moyen consacre moins de 10 % de ses revenus à l’alimentation, cette hausse sera à peine perceptible. Mais pour les habitants des pays en développement, dont beaucoup y consacrent 40 % ou plus de leurs revenus, cela pourrait faire la différence entre manger et avoir faim.
La population mondiale devrait passer de 7,9 milliards d’habitants aujourd’hui à près de 10 milliards d’ici à la fin du siècle. Pour répondre à la demande, la production agricole mondiale devra augmenter de plus de 50 %.
Cette crise est toutefois “artificielle”, en ce sens qu’elle n’est pas due à une pénurie réelle. Poutine n’est pas le seul à profiter de cette situation. Les négociants en matières premières, les revendeurs et les fabricants d’engrais s’enrichissent tandis que les politiciens proto-fascistes sont heureux d’ériger la situation en preuve de l’échec de la démocratie.
Derrière tout ceci se profile une autre crise, bien plus inquiétante. Car la façon dont nous cultivons et distribuons la nourriture est profondément détraquée. Plus de 40 % de la nourriture cultivée en Amérique est gaspillée.
