“JE NE SUIS PAS LE GOUROU DE QUI QUE CE SOIT. Nous ne dirigeons aucune secte”, déclarait David Bowie en mai 1973, alors qu’il était perdu au coeur d’une ziggymania démesurée qui menaçait sérieusement son équilibre psychique. Dépassé par les événements, Ziggy-Bowie ne s’imaginait évidemment pas en guide d’une phalange dont les “Spiders from Mars” auraient constitué les premiers disciples zélateurs. Quoi qu’il en soit, cinquante ans après la sortie de l’album, des défis maquillage “à la Ziggy” sont organisés sur le réseau social TikTok et les touristes se prennent toujours en photo devant le 21 Heddon Street, où a été conçue la célèbre pochette. Incontestablement, The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars et son imagerie représentent un repère artistique majeur et persistant dans l’histoire de la pop-culture. Grâce à Ziggy, l’ange blond a également accédé à la reconnaissance générale après avoir passé l’essentiel des années 1960 à chercher sa personnalité, sa voix et, surtout, la gloire.
Au début des années 1970, l’artiste n’est en effet qu’un chanteur folk psychédélique de plus, un qui ne parvient pas à réitérer le succès du single “Space Oddity”, lequel culmina lors d’un en novembre 1969 à la cinquième place des charts UK. Si près du but, le jeune loup n’entend pas en rester là, lui qui a emménagé en octobre 1969 avec sa future-ex Angela Barnett à Haddon Hall, une maison victorienne qui fait autant office de laboratoire expérimental que de lupanar prisé du tout Londres arty. Un détail immobilier qui n’en est pas un. Dans cette demeure de briques rouges, Bowie écrira et répétera l’essentiel des albums et rencontrera le guitariste Mick Ronson et, inspiré par Alice Cooper, sera photographié se souvenait David Bowie) le chanteur en a tiré deux enseignements qui s’avéreront déterminants pour la suite des opérations: tout d’abord, il peut se féliciter de tenir enfin un vrai groupe dédié avec lequel il pourra progresser, ce qui n’est pas rien pour cet artiste brinquebalé dans différentes formations éphémères depuis plusieurs années: Mick Ronson (guitare), Mick Woodmansey (batterie) et Trevor Bolder (basse) en remplacement de Tony Visconti (à qui on a volé ses vêtements “civils” dans la loge de la Roundhouse et qui fut obligé de rentrer chez lui déguisé en Hyperman!) l’accompagneront ainsi jusqu’en 1973. Ensuite, le peu de confiance en lui-même et l’angoisse permanente de l’opinion du public à son propos s’accommodent fort bien du travestissement, aussi provocateur et ridicule soit-il. Ne pourrait-il pas créer un personnage de toutes pièces, un double fictif qui incarnerait ses compositions? Un peu comme le Major Tom de “Space Oddity”, condamné à errer pour l’éternité dans l’espace, et qui avait durablement marqué les esprits. L’idée fera petit à petit son chemin et, après deux semaines de répétitions, se concrétisera dans la foulée de l’enregistrement de dans les studios londoniens Trident, à partir du 8 novembre 1971.