La Revue du Vin de France

Saint-Émilion, une mutation en trois classements

C’est un village, dans toute sa diversité d’intérêts, qui concourt au classement

C’est après avoir gravi les 118 marches de la Tour du Roy que l’on peut admirer la plus belle vue sur le village de Saint-Émilion. Si la terrasse de ce donjon massif sert aujourd’hui à la Jurade à proclamer le jugement du vin nouveau en juin et le ban des vendanges en septembre, c’est surtout d’ici que le regard du visiteur peut embrasser à 360 degrés le paysage sublime de la cité lumineuse, ses vignobles, ses chais et ses châteaux, ses reliefs aussi, la plaine sableuse et les grands terroirs du plateau calcaire. Ce donjon, comme une vigie, offre une vue imprenable sur ce qui fait le sel d’un village viticole où l’on vit, où l’on boit, où l’on se querelle, où l’on se regarde en chien de faïence parfois depuis des décennies, où l’on s’aime et l’on aime se détester. Saint-Émilion ressemble à une fresque balzacienne où chaque nouvelle édition du classement écrit un nouveau chapitre.

Mais les intérêts divergent plus qu’on ne pourrait le penser. Entre les ambitieux, les familles installées depuis des siècles, les nouveaux venus, ceux qui veulent aller plus vite que tout le monde à coups de millions et de chais refaits à neuf, ceux qui veulent rester dans l’ombre et les esprits chagrins, ce n’est pas tout à fait une armée mexicaine qui concourt au classement, mais un village gaulois, dans toute sa diversité d’intérêts. Et c’est peut-être là que réside le charme de Saint-Émilion, au-delà des scandales et du tempo chaotique des procès et des attaques. N’y voir que le scandale serait une erreur, et n’avoir qu’un regard béat sur la beauté lumineuse de ces châteaux confinerait à l’aveuglement.

FAIRE BOUGER LA HIÉRARCHIE

Il faut dire que depuis 2006, année du premier classement du millénaire, finalement annulé trois ans plus tard, le village n’a cessé de changer. , analyse Jean-Luc Thunevin, le propriétaire du château Valandraud, passé du statut de “vin de garage” à la fin des années 1980 à celui de Premier Grand cru classé B en 2012 (lire La RVF n° 656, décembre 2021/janvier 2022). Une réussite exceptionnelle qui salue trente ans d’entêtement et illustre la capacité de ce classement à

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