La voix de Tahrir
Un romancier ment-il mieux qu’un arracheur de dents? Cette question un peu potache, je m’étais promis de la poser à Alaa El-Aswany : le plus célèbre des écrivains égyptiens a longtemps exercé la profession de dentiste. Son cabinet était situé non loin de la place Tahrir, dans le quartier historique cairote de Garden City, peuplé d’arbres centenaires et de vieilles bâtisses superbes et délabrées. C’est là que je l’ai rencontré pour la première fois, en janvier 2012. Il m’avait reçu en blouse de praticien. Entre deux cigarettes, dans un français parfait, le colosse affable avait fait montre d’un optimisme sans relâche, se disant convaincu que la révolution, un an plus tôt, avait « brisé la barrière de la peur ».
Soudain, sa voix de stentor avait tonné : « On ne pourra plus reculer, le peuple ne sera plus soumis. » J’avais acquiescé timidement et j’étais reparti, penaud, sans avoir
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