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Jean-Marie Messier, le retour du paria

Jean-Marie Messier aurait pu être un personnage de roman américain. Le fruit de l’imagination d’un Tom Wolfe dans une autre version du Bûcher des vanités. L’ascension sur le toit du monde, la chute vertigineuse et la lente reconstruction. Sauf que Messier n’est pas un personnage de fiction. Dans la vraie vie, on l’avait un peu perdu de vue au fil du temps. Le grand public qui s’esclaffait devant sa marionnette des Guignols, il y a vingt ans, l’avait même rangé dans l’album photo des gloires du passé, celles qui faisaient rêver la planète au tournant des années 2000. Dans la vraie vie, Messier n’a jamais vraiment disparu. Le patron star s’est simplement métamorphosé, troquant son costume à paillettes pour le complet discret du banquier d’affaires. Un costume qu’il n’aurait peut-être jamais dû ôter.

En réalité, cela fait bientôt deux décennies qu’il nage en sous-marin dans le ma - rigot du capitalisme français. Mais cette année a, pour lui, un goût particulier. Elle signe son grand retour, ou plutôt elle referme une parenthèse. L’homme a été au coeur d’une des plus grosses opérations de fusion de la décennie. De la bataille la plus violente depuis des lustres entre deux rivaux français: l’affaire Suez-Veolia. Avec sa casquette de banquier et de conseiller du PDG de Veolia, Antoine Frérot, c’est lui qui a mitonné l’attaque éclair contre Suez au coeur de l’été dernier. Une jolie pirouette de l’histoire. Au début des années 2000, il coulait presque le groupe Vivendi, héritier de la Compagnie générale des eaux, sous ses délires égotiques et une montagne de dette. Aujourd’hui, il contribue à la naissance d’un géant mondial de l’eau et des déchets. Alors que la victoire de Veolia sur le petit Suez est totale, Jean-Marie Messier est content. Content de lui, content de la vie.

Jusqu’au bout, nous avons cru qu’il allait une nouvelle fois annuler le rendezvous qu’il nous avait lui-même fixé. Il est coutumier du fait. « Une erreur d’agenda », s’excuse une première fois son assistante. « Un lumbago le cloue au lit », justifie-t-elle ensuite. La troisième fois sera la bonne. Nous voici donc dans les locaux de sa banque d’affaires, non loin des Champs-Elysées, à Paris. Même rondeur, quelques taches de son en plus sur le visage. Affable, ouvert, jouant à fond la fausse modestie, n’égratignant volontairement personne, même ceux qui l’ont poignardé vingt ans auparavant. « Il y a une chose dans laquelle je ne me reconnais pas, c’est la notion de revanche. » Nous ne le croyons pas une seconde. Dans le bureau où il nous reçoit, la gueule ensanglantée et tuméfiée de Robert De Niro sur l’affiche de  s’étale sur un mur. Dans un autre coin de la pièce, c’est celle du tandem Paul, en français. Ultime provocation ou manifestation d’un inconscient soigneusement corseté? « Ce n’est pas moi qui ai fait la décoration! Si c’était à refaire, je choisirais plutôt de Roberto Benigni », nous lance-t-il avant de détailler avec moult détails les start-up qu’il accompagne dans son nouveau job de .

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