Vanity Fair France

Le mauvais coin

En ce début d’année 2021, plus rien ne semble effrayer Serge Klarsfeld. Il a tout vu, tout vécu. Caché dans un placard à double fond, il a entendu son père se faire arrêter par la Gestapo en 1943. Il s’est battu durant des décennies pour traduire en justice Klaus Barbie et d’autres criminels nazis. Il a même échappé à une tentative d’assassinat commise par le réseau néonazi Odessa en 1979. Un demi-siècle de lutte pour la mémoire de la Shoah, des distinctions en pagaille, des films sur sa vie, mais aussi des expositions, des livres, des bandes dessinées... Alors à 85 ans, il a bien mérité un peu de tranquillité. Ce matin-là, son téléphone sonne. Un homme se présente, voix admirative : il se fait appeler « Axel » ; ils se sont déjà rencontrés, ou plutôt croisés, dans un restaurant de la porte de Saint-Cloud. Non, il ne voit pas. Pour l’aider, l’inconnu évoque les caniches de Klarsfeld. « Ah, j’en ai perdu un la semaine dernière, souffle le vieil homme. Vous appelez à quel sujet ? » Axel déroule : des objets nazis sont vendus aux enchères dans l’impunité la plus totale, des croix gammées, des uniformes de la Wehrmacht... Il faut agir vite, frapper fort, mettre un terme à ce scandale. Klarsfeld avait vaguement entendu parler de ce type de ventes, mais n’en connaissait pas l’ampleur. Il l’assure de son soutien et raccroche. Quelques jours plus tard, Axel rappelle. Une fois, deux fois, trois fois. « Allô, M Klarsfeld ? J’ai encore trouvé des mecs ! » Les semaines passent et les coups de fil se multiplient. « Maître, jure Axel, je vais foutre un merdier comme t’imagines même pas ! » Une dépêche AFP tombe, reprise par des dizaines de médias : le vieux « chasseur de nazis » travaillerait avec un lanceur d’alerte dénommé « Axel ». Adieu la tranquillité. De nouveau, il faut répondre aux journalistes, condamner et condamner sans relâche. «

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