Ruth, la glaneuse de Dieu
Par Vincent Bouton
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À propos de ce livre électronique
Á PROPOS DE L'AUTEUR
Médecin, ancien interne des hôpitaux privés de Paris, otorhinolaryngologiste, Vincent Bouton est aussi licencié canonique de théologie de l’ICP – thèse sur l’évangile attribué à Jean. Il est l’auteur de plusieurs romans à l’instar de "Nicodème – Le disciple mystérieux", "La statue à sa fenêtre", "Deux heures avec ma mère". Il a également commis plusieurs Essais et Nouvelless et de nombreux recueils de poésie comme" Nos limites sont de cendre", qui reçut en 2008 le Prix Troubadour.
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Avis sur Ruth, la glaneuse de Dieu
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Aperçu du livre
Ruth, la glaneuse de Dieu - Vincent Bouton
Chapitre 1
Il y eut une fois, au temps des Juges, une famine dans le pays.¹
C’était à Éphrata, faubourg de Bethléem, dans le jardin d’Elimelek². Un jardin planté d’orangers. Des orangers sans oranges. L’argile des murs de pisé des maisons du pays de Juda se fendait. Le fond des rus se fendait. Les bêtes mourraient sur place. Les tiges de blé noir et d’orge mourraient sur place. Elimelek regarda vers le couchant rougeoyant. Il resserra le nœud de la ceinture de son hagor, Du fond de sa gorge sèche monta un chant au dieu d’Abraham : « Pitié Seigneur, je dépéris, guéris-moi ; préserve-nous du malheur ; sur les chemins de la vie, sois ma lumière, Seigneur ! » L’homme, brun de peau, brun d’yeux et brun de poil, secoua ses sandales poussiéreuses, jeta son simlah de lin par-dessus son épaule et fit demi-tour.
Certains demi-tours en disent long. Ils disent un renoncement, un abandon. Un abandon de l’avenir. Une fin des luttes. Une fin des espoirs. Une acceptation de la fatalité, voire une soumission, une régression. La nature impose sa loi à l’homme qui s’y soumet, s’inventant une culture depuis les lois de cette nature. Faisant du soleil, de la lune ou des eaux des dieux. S’inventant même une religion car l’espérance est une maladie de l’homme. Une maladie qui ne tue pas mais fait vivre. Il y a là tant de beauté. Quelle œuvre que l’humain !
Ce qui avait fait la richesse d’Elimelek, il y a encore peu de temps, était réduit à cette poussière. À rien. Le ciel du soir n’annonçait justement rien de bon pour demain. C’est comme si le soleil ne se couchait jamais ici. Les Égyptiens, eux, avaient les eaux permanentes du Nil, c’est du moins ce que racontaient les anciens qui l’avaient entendu de leurs pères. Et ces eaux baignaient les cultures, abreuvaient hommes et bêtes. Mais en pays de Juda, il n’existait d’eau que des pluies. Et les pluies sont don de Dieu qui rétribue ainsi la fidélité du peuple à son Nom, béni soit-il. Mais le peuple ne se préoccupait que de ses propres affaires, de ses intérêts, oubliant les prières au profit des comptes, les louanges au profit des pesées et les actions de grâce au profit des richesses matérielles. Elimelek (Mon Dieu est Roi) serra les poings : il fallait partir. La famine s’étendait des bêtes aux hommes. Sa propre famille était menacée, sa femme Noémi (Ma Gracieuse) et ses deux fils. Et cette poussière, partout, poussière que l’Éternel avait promise à l’engeance humaine. « Tu es poussière et tu retourneras à la poussière… »³ Deux grosses larmes coulèrent sur ses joues tandis que le psaume s’étranglait dans sa gorge : « Qu’ai-je fait, ou que n’ai-je pas fait, Seigneur ? Que ton nom soit loué ! » Elimelek était un homme droit, respectueux de la loi et de ses devoirs. Il était juste que la vie l’en rétribue, pensait-il. Pour cela, pas besoin de prier Dieu dans son for intérieur. Dieu est dans la loi. Il est La Loi. La loi transmise par Dieu à Moïse, puis transmise depuis Moïse d’âge en âge jusqu’aux Juges qui gouvernent aujourd’hui le peuple hébreu⁴. Obéir à cette loi devait suffire à contenter Dieu. Mais ce n’était visiblement pas le cas puisque la sécheresse et son avatar, la famine, étaient bien là, signifiant un autre désir de l’Éternel, une autre attente, une autre volonté. Les rides du visage d’Elimelek semblèrent se creuser plus profondément sous le sel des larmes qui s’y étaient frayé un chemin jusqu’à la naissance de sa barbe. Son chien noir marchait à ses côtés, sans gambader, son poil désespérément touché par la sécheresse, lui aussi. Comment annoncer ce départ ? Comment dire à Noémi et à ses fils de faire leurs bagages ? Peut-être en parlaient-ils entre eux, en son absence ? Qui serait en effet assez aveugle pour ne point voir le péril qui menaçait ? Qui peut comprendre dans le silence de l’autre ce que l’autre a compris ? Qui n’est déjà prêt, averti par ce silence des autres, à saisir que, pour Dieu, le temps de prévenir est passé ?
Mais pourquoi, Elimelek, te tiens-tu la poitrine en marchant ?
La Bible est une bibliothèque d’une centaine de livres qui parlent du silence. Du silence de Dieu qui n’est pas très bavard. Laconique, tout au plus. Ils parlent aussi de l’eau. De l’eau-déluge, de l’eau-sécheresse, de l’eau-en-vin. Tout un programme ! La Bible parle de puits, ce qui est une façon détournée de parler encore de l’eau. Et voici que le puits de Elimelek est à sec. Un mouton mort est là, à quelques mètres du puits, surveillé de loin par des bêtes sauvages affamées qui font gronder le chien noir de l’homme de Juda. Ce puits est en partage avec Booz son cousin et voisin à qui Elimelek va vendre ses biens ou ce qu’il en reste, avant de partir en pays de Moab. La Bible parle aussi et beaucoup des hommes. Des hommes et des femmes. Elle s’amuse à leur donner des noms, de drôles de noms. Adam, le premier d’entre les hommes signifie « Celui qui vient d’adama, la terre ; le terreux », puisque l’auteur biblique fait naître la vie humaine de cette terre⁵. Moïse, quant à lui, vient du verbe masha qui signifie « faire sortir ». Pour celui qui a mené le peuple hébreu hors d’Égypte c’est plutôt bien trouvé. La Bible est pleine de ces pépites intelligentes qui font que Booz (En lui, la force) se trouve sur le chemin d’Elimelek, juste à quelques pas du puits. Tous deux, en famille, ont conclu un marché. Booz rachète les terres et les biens d’Elimelek. Si celui-ci ou un membre de sa maisonnée est de retour en pays de Juda, un jour ou l’autre, Booz lui réserve la reprise de ces terres et de ces biens. Booz est un racheteur c’est-à-dire le proche parent d’un migrant ou d’un défunt qui a une priorité pour racheter la terre de celui-ci et la conserver dans la famille ou la lui rendre. Le racheteur a aussi des obligations sur les parents dont il a repris les terres, obligations de protection si ceux-ci reviennent au pays. Booz et Elimelek bavardent sur le chemin, le chien noir sur leurs talons. Il est bien sûr question de Noémi et de ses deux fils dont les noms, évidemment, nous signifient à l’avance, ce qui va leur arriver. Malhôn et Kilyôn. Maladie et Fragilité. Le lecteur juif du texte biblique sait déjà, au simple énoncé de ces deux prénoms, que les deux fils d’Elimelek et Noémi ne feront pas de vieux os. Parmi les pépites intelligentes de la Bible, il y a les noms et aussi les non-dits. À foison. Et ces non-dits sont comme les points de suspension dans une phrase : le lecteur y met ce qu’il veut. Il y met ce qu’il pense. Ce qu’il est. La Bible devient alors le livre de tous et de chacun. Un de mes amis s’était « mis » dans l’évangile de Jean ; il avait pris la place d’un disciple innominé que l’on trouve dès le verset 35 du premier chapitre dans lequel Jean nous parle de deux disciples du Baptiste, André étant l’un des deux : « André, le frère de Simon-Pierre, était l’un de ces deux qui avaient écouté Jean-Baptiste et suivi Jésus. » Mais l’autre ? Ce deuxième ? Comment s’appelle-t-il ? Qui est-il ? Ce témoin crucial ? Ce non-dit pépite ? Cette place vide laissée au lecteur afin qu’il puisse s’y glisser et faire partie de l’histoire ? Faire partie des témoins directs. Certains y ont vu Jean, l’évangéliste, lui-même, sans aucune preuve scripturaire. Que nenni ! Car le christianisme n’est pas une affaire de preuves mais de témoins, le plus souvent anonymes ou innominés. Des témoins-pépites. C’est une des innombrables intelligences de ce texte si différent des autres : cette histoire universelle est aussi une histoire personnelle. Cet étrange témoin sans nom est encore présent à un autre moment crucial de l’évangile de Jean : celui de l’arrestation de Jésus. L’évangéliste nous raconte : « Simon-Pierre et un autre disciple avaient suivi Jésus. Comme ce disciple était connu du grand prêtre, il entra avec Jésus dans le palais du grand prêtre ». Autrement dit : un témoin clé du procès du Christ est mis en scène par l’évangéliste sans nous dire son nom ! Encore Jean lui-même ? Encore que nenni ! C’est un procédé. Quel est ce procédé ? Une sorte d’élision du nom. Encore une de ces pépites de l’Écriture. Encore une place que le lecteur peut venir occuper, et quelle place : celle de témoin du procès ! Bien des lecteurs ou auditeurs se sont mis dans les larmes d’Elimelek, ont chaussé ses sandales poussiéreuses, ont caressé le chien noir et salué Booz sur le chemin près de puits, ont parlé avec lui du prochain départ vers le pays voisin de Moab que les pluies ont protégé de la famine. La Bible nous fait place. Elle nous laisse nous insérer dans l’histoire. Ici, entre les deux Judéens. Booz n’en est pas à tenter de retenir Elimelek. Il sait l’importance du rôle de chef de famille et la fièvre que procure sa responsabilité. Cette fièvre qui blanchit les nuits,
