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Imparfaite
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Livre électronique296 pages3 heures

Imparfaite

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À propos de ce livre électronique

À 37 ans, Pia vit à Montmartre avec son mari et ses deux jeunes enfants. Elle aime sa vie réglée, et passer des soirées à refaire le monde avec ses amies d'enfance aux personnalités opposées, Camille et Églantine. Un jour, elle fait une rencontre au bureau qui va réveiller en elle un profond désir de séduction. Mais l'ambiance feutrée des open space recèle également des dangers insoupçonnés...
LangueFrançais
ÉditeurBooks on Demand
Date de sortie25 juin 2023
ISBN9782322508877
Imparfaite
Auteur

Aurélia Le Bréhat

Née en 1981, Aurélia Le Bréhat a grandi dans un petit village de Seine-et-Marne au sein d'une famille catholique. Elle a fait des études de finance et travaille aujourd'hui en ressources humaines. Elle a vécu à Amsterdam et Sydney avant de s'installer à Paris, où elle est mère de trois filles. Imparfaite est son premier roman.

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    Aperçu du livre

    Imparfaite - Aurélia Le Bréhat

    CHAPITRE 1

    PIA

    Devant son miroir, Pia sort son rouge à lèvres. Non, du rouge est trop voyant pour un premier jour de travail. Elle opte pour un beige foncé. Plus discret. Un premier passage, puis un second. Son maquillage est terminé, elle coiffe ses cheveux une dernière fois et enfile une paire d’escarpins noirs, pas trop hauts. Ils iront bien avec sa robe noire et sa veste en pied-de-poule. Pia part prendre le métro pour aller à son bureau. Après plusieurs années à un poste de développement marketing sur un projet, elle démarre aujourd’hui un nouveau travail au siège de la même entreprise. Un poste d’analyste rattaché au directeur marketing du groupe. Une création de poste. Nous sommes le lundi 2 octobre.

    Dans le métro, Pia regarde un sans-abri en se demandant comment il en est arrivé là. Quelle est son histoire ? Qu’a-t-il vécu pour dormir aujourd’hui dans la rue et être obligé de mendier dans la plus grande indifférence ? Chacun part travailler, a ses soucis et voit des mendiants tous les jours. Une banalité de la misère à laquelle nous nous sommes habitués. Pia se réjouit d’avoir un travail, un mari aimant et deux enfants. Elle cesse de rêver lorsqu’elle arrive à la station de La Défense pour aller rejoindre son bureau. À peine arrivée au 6e étage, elle va rejoindre son nouveau boss.

    — Ah bonjour Pia ! Comment vas-tu ? demande Thierry d’un ton enjoué.

    — Très bien, merci, et toi ?

    — Bien, merci. On va prendre un café ?

    — Oui, avec plaisir.

    — Tu peux poser tes affaires dans mon bureau.

    Thierry, son boss, prend un café long sans sucre. Pia reste quelques secondes devant la machine à hésiter. Un long ? Va-t-elle le finir ? Un court ? Va-t-il être trop fort ? Ou pourquoi pas un thé ? Face au regard de Thierry, elle prend la même chose que lui. Elle ajoute un sachet de sucre dans son gobelet pour adoucir la boisson. Pia a toujours détesté le goût du café pur mais socialement, en entreprise, ce n’est pas possible de le dire. En revanche, elle adore l’arôme. Cela lui rappelle l’odeur de chez ses grands-parents qui l’ont élevée pendant plusieurs années. Cela lui rappelle aussi les cafés parisiens où elle aime s’installer en terrasse pour lire ou retrouver ses amies. Pia sourit à Thierry qui entame la conversation :

    — Donc aujourd’hui, nous avons une réunion à 10 heures avec toute l’équipe marketing. Ce sera l’occasion de te présenter et de fixer les objectifs de la semaine.

    — OK, super !

    — Et ensuite, je te laisse prendre tes marques. Je te propose que l’on fasse un point ensemble à 14 heures. Ça te va ?

    — Oui, parfait.

    — Ça va, tu ne mets pas trop longtemps pour venir le matin ?

    — Non, ça va. Je descends à pied de Montmartre jusqu’à Pigalle, puis je prends la ligne 2 et le RER A. J’en ai pour quarante-cinq minutes porte-à-porte. Et toi, comment viens-tu ?

    — Moi, je vais à pied jusqu’à la gare de Sceaux, je prends le RER B jusqu’à Châtelet puis le RER A. Je mets environ une heure. Parfois, ma femme me dépose en voiture à Châtelet. Et il m’arrive de faire le trajet à vélo ! Alors, là, je mets une heure et quart.

    C’est marrant cette question du trajet pour venir travailler. Les gens s’attendent toujours à ce que l’on détaille son trajet du matin. Cela fait partie des règles de bonne conduite en entreprise. Une règle tacite, comme il en existe beaucoup.

    Lors de la réunion de 10 heures, Pia découvre ses nouveaux collègues : le fayot, le rebelle et la bonne élève. L’équipe rejoint ensuite une petite pièce où se trouvent leurs bureaux respectifs. Ils vont vivre à quatre dans cette pièce vitrée, partager une armoire commune et un porte-manteau où chacun accrochera sa veste, toujours à la même place. Une vie bien ordonnée. Pia s’installe à son bureau. Elle accroche ses cheveux en chignon avec un crayon. Elle range dans le tiroir du bas son sac à main quand un collègue entre pour se présenter : David. À la fin de la conversation, leurs regards se croisent, leurs yeux s’accrochent. Un peu trop longtemps. Lorsqu’il sort, Pia le regarde de dos. Elle observe sa stature au travers de son costume. Et ses cheveux bruns bouclés.

    Premier midi à la cantine. Dans un self à la lumière trop blanche se succèdent des plats parfois originaux. Stand viande : entrecôte, bavette ou steak haché. Stand poisson : dos de cabillaud à la sauce hollandaise. Ou alors, le plat du jour : andouillette, purée. Pia fait attention à sa ligne : elle opte pour le poisson et un yaourt avant d’aller rejoindre ses collègues. À table, chacun se présente : avec ou sans enfants, lieu d’habitation, parcours professionnel… Le déjeuner se passe dans la bonne humeur. En sortant, Pia dépose son plateau dans le charriot, et heurte celui de Paul en se retournant. Elle manque de justesse de le faire tomber. Elle se confond en excuses, pestant intérieurement contre sa gaucherie. L’après-midi, lors de son point avec Thierry, elle trouve son nouveau directeur sympathique. Son CV est impressionnant, c’est sans doute le genre de boss auprès de qui elle va pouvoir apprendre beaucoup, et évoluer rapidement. Pia est heureuse de ce nouveau challenge professionnel. Elle se félicite intérieurement d’avoir choisi ce travail parmi les différents postes qui lui ont été proposés. Travaillant au siège de l’entreprise, elle pourra ainsi être en contact avec les « huiles » du groupe. Une bonne façon de s’exposer et d’évoluer.

    Depuis sa plus tendre enfance, Pia doit réussir : à l’école, où ses parents, tous les deux enseignants, lui ont appris que sans bonnes notes, on ne gagne pas d’argent plus tard. Et plus tard pour Pia, c’est maintenant. Donc, Pia doit gagner de l’argent pour continuer à être l’enfant qui rapportait de bonnes notes de l’école. L’enfant sans souci. Elle le sait, elle doit continuer dans la lancée de la lignée familiale qui prône la réussite sociale depuis plusieurs générations. Du côté de sa mère, ses arrière-grands-parents étaient agriculteurs, ses grands-parents ouvriers, sa mère enseignante et c’est sur sa génération que repose la tâche d’être cadre en entreprise. Du côté de son père, le schéma est quasiment identique. Et dans la famille de Pia, il y a une règle : on est risquophobe. On a donc une aversion très importante pour le risque. Il n’est pas envisageable d’être entrepreneur ou à son compte : trop risqué. Et cela pourrait remettre en question la lente progression de sa famille vers une vie meilleure. Quand Pia, enfant, rétorquait à son père que l’argent ne fait pas le bonheur, il lui répondait systématiquement : non, mais il y contribue. Pia a donc intégré les préceptes familiaux et elle est en quête d’une carrière aussi brillante que son diplôme et sa condition féminine lui permettront d’atteindre dans une grande entreprise. La réussite sociale. Sa quête du bonheur.

    CHAPITRE 2

    CAMILLE

    La cloche sonne. Il est 16 h 30. C’est la fin de son dernier cours de la journée. Camille demande à ses élèves de ranger leurs affaires et de quitter la classe. Elle leur rappelle qu’il y aura une interrogation de grammaire au prochain cours. Elle se rend en salle des professeurs pour préparer ses cours de la semaine suivante. Après une heure de travail, elle en a marre et quitte le collège. Arrivée dans sa voiture, elle s’accroche de longues boucles d’oreille en soutache et en perles puis téléphone à son petit-ami.

    — Allo ? Yann ?

    — Oui, comment ça va ? Ça s’est bien passé, ta journée ?

    — Oui, ça va. Les élèves étaient un peu énervés aujourd’hui. Ce sont les vacances de la Toussaint dans trois semaines, j’ai hâte.

    — Ah oui, ils ont chahuté ?

    — Oui, par moments ils n’écoutent rien. Dès que tu les laisses débattre sur un sujet, ça devient le chaos total ! Bon, je crois que les enfants ont besoin de se reposer, ça va leur faire du bien les vacances. Et toi, ta journée s’est bien passée ?

    — Oui, moi ça va. J’ai fait une plongée du côté de la lagune de Thau. J’ai vu des hippocampes, des seiches et des lièvres des mers. Une belle sortie. Allez, plus qu’un mois et j’aurai validé mon diplôme d’instructeur. Je pourrai enfin postuler partout dans le monde… Voir autre chose que le sud de la France !

    — Je suis sûre que tu vas facilement trouver du travail.

    — Aujourd’hui, j’ai repéré des offres en Thaïlande et en Nouvelle-Calédonie.

    — Ah ouais ? Ça serait super ! J’en ai trop marre d’être en région parisienne. J’ai accepté ce remplacement pour quatre mois et franchement, je trouve ça vraiment long…

    — Tu vois tes amies ce soir ?

    — Oui, je vois Pia et Églantine. On va du côté de Châtelet. Je vais me garer à la gare de Meudon, j’irai en RER. Je n’ai pas envie de me garer dans Paris. Et toi, qu’est-ce que tu vas faire ?

    — Je vais relire mon mémoire… Pas passionnant, mais je veux être bien prêt pour l’oral la semaine prochaine.

    — OK, et bien bonnes révisions alors ! Je t’embrasse. Tu me manques…

    — Moi aussi… On se rappelle demain soir ! Bonne soirée. Passe le bonjour à tes amies !

    CHAPITRE 3

    ÉGLANTINE

    Églantine est en train de manipuler les vertèbres cervicales de sa dernière patiente de la journée qui a mal à l’un des côtés de la tête et parfois à la mâchoire depuis six mois. Elle ne sait toujours pas pourquoi, après avoir réalisé une IRM du cerveau, une visite chez l’ORL et une autre chez le dentiste. Comme souvent, en dernier recours, le patient consulte un ostéopathe… on ne sait jamais. Alors qu’Églantine pense avoir cerné le problème de sa patiente, elle lui demande :

    — Pouvez-vous s’il vous plaît tourner la tête sur votre droite ?

    — Comme ça ? répond la jeune femme en s’exécutant.

    — Voilà, comme ça. Allez-y à fond. OK, maintenant, vous allez forcer pour maintenir votre tête à droite, OK ?

    — OK.

    — Vous poussez à fond à droite là ?

    — Oui, j’y suis.

    Et d’un coup sec, Églantine tourne avec force la tête de sa patiente vers la gauche. Crac ! Une vertèbre s’est remise en place.

    — Aïe ! lâche la patiente surprise par le mouvement et par le bruit.

    — Voilà, c’est bon. Vous aviez une vertèbre déplacée.

    — Ah oui, c’est fou, je me sens déjà mieux ! J’ai l’impression que ça tire moins sur le côté de ma tête.

    — C’est sans doute dû à l’accouchement. Vous avez eu une vertèbre déplacée et ensuite, les nerfs peuvent se coincer ou tirer. Ça devrait aller mieux. Ce qui serait bien, c’est que l’on se revoie d’ici une semaine.

    — Oui, très bien. Super ! Merci.

    Voilà, la journée est finie. Huit patients aujourd’hui, c’est une bonne journée. Églantine regarde son planning du lendemain et soupire en voyant qu’elle a une patiente acariâtre qui a insisté pour venir à 19 h 30. Elle se lave les mains et enfile son élégante bague avec une pierre de citrine, vestige de ses fiançailles qui auront été de courte durée. Elle a fait agrandir le bijou pour la porter à l’annulaire droit afin de ne pas laisser penser qu’elle est engagée. Elle détache ses longs cheveux de jais, puis appelle sa voisine pour s’assurer qu’elle a bien récupéré son fils à l’école. Tout est en ordre. Elle va pouvoir désormais se changer pour sortir voir ses amies. Elle pourrait rencontrer un bel inconnu ce soir. Par hasard. Elle tire les rideaux de son cabinet, enfile une robe à fleurs et se maquille avant de se diriger vers le métro.

    CHAPITRE 4

    CHÂTELET-LES-HALLES

    Camille est la première arrivée dans le restaurant italien choisi par Pia, à côté de l’Église Saint-Eustache. Elle est en avance et décide de s’installer à une table près de la devanture pour attendre ses amies. Elle a hâte de leur annoncer la nouvelle. Avec son sol en damier noir et blanc et son plafond en poutres, la salle ressemble à une véritable trattoria. Camille commande une bière et regarde les gens défiler dehors. Elle s’imagine déjà au bord de la mer avec Yann. Elle trouvera bien des cours de français à donner. Elle est impatiente de quitter le territoire. De découvrir de nouveaux horizons. De vivre une vie originale, loin de la routine en France. Le serveur arrive et lui sert sa bière. Elle déguste la mousse en premier, on dirait de l’embrun marin. Elle est là, dans un restaurant à Paris, à 9 000 kilomètres d’où elle a vécu dix ans… La Colombie lui manque. En revanche, son fiancé a été un sacré goujat, quand elle y repense. La quitter du jour au lendemain sans explications. Après tant d’années ensemble… Elle ne lui pardonnera jamais. Obligée de rentrer en France, sans travail, il y a un an… À 36 ans… Quelle horreur ! Heureusement, elle a trouvé rapidement un poste de professeur de français remplaçant à Montpellier. C’est là qu’elle a rencontré Yann après quelques mois sur place. Et Yann avait un rêve : devenir instructeur de plongée pour voyager au bout du monde. Découvrir les fonds marins. Il a donc mis de l’argent de côté pour payer sa formation, puis il a quitté son travail d’agent immobilier avant de rejoindre le centre de formation de Montpellier. Depuis leur rencontre il y a six mois, ils filent le parfait amour et Camille espère avoir trouvé en lui l’homme de sa vie. Car Camille est une idéaliste. Elle croit en l’amour romantique, l’amour pur et véritable. L’amour qui dure toute une vie.

    Camille est perdue dans ses pensées lorsque Pia arrive en la cherchant du regard. Les deux amies d’enfance se font la bise, elles sont heureuses de se retrouver. Elles s’installent à table et Pia commande un verre de vin blanc. Lorsque le serveur la sert, Pia hume l’odeur du vin avant de tremper ses lèvres. Elle décèle un léger bouquet de poire qui lui rappelle les pâtes de fruits de son enfance. Les deux amies discutent de banalités et Camille ne peut pas attendre l’arrivée d’Églantine pour se lancer, enjouée :

    — Yann aura fini son diplôme dans un mois. Ensuite, il veut chercher un travail à l’étranger. Et il veut que l’on parte ensemble !

    — Ah, oui ! C’est chouette ! se réjouit Pia pour son amie.

    — Oui, je suis contente. Au début, ce n’était pas très sérieux avec Yann, mais maintenant, on a des projets ensemble.

    — C’est une super nouvelle. Vous avez vraiment de la chance de partir bientôt au soleil ! Parce qu’ici, le climat ne fait pas rêver…

    Pia a envie de demander à Camille si elle compte bientôt essayer d’avoir un bébé. Elle se ravise. C’est toujours délicat de poser ce genre de question à une femme qui n’a pas d’enfant à 37 ans. Même quand il s’agit d’une amie d’enfance, avec qui on a partagé toutes les premières fois.

    Au moment où Camille et Pia finissent leur verre et s’apprêtent à en commander un autre, Églantine arrive en souriant. Elle a cette fâcheuse manie de toujours arriver en retard. Ensemble, les trois amies commandent à boire et des pizzas. Pia prend celle à la truffe, Camille opte pour une végétarienne et Églantine, la Parma. Elles se racontent leur vie et partagent quelques souvenirs d’une enfance qui leur semble dater d’hier. Camille annonce à Églantine son départ prochain à l’étranger, peut-être en Thaïlande ou en Nouvelle-Calédonie.

    — Et toi Pia, comment ça va ? demande Camille.

    — Ça va, je démarre un nouveau travail. J’espère que ce sera plus passionnant que le projet sur lequel j’ai bossé des années…

    — Et tu ne veux pas repartir à l’étranger ? sonde Camille.

    — Pour l’instant, ce n’est pas le bon moment avec mon nouveau job. On verra plus tard. Et je ne sais pas si ça se fera un jour. En attendant, on est heureux à Paris !

    — Enfin, tu n’as pas envie de vivre quelque chose d’un peu exceptionnel ? Au lieu de rester à Paris avec ton job barbant ?

    — Non. Franchement, pour l’instant, on court tous les jours entre Gustave qu’on dépose à la crèche, Inès à l’école, la nounou qui récupère les enfants le soir, le boulot… Et on aimerait bien trouver un appartement plus grand pour qu’Inès et Gustave aient chacun leur chambre.

    — Toi Pia, tu veux vraiment une vie bien rangée !

    — Ah, tu trouves que j’ai une vie bien rangée ?

    — Oui, clairement, répond Camille en hochant la tête.

    Pia tourne la bague de sa grand-mère autour de son doigt. Elle n’a pas envie d’entrer dans un débat sur sa vie conjugale ou de justifier ses choix de vie. Elle décide de changer de sujet :

    — En tout cas, c’est vraiment chouette si tu pars bientôt au soleil ! Ça sera l’occasion de changer d’air et de trouver un cadre de vie paradisiaque… Et toi, Églantine, as-tu trouvé un amoureux ? demande Pia avec un grand sourire.

    — Non, ce n’est pas simple de rencontrer des mecs bien.

    — Si, tu peux en rencontrer tous les jours au cabinet ! plaisante Pia.

    — Au cabinet, je vois surtout des femmes ! Les hommes vont voir mon associé qui est plus musclé pour les manipuler !

    — Ah mince, pas de chance.

    — Et ton associé ?

    — Il est marié avec deux enfants, et vraiment, ce n’est pas une bonne idée de mélanger travail et vie sentimentale.

    — Tu as raison.

    Pia savoure l’odeur si singulière des copeaux de truffe sur la mozzarella. Ses papilles voyagent en forêt où des notes d’humus et de musc se mélangent, dans une brume épaisse les matins d’automne, une odeur à la fois mystérieuse et si puissante. Ses papilles explosent en bouche sous un goût à la fois sucré et salé de noisettes et d’olives noires. Elle regarde la salle autour d’elle : les petites tables en bois sont remplies. Des couples, des amis, beaucoup de jeunes de moins de 30 ans. Des rires. Tout le monde semble passer une bonne soirée. Comme si le fait d’être au restaurant empêchait qu’un dîner soit un moment désagréable. C’est pour cela qu’elle n’a pas voulu s’opposer au jugement de son amie sur sa vie. Tout le monde est là pour se détendre, et non pas pour se braquer sur des réflexions sans importance. Le dîner se poursuit entre rires et confidences. Camille propose ensuite d’aller boire un verre dans un bar à côté : elle n’a jamais envie de rentrer chez elle, elle préfère toujours poursuivre la soirée le plus longtemps possible. Pia masque un bâillement, elle se sent fatiguée mais n’a pas envie de décevoir son amie, surtout qu’elles ne se voient pas très souvent. Les trois femmes vont donc prendre un dernier verre dans un bar de la rue de Montorgueil. Entre alcool et cigarettes, tout y passe. Les patientes d’Églantine. Les collègues de Pia. Les élèves de Camille. Les mecs d’Églantine. Leurs désirs. Leurs fantasmes. Leurs rêves. D’ici et d’ailleurs.

    En sortant du bar, Pia se sent guillerette. Elle regarde sa montre et réalise qu’il est minuit passé, elle prend un taxi. Camille et Églantine partent prendre le métro ensemble. Dans la voiture, Pia ouvre la fenêtre pour avoir un peu d’air. Les lumières défilent sous

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