Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

La vie au loin
La vie au loin
La vie au loin
Livre électronique43 pages36 minutes

La vie au loin

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

"La vie au loin" est un essai.
LangueFrançais
Date de sortie14 août 2013
ISBN9782312013015
La vie au loin

Lié à La vie au loin

Livres électroniques liés

Articles associés

Avis sur La vie au loin

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    La vie au loin - Léonard Desbois

    cover.jpg

    La vie au loin

    Léonard Desbois

    La vie au loin

    « Je suis une espèce en voie d’extinction »

    LES ÉDITIONS DU NET

    22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

    © Les Éditions du Net, 2013

    ISBN : 978-2-312-01301-5

    On s’attable à la terrasse d’un café du Xe arrondissement. Ségolène, me désignant d’un signe de tête : « Il vient de signer un CDI chez Machin ! » Tout le monde me félicite, je garde le silence. Une amie : « Eh bien, cache ta joie, hein ! » Moi : « Écoute, je suis joyeux à la mesure de ce que j’ai. C’est pas énorme non plus, hein. » Suit la litanie de la chance, de la capacité à « voir venir », à « faire des projets » et à « profiter ». Un CDI, en ces temps de précarité, c’est le sésame, et puis Machin, c’est vraiment une belle boîte. Ils essaient de convaincre dieu sait qui. Moi je dis que je voyais aussi bien venir avant de signer ce contrat. Se poser ? J’ai toujours été posé, je suis bien assis depuis ma naissance, ce n’est pas la question. Faire des projets ? Je ne sais pas vraiment de quoi on parle, et je n’ai envie de rien en particulier. Comme il est manifeste que je ne comprends rien, je recommence à siroter ma bière tranquillement, comme un éternel rabat-joie. À qui les autres ne reprochent pas de rabattre la sienne, de joie, mais plutôt la leur.

    Comme la discussion bat son plein, que l’on se raconte les soirées passées et les après-midi à venir, je me mets à penser à l’engagement, à ces enrôlements consentis, auxquels personne n’échappe, et qui tiennent le monde. Je me demande si je dois me marier, par exemple, et je pense : évidemment que le mariage est une arme de soumission des masses. Tout comme le contrat à durée indéterminée, que l’on signe au moment d’entrer dans une entreprise, en est une. Tout ce qui m’empêche de dire à n’importe quel moment du jour ou de la nuit : « Je pars » est un outil d’asservissement, un joug. L’objectif, que personne n’a formulé et que l’on ne peut imputer à l’imagination de personne en particulier, mais bien à l’imagination d’un système, est de détruire l’idée même de la possibilité de la rupture ; cette éventualité disparue, il ne reste qu’un certain nombre de choix à faire dans un cadre défini, qui correspond en fait à une existence amputée, que l’on peut représenter par une habitation dont on aurait muré la plupart des pièces. Je suis donc libre d’évoluer dans ce lieu partiel, où mon libre-arbitre s’exerce pleinement ; tout là-dedans doit me faire oublier que je ne suis pas libre d’aller prendre l’air à l’extérieur, si l’envie m’en prend. Il faut que je sois convaincu du danger, de l’impossibilité, ou, ce qui est plus pernicieux encore, de l’absence d’intérêt de mettre le pied dehors, c’est-à-dire en dehors de l’espace que l’on me propose. Face à cela, chacun doit réaliser un puissant effort de pensée pour garder

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1