L'ombre de la chimère: Un thriller palpitant
Par Benoit Herbet
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À propos de ce livre électronique
Nathalie est une jolie quadragénaire strasbourgeoise, qui vit une existence insouciante et futile. Surtout futile : ses amitiés sont immatures, sa profession, superficielle, et ses amours, pour le moins éphémères. Lorsque le destin dépose un cadavre sur sa route, Nathalie se persuade qu’il s’agit d’un assassinat et y voit l’occasion de donner un peu de piment à son existence. Elle se lance alors à la poursuite d’une chimère. Mais parfois, les chimères se cachent, tapies dans l’ombre, telles des mauvais rêves. Elles n’en demeurent pas moins bien réelles…
Découvrez le parcours de Nathalie, une jolie quadra à l'existent insouciante et futile, dont le destin va basculer lorsqu'elle croise la route d'un cadavre.
EXTRAIT
Elle rentra chez elle. Ferma. Et verrouilla la porte. Elle déchaussa ses escarpins, qu’elle jeta par terre. Elle se rendit compte à ce moment combien ses chevilles étaient douloureuses. Elle se rendit compte également qu’elle n’avait pas sommeil.
Elle fit chauffer de l’eau dans sa bouilloire. Elle avait envie d’une tisane. Dans son salon, elle alluma son ordinateur. Elle voulait lire ses mails.
Ses parents lui avaient écrit. Sa copine Sylvie également. Plus un dragueur insipide. Elle entendit l’eau siffler dans la bouilloire. Elle retourna à la cuisine.
Le choc sur sa tête fut brutal. Imprévisible. Elle tenta de résister, mais ses jambes vacillèrent et l’entrainèrent corps et âme dans leur chute.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Benoit Herbet est installé à Strasbourg depuis 1998. Il a deux passions : la littérature policière et le cinéma horrifique italien des années 70 : le giallo ! Avec ce premier roman, il a voulu rendre hommage au genre, et à ses principaux artisans : Mario Bava et Dario Argento.
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Avis sur L'ombre de la chimère
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Aperçu du livre
L'ombre de la chimère - Benoit Herbet
Table des matières
Résumé 3
Lmbre de la chimsère 4
I 7
II 9
III 9
IV 12
V 13
VI 16
VII 21
VIII 23
IX 24
X 26
XI 28
XII 31
XIII 33
XIV 36
XV 37
XVI 39
XVII 41
XVIII 43
XIX 46
XX 48
XXI 50
XXII 54
XXIII 56
XXIV 60
XXV 63
XXVI 68
XXVII 73
XXVIII 76
XXIX 78
XXX 78
XXXI 78
XXXII 78
XXXIII 78
XXXIV 78
XXXV 78
XXXVI 78
XXXVII 78
XXXVIII 78
XXXIX 78
XL 78
XLI 78
XLII 78
XLIII 78
XLIV 78
XLV 78
XLVI 78
XLVII 78
XLVIII 78
XLIX 78
L 78
LI 78
LII 78
LIII 78
LIV 78
LV 78
LVI 78
LVII 78
LVIII 78
LIX 78
LX 78
LXI 78
LXII 78
LXIII 78
LXIV 78
Épilogue 78
Résumé
Nathalie est une jolie quadragénaire strasbourgeoise, qui vit une existence insouciante et futile. Surtout futile : ses amitiés sont immatures, sa profession, superficielle, et ses amours, pour le moins éphémères.
Lorsque le destin dépose un cadavre sur sa route, Nathalie se persuade qu’il s’agit d’un assassinat et y voit l’occasion de donner un peu de piment à son existence. Elle se lance alors à la poursuite d’une chimère.
Mais parfois, les chimères se cachent, tapies dans l’ombre, telles des mauvais rêves. Elles n’en demeurent pas moins bien réelles…
Benoit Herbet est installé à Strasbourg depuis 1998. Il a deux passions : la littérature policière et le cinéma horrifique italien des années 70 : le giallo ! Avec ce premier roman, il a voulu rendre hommage au genre, et à ses principaux artisans : Mario Bava et Dario Argento.
Benoit Herbet
L'Ombre de la chimère
thriller
ISBN : 978-2-35962-729-9
Collection Rouge : 2108-6273
Dépôt légal mai 2015
© couverture Ex Aequo
© 2015 Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction intégrale ou partielle, réservés pour tous pays. Toute modification interdite.
Éditions Ex Aequo
6 rue des Sybilles
88370 Plombières les bains
www.editions-exaequo.fr
Merci…
Mario et Dario.
Pour avoir défini un territoire profondo rosso.
Ingrid et Nadine.
Pour m’avoir relu.
En souvenir de Fanny…
***
I
L’heure précise importait peu ; c’était la nuit, toutefois, et elle était bien avancée.
La ville importait peu, mais il s’agissait de Strasbourg.
Deux femmes rentraient chez elles, et, à ce stade, leur prénom importait peu…
Elles marchaient à quelques mètres l’une de l’autre, une centaine, tout au plus. Leurs pas étaient gauches, leurs talons trahissaient imperceptiblement leur ivresse… Ils claquaient sans rythme ni conviction sur les pavés mouillés.
Ces deux femmes avaient trop bu. L’une, délibérément. L’autre, par hasard.
La première femme avait bu parce qu’elle buvait dès qu’elle le pouvait. Elle avait bu parce qu’elle osait boire. Elle avait bu parce qu’elle ne parvenait plus facilement à trouver l’ivresse. Elle avait bu pour continuer sur sa lancée. Elle était prête à boire jusqu’à se perdre.
La deuxième avait bu bien qu’elle n’en était pas coutumière. Elle avait bu avec des amis. Elle avait bu avec un homme qui était venu lui parler. Elle avait bu pour essayer de trouver un sens à sa conversation avec cet homme-là, qui ne la passionnait pas. Elle avait bu, mais avait finalement préféré rentrer seule.
Les deux étaient jolies. Deux belles femmes à la quarantaine radieuse.
La première était exquise. Outrageuse, mais exquise. La couleur de sa jupe pétait au cœur de la nuit, devant les phares des rares voitures et à la lumière des réverbères. Elle portait de jolies bottes sur lesquelles elle avait vu se poser le regard de plus d’un mec ce soir.
La seconde était plus discrète, moins provocante, mais une délicate robe blanche la rendait tout aussi belle, quoique plus classique. Encore que, complétée qu’elle était d’escarpins hors de prix, cette robe, à y regarder de plus près, en devenait presque audacieuse.
Les deux femmes arrivèrent chacune en bas de leur immeuble, à quelques rues de distance. Toutes deux cherchèrent leurs clés au fond de leur sac.
La première les laissa tomber. La seconde ne les trouva pas.
La première manqua de trébucher en les ramassant. La seconde fit tomber son Smartphone en remuant le bordel qui gisait au fond de son sac. Après cette péripétie ordinaire, elles parvinrent à entrer dans le hall de leur rez-de-chaussée.
Toutes deux montèrent d’un pas mal assuré et trouvèrent judicieux de se tenir à la rampe.
La première femme habitait au troisième étage. Elle s’arrêta au deuxième.
La deuxième femme habitait au deuxième étage. Elle s’arrêta chez elle.
La suite, pour ces deux femmes, n’eut rien de comparable…
La première femme frappa à la porte. Le palier du deuxième était plongé dans l’obscurité. Il n’y avait pas un bruit. Ni dans l’appartement à la porte duquel elle avait frappé. Ni à l’étage. Ni dans l’immeuble.
Elle s’impatienta. Elle appuya sur la sonnette. Elle entendit à travers la porte les pas de quelqu’un qui venait à sa rencontre. Caprichieuse jusqu’au bout des ongles, elle n’avait pas l’intention d’attendre. Elle appuya une deuxième fois, plus longuement. Elle entendit des pas s’approcher. La porte s’ouvrit.
Il portait un boxer et un t-shirt d’Iron Maiden quelque peu défraichi.
— Sue Ellen ?
C’est comme ça qu’il l’appelait. Inutile d’expliquer pourquoi…
Elle ne répondit pas. Elle le fixait.
— Vous avez vu l’heure ?
Elle hocha la tête et sourit. L’alcool lui donnait du courage…
— Vous offririez un dernier verre à votre gentille voisine ?
Il hésita. Ou fit mine d’hésiter. Ou hésita sincèrement. Il la laissa entrer, néanmoins.
La femme s’aperçut qu’il avait navigué hors de son sommeil et dans son appartement sans éclairer. Le vestibule était plongé dans la pénombre. Il se dirigea vers l’interrupteur. Elle l’en empêcha. Elle se colla à lui. Elle colla ses cuisses aux siennes, le tint désespérément par les bras et approcha son visage du sien.
— JR, Sue Ellen aimerait beaucoup, bafouilla-t-elle, que vous lui donniez un bisou.
Elle approcha ses lèvres des siennes et l’embrassa. Il lui rendit son baiser. Avec appétit. Avec langueur. Avec soif.
Il la désira instantanément. Une raideur parcourait déjà son boxer. Il ne se posait pas de questions, et quand elle sentit les mains de cet homme se poser fermement sur ses fesses, elle comprit instinctivement qu’il avait l’intention de répondre à ses attentes.
La deuxième femme arriva elle aussi sur son palier, qu’elle éclaira. Elle se trompa de clé, puis eut quelque difficulté à trouver la serrure. Un tour. Deux tours. Trois tours. Quatre tours. Une porte blindée digne d’un bunker.
Elle rentra chez elle. Ferma. Et verrouilla la porte. Elle déchaussa ses escarpins, qu’elle jeta par terre. Elle se rendit compte à ce moment combien ses chevilles étaient douloureuses. Elle se rendit compte également qu’elle n’avait pas sommeil.
Elle fit chauffer de l’eau dans sa bouilloire. Elle avait envie d’une tisane. Dans son salon, elle alluma son ordinateur. Elle voulait lire ses mails.
Ses parents lui avaient écrit. Sa copine Sylvie également. Plus un dragueur insipide. Elle entendit l’eau siffler dans la bouilloire. Elle retourna à la cuisine.
Le choc sur sa tête fut brutal. Imprévisible. Elle tenta de résister, mais ses jambes vacillèrent et l’entrainèrent corps et âme dans leur chute.
***
II
JR embrassa passionnément Sue Ellen dans son couloir. Il la touchait avidement. Il ne s’embarrassait d’aucune bonne manière et son ardeur ne connaissait apparemment pas la demi-mesure.
Ses lèvres à lui étaient mordantes tandis que ses lèvres à elle étaient mordues.
Ses mains à lui s’aventuraient de sa poitrine à ses cuisses sans hésitation, avec expertise, tandis que ses mains à elle le tenaient par la tête, comme pour s’assurer avec soif et désespoir qu’il ne mette pas fin à leur baiser.
Il avait une manière rassurante et décomplexée de la toucher. C’était ce dont elle avait besoin. Il répondait à ses baisers, à ses étreintes et aux humeurs de son corps dans un timing parfait.
Elle l’embrassait désespérément, avidement, mais elle n’en avait pas conscience. Merci le whisky coca.
Elle se dégagea et le prit par la main. Elle tenta de l’emmener au salon. Un canapé ferait l’affaire.
— Non, pas par-là, dit-il tranquillement.
Il l’emmena dans la chambre. Elle suivit. Elle n’avait pas d’autre choix, mais ça tombait bien, elle en avait terriblement envie.
Elle s’assit, pour ôter ses bottes. Il l’en empêcha.
Il dégrafa son soutien-gorge, sans l’ombre d’une hésitation, sans aucune maladresse dans le geste, mais il ne le lui enleva pas. Ils s’embrassèrent à nouveau.
Il la coucha dans le lit. Il se coucha sur elle.
Elle passa les mains sous son t-shirt. Elle prit plaisir à toucher son torse. Il fit de même et pressa le bout de ses tétons durs et insolents. Ces corps encore inconnus étaient animés d’une même envie l’un de l’autre. Elle prit un air aguicheur :
— Il va falloir que tu me laisses enlever mes bottes et quelques accessoires inutiles, si tu veux qu’on couche ensemble.
Il lui sourit à son tour.
— Tu rigoles, ma Sue Ellen. J’ai attendu 45 ans pour qu’une femme aussi sexy frappe à ma porte en plein milieu de la nuit. Je ne vais pas laisser passer une occasion pareille.
Il parlait doucement. Avec assurance. Elle sourit. Et céda.
Il lui demanda de se coucher sur le ventre. Elle obtempéra.
Il ramassa une capote dans le tiroir de sa table de nuit. Il l’embrassa dans la nuque. Il se coucha contre elle. Il remonta sa jupe, passa ses mains sous ses collants et sous son string. Il s’obstina à ne pas la dévêtir.
Elle se devinait trempée. Il le lui confirma. Il la caressa assez délicatement. Un doigt. Puis deux. Des vagues de plaisir l’envahirent. Il la rendait dingue. Son érection avait éjecté son pénis hors de son boxer, et il le maintenait pressé contre sa cuisse. Elle adorait.
Il retira ses doigts. Il lui intima de ne pas bouger lorsqu’elle fit mine de se tourner vers lui. Il abaissa très légèrement son string et ses collants sur le haut de ses cuisses. Trop peu pour la dévêtir. Assez pour la prendre.
Il enfila sa capote.
Allongée sereinement sur le ventre, elle sentit qu’il se couchait sur elle, se faufilant avec dextérité et calant son sexe dans le sien. Il murmura quelques paroles crues et commença à l’investir.
Elle fut troublée par cette étreinte dérangeante et pourtant douce. Décontenancée d’être entièrement vêtue et néanmoins offerte à son voisin. Les circonstances, l’alcool et la passion de cet homme l’emmenèrent vers des sommets.
Elle n’eut aucun répit. Aucune latitude. Aucun doute.
Ce fut génial…
***
III
Elle reprit progressivement conscience. Ses yeux s’ouvrirent péniblement.
La lumière était crue. Elle ferma ses paupières aussitôt.
Elle sentait la douleur, à l’arrière de son crâne, juste au-dessus de la nuque.
Elle tenta de bouger, elle se cogna les genoux.
Ses mains étaient entravées derrière son dos. Ses jambes étaient attachées également.
Et elle était bâillonnée.
Elle pleura. En silence. Elle avait peur de tenter d’ouvrir les paupières à nouveau. Peur de voir où elle était. Elle n’en était même pas encore à chercher à comprendre.
Où était-elle ? Qui s’était introduit dans son appartement ? Comment ? Pourquoi ? L’avait-il violée ?
Non. Elle n’avait pas été violée. Elle portait toujours sa robe. Elle se déhancha et sentit le contact de ses sous-vêtements. Elle n’avait pas été violée. Pas encore, du moins. À cette pensée, ses larmes redoublèrent.
Elle tenta d’émettre un son. Moins pour hurler ou gémir que pour éprouver le bâillon. Il ne sortit de sa bouche qu’un imperceptible murmure. Elle essaya de bouger à nouveau. Tant à droit qu’à gauche, elle se cogna les genoux. Elle était enfoncée dans un lieu exigu. Cru. Inhospitalier. Étranger. Il ne lui restait qu’une solution. Ouvrir les yeux.
Première tentative. Toujours la lumière crue.
Deuxième tentative. Des ombres. Des formes.
Troisième tentative. Une certitude.
Elle n’avait plus besoin d’ouvrir les yeux. Elle savait.
Elle était toujours chez elle. Dans sa salle de bains. Dans sa baignoire, plus précisément. Recroquevillée, les genoux pliés. Elle avait été attaquée dans la cuisine. Puis attachée, et traînée là. Ou l’inverse. Ses escarpins étaient soigneusement posés à côté de la baignoire, abandonnés et insolents.
Elle entendait au loin le sifflement de la bouilloire. Elle se demanda combien de temps elle avait passé là, mais ça n’avait aucune importance, en fait.
Jamais sa salle de bains ne lui avait semblé si blanche, si froide.
Mobilier blanc. Murs blancs. Serviettes blanches. Carrelage blanc. Murs et plafond peints en blanc. Baignoire blanche. Elle se sentait réduite à une misérable tache noire au fond de sa baignoire, toute petite parmi ces austères éléments blancs. Elle prit peur.
Elle entendit ses pas.
Elle vit son agresseur dans l’embrasure de la porte. Il était vêtu de noir. Il portait un imperméable et… Des gants en cuir, noirs eux aussi. Le contraste qu’il amenait dans l’harmonie glaciale de la salle de bains symbolisait parfaitement la transgression qu’il incarnait.
La vue des gants la fit frissonner. Il la regarda à peine. Comme pour s’assurer qu’elle était bien à sa place. Rien de plus.
Elle le regarda. Elle chercha dans son visage découvert les stigmates de la monstruosité. Mais son visage était terriblement banal.
Il ouvrit distraitement les armoires du meuble de la salle de bains. Il en sortit un sèche-cheveux. Le regard de la femme fixait les gants. Elle ne pouvait s’en détacher.
Elle imaginait le cuir froid à l’extérieur, brûlant d’un feu cruel à l’intérieur. Elle imaginait leur craquement insupportable sous la pression des doigts. Elle imaginait ce que des gants pareils pouvaient signifier. Il la regarda.
— Il paraît que si je remplis la baignoire d’eau et que j’y jette le sèche-cheveux, tu grilles illico.
Elle se nicha vainement au fond de la baignoire, les yeux suintant instantanément de larmes et de terreur.
— Façon Claude François, en plus radical, dit-il en esquissant un sourire à moitié triste, à moitié songeur.
Il la regarda encore. Elle gesticulait mollement, il saisit sa peur. Comme si ses gants avaient le pouvoir de palper l’effroi. Il se nourrit de ce triomphe annoncé, avant de poursuivre le monologue.
— Tu te demandes pourquoi, n’est-ce pas ? Pourquoi toi ? Pourquoi vas-tu mourir… nécessairement ? Il insista sur le mot « mourir », marqua une pause, puis reprit.
— Pourquoi suis-je chez toi ? Pourquoi t’ai-je choisie ? Pourquoi dois-tu mourir ici, et pas dans ton vestibule, ou ton salon, ou dans tes chiottes, là où doivent finir les merdes de ton espèce ?
La haine apparut dans son visage en même temps qu’elle perçait à travers ses mots.
Il lut du désespoir et de la curiosité dans le regard affolé de sa victime. Il fut animé d’un sentiment de toute-puissance qu’il n’avait jamais connu jusqu’alors.
— Tu n’en sauras rien… Patricia.
À l’évocation de son prénom, elle sursauta.
Elle analysa dans un dernier instant de lucidité toute la préméditation de l’acte, et comprit qu’elle allait être mise à mort.
Impossible de hurler, de cogner, de fuir, de négocier, de supplier. Impossible d’espérer. Son bourreau sortit. Il revint rapidement, la bouilloire à la main.
À compter de cet instant, elle sut.
Le bras levé, il versa l’eau lentement, sur ses jambes, façon thé oriental. Une trace de vapeur persistait sur la trajectoire de l’eau bouillante. La brulure fut immédiate. Insoutenable.
L’écoulement de l’eau fut interminable.
Tandis qu’elle gesticulait désespérément, de douleur, mais aussi dans une vaine tentative d’échapper à son supplice, Patricia se demanda comment une bouilloire pouvait contenir autant d’eau. Il arrêta de verser.
Patricia regarda ses jambes. La peau commençait à rougeoyer, la douleur était atroce. Elle pleurait. Elle se força à respirer. Elle restait obnubilée par le gant noir qui tenait la bouilloire.
Elle vit son assassin, telle une tumeur noire dans la blancheur irréversible de la salle de bains.
Alors, il versa le reste d’eau sur sa robe, avec la même lenteur, et remonta le long de son corps. La douleur se propageait, se nourrissait, irradiait.
Elle tenta de coller son visage contre la paroi de la baignoire. C’eût pour seul effet d’amener son bourreau à verser le contenu du reste de la bouilloire sur ses cheveux.
Patricia pleura comme jamais elle n’avait pleuré. Pour des dizaines de raisons à la fois.
Il quitta la salle de bains. Elle entendit le bruit de ses pas. Elle nourrit l’espoir insensé qu’il sorte, qu’il parte, qu’il fuie, qu’il se passe quelque chose. Mais il revint, évidemment.
Il tenait une marmite dans ses deux mains gantées, son visage en retrait, pour ne pas être ébouillanté par la vapeur émanant de cette casserole dans laquelle, la veille encore, elle avait cuit des tagliatelles.
Il versa en une fois le contenu de la marmite sur sa victime.
Un bruit impie perça à travers le bâillon.
Patricia n’était plus que spasmes, contorsions et souffrance. Il se retourna, et voulut apprécier son reflet dans la glace. Mais, déjà, la buée la recouvrait.
Il ferma la bonde d’évacuation de l’eau, ouvrit le robinet et régla le thermostat sur la température maximale. Il sortit de la salle de bains, attendit debout dans le salon, en regardant la rue silencieuse en contrebas et revint dix minutes plus tard.
La vapeur commençait à envahir le couloir. La pièce était moite. Patricia était cuite.
Partout, des cloques se dessinaient sur son cadavre.
Il coupa l’eau en pensant aux pauvres africains qui n’ont pas assez d’eau pour vivre. Le gaspillage le révulsait.
Il ramassa son matériel et emporta également le Mont-Blanc qu’il avait repéré un peu plus tôt, en attendant Patricia…
Il sortit en fermant la porte de l’appartement avec sa propre clé.
***
IV
C’était toujours un peu minable, moche, pathétique de se réveiller et d’avoir besoin de quelques instants pour se rappeler où elle était. Elle le savait. Parfois même, elle se l’avouait. Mais ce n’était pas la première fois que ça lui arrivait. Ni la dernière.
Au moins, elle avait échappé au blackout total. Elle se rappelait l’étreinte dans le vestibule, et le câlin. Ce câlin avait eu quelque chose de surprenant, de mémorable, d’interdit.
Ce gars avait été imaginatif, torride, attentionné. Elle avait déjà gardé une partie de ses fringues pour le faire, mais pas de manière aussi délibérée, aussi planifiée, aussi maîtrisée.
Mais les sommets de la nuit laissaient déjà la place à un besoin incompréhensible et impérieux. Elle voulait s’enfuir.
Quelle heure était-il ? Onze heures. Onze heures et un inévitable mal de tête. Deux SMS.
Tous deux de Franck. Merde. Il la saoulait. Elle n’avait même pas envie de lire les SMS. Elle le fit par réflexe. « Appelle-moi », à 01h28. Et « Tu ne m’as pas rappeler » faute de grammaire en bonus, à 10H03.
— Et je ne te rappellerai jamais, murmura-t-elle comme pour s’en convaincre.
Elle s’étendit. Elle entendit de la musique en provenance du salon. « The number of the beast » Iron Maiden. C’était le seul morceau de la bande à Bruce Dickinson qu’elle connaissait. Mais elle voyait bien le tableau. JR était content. Il avait tiré un coup inespéré. Elle l’avait fait bander à mort, alors, il s’était réveillé guilleret, et s’était fait plaisir en exhumant le morceau fétiche de sa jeunesse. Cela ne l’étonnerait qu’à moitié qu’il l’écoute à partir d’un vinyle. Elle sourit.
Elle se leva. Elle était nue. Au secours, du Doliprane. Elle enfila son string et son top. Elle eut un ridicule réflexe de pudeur à l’idée de se montrer comme ça, devant lui. Mais la mini-jupe et les bottes, au p’tit dej, c’eût été pire.
Merde, c’est quoi, déjà, son prénom ? Ah oui, Fred. Il lui avait dit qu’il s’appelait Fred la première fois qu’elle l’avait croisé dans les escaliers. Elle ne pouvait pas