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Es-Tu là, Allah?
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Livre électronique248 pages3 heures

Es-Tu là, Allah?

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À propos de ce livre électronique

"Es-Tu là Allah?" est une mine d’or de l’inattendu, le récit d’une aventure à la fois audacieuse et déroutante, un mélange de réflexions philosophiques et d’expériences vécues dans un quartier pauvre de Jakarta, capitale de l’Indonésie, qui a été le théâtre de la tentative d’un ‘mécréant’ de suivre à la lettre et jusqu’à sa fin le Ramadan, mois de jeûne musulman, en espérant obtenir à l’issue de celui-ci un signe d’Allah!

Avec succès?

En vain?

Découvrez-le à travers ce défi poignant truffé de détails déchirants et empreint d’une ironie à la fois glaciale et lucide.

Le sujet de la quête de Dieu est abordé avec un fantaisiste sérieux qui donne envie de poursuivre la lecture justement parce que le ton n'est ni rituel, ni moqueur.

Le journal tenu pendant les trente jours de Ramadhan est un clin-d'oeil intéressant à explorer.

LangueFrançais
Date de sortie2 nov. 2017
ISBN9781370589579
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    Aperçu du livre

    Es-Tu là, Allah? - Dirk Vleugels

    Copyright notice

    Smashwords edition

    © 2017 Dirk J. J. Vleugels.

    All rights reserved. No part of this book may be reproduced, scanned or distributed in any form, including digital and electronic or mechanical, including photocopying, recording or by any information storage and retrieval system, without the prior written consent of the relevant author, other than brief quotes used in reviews.

    Published by Leg Iron Books, 2017.

    Cover art by Dirk Vleugels

    Parce que J'ai conçu de grands projets pour vous. Des projets qui visent non pas à vous nuire, mais à vous ouvrir les portes du paradis. Je veux vous offrir un nouvel espoir et un avenir prometteur. Adressez-Moi vos prières et Je vous écouterai. Quiconque Me cherche sincèrement en plaçant toute sa confiance en Moi, finira par Me trouver.

    (Jérémie 29: 11-13)

    The blind and the seeing

    Are not alike;

    Nor are the depths

    Of Darkness and the Light.

    (Al-Qur’an, Faatir XXXV: 19-20)

    The back cover of the print version

    Contenu

    Copyright notice

    Back cover (print version)

    Le Pacte

    Jour 00

    Jour 1

    Jour 2

    Jour 3

    Jour 4

    Jour 5

    Jour 6

    Jour 7

    Jour 8

    Jour 9

    Jour 10/11

    Jour 12

    Jour 13

    Jour 14

    Jour 15

    Jour 16

    Jour 17

    Jour 18

    Jour 19

    Jour 20

    Jour 21

    Jour 22

    Jour 23

    Jour 24

    Jour 25

    Jour 26

    Jour 27

    Jour 28

    Jour 29

    Jour 30

    6.19 pm

    Le lendemain d'Idul Fitri

    Le Verdict

    Lexique Indonésien – Français

    Leg Iron Books

    Voici le récit passionnant du Ramadan vécu par Marc, musulman par alliance. Le témoignage honnête et courageux d’un homme dont le but n’a nullement été d’attaquer l’Islam ni de ridiculiser celui-ci, mais qui a essayé de trouver dans un dialogue ouvert avec Allah une réponse aux questions tant quotidiennes qu’existentielles qui le tourmentaient.

    L’éditeur se contente d’éditer ce journal d’un ami qui est décédé il y a maintenant quatorze ans. Il n’est en aucun point responsable des opinions de l’auteur. Il est neutre, ne porte pas de jugement, n’exprime aucune opinion. Il publie le livre, un point c’est tout.

    LE PACTE

    Dieu, Tu m'exaspéres!

    Le mal ’a frappé il y a sept mois: un cancer d’origine inconnue n'offrant d'autre certitude que celle de l’imminence de son issue fatale. Il y a exactement quatre jours, le 31 décembre dernier, le spectre du suicide est pour la première fois venu me hanter l'esprit. Ultime solution pour échapper aux camps de la mort? Fuite désespérée vers le néant ou la délivrance? Pile ou face?

    A quoi bon entamer une nouvelle année si je n’en vivrai quand même pas la fin.

    Au fil des heures, le dessein se concrétise. Une décision ferme et concise nullement dictée par la menace ou la souffrance, et qui ne rencontre ni objections majeures, ni obstacles insurmontables. Simple actionnement du levier de commande de la chaise électrique. Se placer au bord du précipice, sauter, respirer à pleins poumons l’exaltation de la chute vertigineuse, planer dans une euphorie sans fin. En laissant une fois pour toutes derrière soi le point du non retour.

    Des dizaines de fois, j’ai tenté d'exprimer le désespoir qui m’emprisonne. En métaphores de geôles immondes, en allégories de voyages cosmiques aux confins inexplorés du Big Crunch, en paraboles de machines à remonter le temps capables de propulser un homme vers le Point Zéro du Big Bang.

    Mais les mots s'avérèrent inaptes à décrire le Désespoir Irrémédiable dans lequel me plongeaient l'infinité cosmique, l’ímpérissable intemporalité, la chaleur à croissance exponentielle, les atomes se scindant indéfiniment en séries apparemment incoercibles de nouvelles particules de plus en plus infinitésimales. Une singularité autonome, impossible à traduire en formules métaphysico-mathématiques. La plus singulière des singularités, dont on ne peut néanmoins nier ni l'existence, ni la puissance d’absorption, ni la force de pénétration puisqu'elle recouvre tous les univers et contamine les neutrons les plus nanominimes des particules microscopiques de la matière antimatière.

    Bien qu'inexplorée car à jamais impénétrable, seule la cinquième force de la physique, ce pouvoir abscons du poème révélé, pourrait paraphraser Sa Cruauté et Son Incommensurabilité Absolues: le Désespoir Ontologique n'est autre que Dieu à l'Inverse. Une Négativité qui pourrait très bien se cacher loin au-delà des frontières de notre entendement. Car Dieu ne s'est apparemment pas donné à fond, prenant les précautions nécessaires pour ne se révéler à nous qu'en termes de valeurs chiffrables et mesurables: les quelques 9.461.000.000.000 km de Son année-lumière, les -273C de Son enfer et les courbes bizarres de Son architecture sont probablement autant de preuves du souci qu'Il a eu d'amputer de la moitié Son infinité pour la maintenir dans les limites de notre intelligence métrique. Mais pourquoi nous laisse-t-Il l'illusion de pouvoir Le décrypter, Le mathématiser? Pourquoi s'est-Il imposé ces restrictions arbitraires? Même un gamin pourrait aisément transformer les -273 en -2.730 ou en -27.300. Et si la relativité a permis à Einstein de poser Son année lumière au carré, pourquoi ne pas l’élever à la puissance cinq, dix, Nième? En créant Sa lumière lente et Son froid sidéral, en dessinant les droites de Son cosmos sphérique, Dieu aurait-Il commis quelques incompréhensibles bévues scientifiques?

    Ou nous a-t-Il sousestimés? D’accord, les 300 000 km/sec nous posent encore quelques petits problèmes, mais nous sommes presque en mesure d'atteindre par nos propres moyens les fameux -273C. Et comme les records sont faits pour être battus, il se pourrait fort bien que l’un ou l’autre Esquimau australien ait déjà franchi cette barre jugée infranchissable.

    Son Inverse a été nettement plus prévoyant. On peut en effet affirmer avec une irréfutabilité mathématique que le Désepoir est parfait. Un Antipôle de Dieu infailliblement trounoiré.

    Et au coeur de cette Négativité, au centre de cet Antipôle: moi.

    Un micro-individucule sans volume ni envergure, un I turque.

    Un I sans iota.

    Quatre jours plus tard, je me retrouve à bord d’un vol à destination de Jakarta en compagnie de ma femme Yanti et… d'un cancer, qui se développe, prolifère, étend chaque jour un peu plus son emprise débilitante.

    Pourquoi n’ai-je pas sauté? Qu’est-ce qui m’a fait reculer? Malgré mon profond désarroi, je m'étais pourtant parfaitement programmé. Le plongeon n’aurait mëme pas dû être triomphant: un simple faux pas aurait suffi pour me faire basculer discrètement dans l’abîme. Et pourtant, je suis toujours là. Et bien là, puisque je me trouve en ce moment dans cet avion, à trente mille pieds au-dessus du gouffre d’il y a quatre jours, bien ceinturé dans la carlingue en aluminium, entouré d’un équipage aux petits soins et protégé par des portes hermétquement fermées.

    Et c'est alors que m'est tout à coup venue, tel un parachute de dessin animé, une idée à première vue saugrenue: le Ramadan. Serait-ce le signal, le signe tant attendu?

    Tu as ôté tout sens de ma vie. Tu m’as privé d’avenir et d’espoir, ne me laissant que mon présent et mon passé, mon C.V., ma femme et mes enfants, mes problèmes sans fin ni solution. Je n’ai jamais vraiment cru au suicide, et je ne me fie pas plus aux prodiges. Mais que me reste-t-il d'autre? Comme je n'ai pas sauté, il n’y a plus qu’un miracle qui puisse me sauver. A condition bien sûr qu'il y ait un GO compétent au Club des Miraculés…

    Est-ce pour cette raison que Tu as des années durant évité de me rencontrer, jugeant que ces prémisses étaient indispensables au miracle à accomplir plus tard? Que Tu exiges au préalable et en réponse à Ton défi un geste de ma part? So let it be. Mathématiquement, scientifiquement, métaphysiquement, biologiquement, je ne suis jusqu'à présent pas parvenu à Te rattraper. A chaque fois que j'avais l'impression fallacieuse de m'être rapproché de Toi, Tu Te retranchais un peu plus au-delà des frontières du Big Bang et des abîmes de mes neurones. Des centaines de fois, j’ai tenté de T'appâter par des prières incroyantes, des génuflexions suppliantes et des courbettes idolâtres. Mais nul mot, nul son, nul signe, nulle lueur n'a surgi de l’obscurité. Refusant de se faire chair, le Verbe est resté virtualité sourde, muette et aveugle.

    Le temps presse, le solde ne s'exprimant plus en termes d'années ou de semestres, mais de semaines, voire de jours. Tout juste de quoi tenir le pari du Ramadan-mois-de-repli-sur-soi, qui débute dans moins d'une semaine? En cas d'échec, je pourrai toujours me consoler à l'idée que cette expérience m'aura permis de me concentrer sur quelque chose, de m’occuper l’esprit, de me donner l’illusion d’avoir tué le temps utilement.

    Oké, so let it be. L’effort que Tu m'imposes compensera largement ce que j’attends de Toi. Le Ramadan est une mortification qui m’est totalement étrangère, et je ne sais vraiment pas si je serai capable de jeûner, de m’abstenir de boire et de fumer de toute la journée pendant trente jours. Je vais me lancer dans l'aventure sans préparation ni entraînement, mais si je m’y mets, je suis bien décidé à tenir le coup. Jusqu’à la dernière seconde de Ton Ramadan. En espérant que Tu Te montreras beau joueur et tiendras Ta parole. Parce que je veux à tout prix savoir si Tu existes, si c’est bien Toi qui m’as jeté le gant, si malgré Ta Toute-Puissance et Ton Infinité Tu es bel et bien présent, ici et maintenant, en moi et autour de moi, prêt à dialoguer et à réaliser un miracle.

    Pour atteindre mon but, je suis disposé à faire le vide autour de moi, à tout noter, à tenir un journal de bord comme annexe à un contrat unilatéral. J’accepte que Tu refuses de le signer, d'être provisoirement seul à y apposer ma signature. Moïse, Jésus et Mahomet ont tout compte fait aussi dû courber l'échine.

    Un bon accord verbal et une confiance absolue en la parole donnée ne valent-ils pas mieux que des lettres de principe ou des contrats dûment signés? Fier de ne jamais avoir manqué à ma parole, je n’en attends pas moins de Toi.

    Jour 00 Jeudi 9 janvier 1997

    Confortablement installé sur la petite terrasse de notre maison à Cawang, j’essaie de me concentrer sur le Jésus du théologien catholique Schillebeeckx, quand ma femme vient me demander si elle peut s’absenter pendant quelques instants pour se rendre à Cipinang.

    -Marc, je dois encore aller chercher deux ayam kampung pour le sahur et faire quelques achats au pasar.

    N'ayant écouté que d'une oreille distraite, je marmonne instinctivement:

    -Ok, Yanti. A tout à l’heure.

    Après six ans de vie commune, je suis toujours surpris d’entendre ma femme me demander explicitement la permission de quitter la maison. Même pour les choses les plus évidentes.

    Je mastique péniblement deux autres pages du casse-tête Jésus, mais me rends soudainement compte que je n'en ai pas digéré le moindre mot. Sahur! Sahur! Le mot résonne dans ma tête tel un violent coup de gong. Une fraction de seconde d'inadvertance et me voilà terrassé par un fulgurant crochet parti d’un angle totalement inattendu. K.O. pendant deux pages. Sahur! Nous y voilà donc. La ligne de départ. Tôt le matin, dans la nuit de jeudi à vendredi. Deux poulets fermiers à titre d’offrande pour célébrer le passage de vie à trépas d’un volcan désormais à jamais éteint et placer sous de riants auspices une expédition de carême préludant à une résurrection escomptée.

    Depuis mon passage à l’Islam en 1986, je n’ai encore jamais respecté le Ramadan. Et jusqu’à mon mariage avec Yanti en juillet 1990, j’ai toujours considéré ce jeûne d'un mois comme une mortification absolument insensée, voire hypocrite, allant à coup sûr à l’encontre de la productivité. Pire même. A une époque comme la nôtre, un pur non-sens exégétique. Cette faim et cette soif sont-elles vraiment aussi pénibles à endurer? Et quel effet corporel ou psychique bénéfique un estomac en permanence creux peut-il bien produire? On s’en met plein la lampe avant la pointe du jour, on se recouche sans scrupules et on fainéante toute la journée avant de se ruer à nouveau sur le festin servi à la prochaine nuit tombante. Comparée à cette mascarade, l’ère catholique d’avant-Vatican II me paraissait beaucoup plus sincère: un repas complet par jour, un point c’est tout. Et cela non pas pendant un mois, mais pendant quarante jours. Il n’y a donc rien de surprenant à ce que les états islamiques accusent un retard évident par rapport à l’Occident chrétien. Avez-vous déjà essayé de fixer un rendez-vous au cours du Ramadan avec un homme d’affaires ou d’obtenir quoi que ce soit d’un fonctionnaire? Rappelez-moi ou revenez après Idul-Fitri!. Musulman, même un Carl Lewis partirait perdant dans une finale olympique du 100 mètres. Et si l’on doit quand même interpréter le Coran au pied de la lettre, quelle attitude doit adopter un Musulman qui vit au rythme des interminables nuits polaires lapones? Ou dont la cabine spatiale a été mise sur orbite autour de la terre pendant le Ramadan?

    Ma conversion à l’Islam au cours d’un séjour aux Comores ne revêtait aucune connotation religieuse. Elle se résumait à un simple passage d’un néant à un autre néant. L’image du Dieu de mon adolescence s’était effritée au point de ne plus représenter qu’une notion culturelle, un mot vidé de son contenu, dénué de tout caractère émotionnel, de tout engagement. Mais à partir de l’été ’96, ce même mot n’allait plus me lâcher, m’empêchant de dormir, me coupant l’appétit, me condamnant à l’impuissance sexuelle, et me poussant finalement jusqu’au bord du suicide.

    Dix ans plus tôt, à Moroni, Dieu n’était pourtant rien d’autre qu’un dieu-à-d-minuscule, quatre lettres impuissantes, un thème intéressant pour discussions pseudo-intellectuelles. Et mon passage à l’Islam n’avait été qu’un intermède servant à donner un peu de couleur locale à une visite rendue à une amie exotique dans une île exotique. Un album de photos qui surprenait amis et connaissances, mais choquait la famille. Une aventure qui m’avait affublé du nouveau nom d'Marcsa, mais qui avait quand même été plus qu’un simple fait divers, puisqu’elle était le reflet exact de ma vie et du sens que je lui avais donné. Jouir en parfait hédoniste, m’affirmer pleinement, ériger un musée d’expériences vécues, plonger sans hésiter dans l’inconnu, explorer le ciel et l’enfer. La Découverte Permanente. L’Ultime Aventure. Nouvelles femmes et nouvelles positions, autres boulots et autres défis, pays inconnus et nouveaux amis. Un acte de rébellion aussi: contre l’hypocrisie et l’impérialisme de la chrétienté occidentale. Et de solidarité: avec l’Afrique noire, avec les Turcs en Allemagne, les Marocains en Belgique, les Indiens en Amérique, les pingouins en Antarctique, les anges esclaves au ciel et les anges déchus en enfer.

    Ce n’est qu’après avoir épousé Yanti que je me suis petit à petit rendu compte que les préjugés que mes anciens coreligionnaires occidentaux nourrissaient à l’égard de l’Islam, et contre lesquels je me croyais tellement révolté, étaient également bien ancrés en moi.

    Le puasa est avant tout un exercice de méditation, de prière et de réflexion. Le fait de s’abstenir de manger, de boire, de fumer n’est pas un but en soi, mais un moyen de se retrouver, d’atteindre un état de sérénité, de paix avec soi-même et les autres. Au cours de cette période de jeûne, il est interdit de s'emporter ou de fâcher qui que ce soit. Et à la fin du Ramadan, lors d’Idul-Fitri, on demande pardon à ses proches pour toutes les injustices commises consciemment ou inconsciemment envers eux au cours de l’année écoulée. On rend visite au reste de la famille, on fait le tour des voisins et des collègues de travail en répétant inlassablement: pardonnez-moi. On n’oublie pas le chauffeur, ni le jardinier, ni la femme de ménage: pardonnez-moi. Et tout le monde répond par la même requête: pardonnez-moi. On passe l’éponge et on recommence à zéro.

    J'avais toujours cru que l'observation du Ramadan n'était difficile qu'en apparence. Mais à la veille du Jour J, je commence à considérer cet exercice d’un tout autre oeil. Se lever à trois heures du matin pour le petit déjeuner et attendre, l’estomac creux, jusqu’à six heures du soir, ne devait pas être évident. Et passer la journée sans boire par des températures de trente degrés ne devait pas être de la rigolade non plus. Mais qui sait, ces privations étaient peut-être moins insensées que je ne l’avais imaginé…

    Jour 01 Vendredi 10 janvier 1997

    Le jour du premier sahur, Cawang baigne dans une ambiance de fête en mineur. Comme si le quartier tout entier attendait un heureux événement. Les haut-parleurs de la mosquée crachent leurs chants plus longtemps et plus intensément que d’ordinaire, quelques jeunes nettement moins exubérants que d'habitude sont accroupis sur le bord du trottoir, d’autres tournent simplement en rond, et la mosquée se transforme en ruche bourdonnante. Rares sont ceux qui vont se coucher et certainement pas les enfants, qui ont congé le lendemain. Tout le monde attend le sahur, signal de départ du Ramadan.

    Yanti a l’intention d’aller passer la veillée du sahur auprès de son âme soeur Shinta, mais promet de rentrer vers deux heures du matin. J’ai donc toute la soirée et une partie de la nuit pour achever mon jour 00. Peu après minuit j’abandonne et vais me coucher.

    Quelqu’un frappe à la porte de notre chambre à coucher. Cela doit être l'heure du sahur. D'autres petits coups suivent avec un peu plus d’insistance. Encore à moitié endormie, Yanti murmure:

    - Quelle heure est-il?

    - Quatre heures, répond une petite voix qui est celle de notre numéro trois, Novita.

    Yanti retrouve soudainement tous ses esprits et saute du lit. Nous devons avoir terminé notre repas avant l’appel de l’azan subuh. Si Imsak tombe à quatre heures quart, il ne nous reste plus qu’un petit quart d’heure, et le repas doit encore être réchauffé. Sans m'inquiéter, je me retourne un bon coup: on m’appellera bien quand tout sera prêt. Lorsque ma femme vient me chercher, je me suis rendormi. Il n’est heureusement que trois heures et demie. Novita a exagéré et nous avons donc largement le temps de manger à notre aise.

    Les plats, les assiettes et les verres ont été disposés sur un tikar déroulé sur le sol de la cuisine. Assis à la table de la salle de séjour, je suis le seul à manger avec un couteau et une fourchette. Le reste de la famille prend son repas à la cuisine, sur le tikar et en se servant

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