SVHS : Les experts de l’OMS s’inquiètent de la propagation du virus H5N1 à l’être humain. Pourquoi le niveau d’alerte a-t-il augmenté récemment, alors que le virus circule depuis plus de vingt ans ?
Benjamin Roche : De la grippe espagnole à la grippe H1N1 en 2009, la plupart des pandémies de grippe chez l’homme ont été provoquées par des virus aviaires, qui étaient d’abord adaptés aux oiseaux. Ces virus ont beaucoup de mal à passer directement chez l’homme. Ils ont souvent besoin d’hôtes intermédiaires pour être capables de se transmettre d’être humain à être humain. Lorsqu’un virus aviaire acquiert cette capacité, c’est un boulevard qui s’offre à lui, car les populations ne sont pas du tout immunisées, comme dans le cas de la grippe saisonnière. Le virus peut s’étendre à l’ensemble de la planète en quelques mois. C’est ce scénario que les autorités sanitaires redoutent. On a franchi une étape en ce sens avec le virus H5N1 depuis qu’il infecte plusieurs espèces de mammifères.
Du fait de la circulation massive des virus H5N1 chez les oiseaux, l’environnement est très contaminé par ces virus. Les mammifères qui entrent en contact avec les déjections des oiseaux et leurs carcasses ont ainsi pu les contracter. De rares cas de transmission au sein d’une même espèce ont été observés dans un élevage de visons, en Espagne, et dans des élevages de renards et d’autres animaux à fourrure, en Finlande. Une transmission interespèce est aussi évoquée chez les mammifères marins – lions de mer ou phoques. Un marqueur génétique très important d’une capacité de réplication accrue chez les mammifères a été retrouvé chez la moitié des mammifères infectés, en Europe comme aux États-Unis. Fort heureusement, on n’a pas identifié de variant qui porte tous les attributs associés à une transmission interespèce efficace chez les mammifères. L’OMS estime que le risque de transmission interhumaine est faible