Au lendemain de la dissolution, le nom de Bruno Karsenti apparaissait parmi les premiers intellectuels et artistes appelant à une union des gauches. Mais le philosophe, directeur d’études à l’EHESS, se dit aujourd’hui « atterré » par la tournure prise par le Nouveau Front populaire. En cause : la prédominance dans l’alliance de La France insoumise sur la gauche socialedémocrate incarnée par Raphaël Glucksmann, alors même que le parti de Jean-Luc Mélenchon défend un antisionisme radical. Bruno Karsenti, qui vient de publier un livre de dialogue posthume avec Bruno Latour sur l’avenir de l’Europe (Nous autres Européens, PUF), explique à L’Express pourquoi l’antisémitisme et la question juive sont des enjeux centraux pour la gauche. Entretien.
L’antisémitisme est-il le grand oublié de ce Nouveau Front populaire ?
Bruno Karsenti : L’antisémitisme est le point clé sur lequel se joue la possibilité d’une union de la gauche. Si cette question est affrontée, alors cette union peut se faire. Si elle est évacuée ou mal abordée, alors l’alliance de la gauche s’effondrera, comme cela a été le cas depuis plusieurs années. Depuis le début des années 2000, l’antisémitisme, agissant sous des masques différents, est vraiment ce qui abîme la gauche.
Pourquoi ?
Parce qu’il ne s’agit pas simple ment