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Giacomo Puccini Notre contemporain

Cent ans après sa mort, le 29 novembre 1924, où en sommes-nous avec Puccini ? Cette question peut sembler n’avoir guère de sens lorsqu’on consulte la programmation des maisons d’opéra à travers le monde. Puccini y apparaît comme leur placement le plus sûr; le genre d’actif en portefeuille – pardon, en répertoire –, qui ne se déprécie guère et produit avec constance son dividende annuel. La pérennité même de son œuvre (car ce ne sont pas quelques opéras qui sont joués, mais la quasi-totalité de sa production) n’est cependant pas garante de sa valeur. Elle ne lui définit même pas une place précise dans l’histoire du théâtre lyrique. Du reste, que Puccini plaise au grand public n’a pas dissipé tous les doutes esthétiques qu’il inspira de son vivant même. Oui, nous aimons Puccini, mais est-ce que nous l’admirons ? Est-ce qu’il nous offre de ces fulgurances musicales qui exhaussent au-dessus du plaisant ? Est-il de ceux qui nous mènent sur leurs sentiers obscurs ?

Adorno évoqua l’étrange compassion que suscite Puccini chez le bourgeois, qui pleure à cette musique mais n’emporte avec lui aucune empathie lorsqu’il sort du théâtre. D’autres mirent en exergue son « incapacité à recevoir la vie dans son infinie variété, (son) impuissance à vivre avec ferveur une vie profonde et intense » (Pizzetti). Ou encore l’absence d’élaboration thématique, ou le caractère conventionnel de ses personnages. On se souvient des mines dégoûtées de Gerard Mortier, ou du prudent retrait de Claudio Abbado : « Je l’écoute mais je ne le dirige pas. »

Etrangement, même ses biographes les plus enthousiastes, comme Mosco Carner (1958), admettent sans peine les limites de leur héros. Sans doute la vie même de Puccini, avec ses millions, ses villas, ses bateaux, ses voitures, ses maîtresses, ses mondanités, plaide-t-elle pour l’insincérité du faiseur. Point de mot apparemment moins adapté à Puccini que celui de « génie ». Trop dolent. Trop gâté. Trop reconnu. Peut-être après tant de gloire eût-il dû sombrer corps et biens, ne survivant que par une fraction limitée de son legs, comme avant lui Rossini – ou Vivaldi, ou même Schubert – pour être triomphalement redécouvert, exhumé, par des érudits à la contagieuse passion. Hélas ! point de Puccini Renaissance ! Pourtant, un épais oubli qui a recouvert ses contemporains les plus fêtés (de Smareglia à Zandonai, en passant par des pans entiers de Mascagni, Leoncavallo, Giordano…)

Puccini eut pour lui des vestales autrement sourcilleuses, qui furent tout simplement les plus grands chefs

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