Un Italien à Paris
Donizetti et la France (1831-1897) par Stella Rollet. Classiques Garnier, 535 p., 59 €.
Parmi les Italiens qui se sont illustrés à Paris au XIXe siècle, de Rossini à Verdi en passant par Bellini, Gaetano Donizetti serait-il le mal aimé, dédaigné par certains de ses contemporains et la postérité? Stella Rollet s’est penchée sur la « réception ambiguë » de son oeuvre entre 1831 (année de représentation d’Anna Bolena au Théâtre-Italien) et 1897 (centenaire de sa naissance) dans le cadre de sa thèse de doctorat d’histoire, dont est tirée cette remarquable étude, qui vient d’être gratifiée du Grand prix du Prix du livre France Musique – Claude Samuel 2022. Certes, les sources (presse, correspondance, documents conservés aux Archives nationales, à la BnF, à la SACD…) ne manquent pas pour retracer la carrière parisienne du compositeur; encore faut-il savoir y naviguer et en tirer une matière éclairante, comme le fait l’autrice pour rendre justice à cette aventure française mêlant réussites et échecs.
Conscient de l’importance de conquérir Paris pour qui veut alors faire une carrière lyrique, aux Italiens en 1839, puis le succès de sa française au Théâtre de la Renaissance lui ouvrent l’accès aux grandes maisons que sont l’Opéra Comique et l’Académie royale de musique (aujourd’hui l’Opéra), où sont créées, toutes deux en 1840, et – Berlioz y verra les victoires d’une « guerre d’invasion ». Mais le chant du cygne n’est pas loin, comme le montre bien l’historienne en racontant par le menu le bon accueil rapidement démenti, dans le genre du grand opéra parisien, de (1843); les premiers signes sont là du mal qui le ronge (une syphilis cérébro-spinale) puis le conduira à l’internement (1846-1847) et à la mort (1848).