Difficile d’ouvrir un livre sur la Seconde Guerre mondiale sans buter encore et toujours sur l’affirmation selon laquelle les Panzer auraient été trop coûteux à produire. C’est le cas, en particulier, du Panzer VI Tiger (57 t, canon de 88 mm), que de nombreux auteurs comparent sous ce rapport et sans autres précautions méthodologiques au T-34 soviétique. Les chiffres de production paraissent au premier abord éloquents: face aux 1350 Tiger produits en trois ans, les usines soviétiques ont livré 35000 exemplaires de leur modèle phare, le T-34/76 (26,5 t, canon de 76 mm). Cette énorme différence tient-elle réellement à des coûts de production allemands trop élevés? Et si c’est le cas pour ce couple de blindés, est-ce également vrai pour l’ensemble de la production de Panzer?
S’agissant des tenants de la thèse du Panzer trop cher, un problème saute aux yeux: il est très rare qu’ils fournissent des sources pour étayer leur affirmation. Ce qui oblige celui qui veut les contrer à collecter des données de toute nature et de toute provenance, pour les comparer ensuite dans les meilleures conditions possibles. Trois catégories de données sont à prendre en compte: la quantité de matériaux utilisés, le coût monétaire du produit fini et la quantité d’heures de travail. Mais si chacune de ces catégories fournit un outil de comparaison en théorie valable, elle soulève aussi de multiples problèmes.
Des données détaillées sur les matériaux de fabrication existent pour les chars allemands et, dans une moindre mesure, soviétiques. Si l’on compare par exemple le Panzer III et le Panzer IV, on s’aperçoit qu’ils requièrent des quantités de matières premières étonnamment proches alors que leurs masses totales sont assez différentes. Dans les deux cas, 39 t de produits ferreux (sans compter l’armement) pour une masse au combat respective de 20 t et de 26