Rolling Stone France

NOUVELLE LUNE

Peter Gabriel

i/o

REAL WORLD/VIRGIN

ertes, on ne devrait plus être surpris de quoi que ce soit avec lui depuis le temps, mais tout de même. Ce coup-là, on ne l’a vraiment pas vu venir. Peter Gabriel fan d’Indochine et/ou de Mickey 3D pour, à son tour, hum, demander à la lune, et ce tous les mois depuis janvier dernier, ça valait quand même des points, non? Trêve de plaisanteries. Peu importe en vérité ce qui a bien pu donner l’envie au monsieur de faire coïncider la naissance de chaque étape du projet avec une nouvelle pleine lune. Il avait ses raisons, les explications fournies plus ou moins à demi-mot valaient pour ce qu’elles valaient. Réelle inspiration créative ou jolie pirouette marketing? D’autant que, lorsque quelqu’un vous explique que son premier single (“Panopticom”) est basé sur l’idée de lancer la création d’un globe de données accessible et extensible à l’infini – pour vite comprendre que ce ne sera pas forcément là l’argumentation le plus absconse qu’il daignera fournir au fil de l’année –, quelque chose vous dit que vous aurez plus vite fait de vous faire votre propre idée, sur l’instant et par la suite. De toutes les façons, l’essentiel est ailleurs: tenir enfin un nouvel album inédit de Peter Gabriel, vingt et un ans après son prédécesseur, ! Quasiment une génération… Jusqu’au communiqué de presse qui préfère s’en amuser en évoquant une “” (“”, pouvant également se traduire par “prolongé, lent, interminable, fastidieux”…). Et parce que chaque chapitre de cet nouveau a eu la possibilité d’exister individuellement au moins l’espace de vingt-huit jours, c’est la manière dont ils existent ensemble désormais, se succèdent ou se répondent, s’enrichissent au contact l’un de l’autre. Forment un album, quoi; notion dont on cerne très vite que Gabriel ne l’a jamais perdue de vue. Et comme c’est bien connu, la face éclairée de la lune ne serait rien sans sa face cachée, deux arrangements différents (“Bright-Side Mix” et “Dark-Side Mix”) ne seront pas de trop. C’est notamment cette impression de vagues dans sa d’un (symbolisés par ce “Road to Joy” entraînant) et rivières de cordes moins paisibles que désabusées (irrésistible “Playing for Time”). Que ce sentiment de passé et présent entremêlés s’impose comme une constante dans la perception de n’a en fait rien d’étonnant. Le temps s’y dessine comme un fil rouge. Le temps qui file, celui que l’on n’a pas vu passer et que l’on regrette de n’avoir pas su retenir, celui dans lequel on ne se reconnaît plus vraiment par ce qu’il a créé ou détruit, celui dont on s’angoisse de ce qu’il semble annoncer. De ce monde qu’il semble prendre soin de regarder avec distance tout en refusant de s’en “auto-exclure” totalement, parce que voulant encore croire que lui comme nous formons un tout (“”), ainsi qu’il le martèle sur le morceau donnant son nom à l’album, Peter Gabriel continue de s’en servir afin d’étendre le champ d’un univers à nul autre pareil, quitte à lever les yeux et le bouc vers les astres pour en éloigner un peu plus les frontières.

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