On pourrait s’attendre à les trouver minés, limite dépressifs. Depuis des mois, l’actrice Alix Poisson et son compagnon, le réalisateur Jean-Xavier de Lestrade, se lèvent et se couchent au rythme d’un fait divers abominable : l’histoire du « violeur de la Sambre », surnom donné à l’homme qui, durant trente ans, a violé et agressé sexuellement 56 femmes au petit matin, sur le chemin du travail, près de Maubeuge. Une saga criminelle glaçante, faite de brouillard, d’arrêts de bus en rase campagne, de non-dits et de traumatismes. « Court ou long ? » sourit Jean-Xavier de Lestrade, affairé près d’un percolateur dans les locaux d’une agence de production parisienne, près de la place de la République. La pièce est baignée de soleil. « Ils ont tout refait à neuf, non ? La dernière fois, de l’eau perlait du plafond », remarque dans un éclat de rire Alix Poisson, en fermant la fenêtre avec énergie. Les petits riens de l’existence sont-ils plus savoureux lorsque l’on côtoie l’horreur de près ? L’interview commence et les sourires s’effacent.
Depuis quatorze ans, ce couple-là suit une route où le glauque et la gravité se tutoient. Erreurs judiciaires, scandales sanitaires, meurtres en veux-tu en voilà. Lui, 60 ans, documentariste et réalisateur oscarisé, spécialiste de l’univers judiciaire et de ses travers. Elle, 44 ans, comédienne la pastille humoristique de France 2. Une goutte de légèreté dans une filmographie plus grave : Alix Poisson a enfilé l’uniforme bleu dans la série travaillé pour Jan Kounen ou Bertrand Tavernier. Elle est au casting de cinq films de Jean-Xavier de Lestrade. Fictions pures ou fidèles à la réalité, toutes traduisent de grandes affaires judiciaires. En parallèle, ils bâtissent leur vie parisienne à deux, ont un fils, loin des médias. « Notre vie de couple, on ne la met pas en avant dans notre carrière mais on a plaisir à travailler ensemble, disent-ils. Peut-être parce qu’on se permet de se dire les choses plus frontalement. »