Le temps passe, nous sommes tous d’accord. Mais comment le sait-on ? Ou plutôt, comment le ressent-on ? Fastoche, me direz-vous : nous avons des calendriers, des montres, des téléphones portables. Il y a l’alternance jour/nuit, l’enchaînement des saisons aussi. Sans parler des horaires des cours, la succession des week-ends et des vacances qui rythment nos vies. Mais imaginez maintenant que vous n’ayez rien de tout cela. Vous vivez enfermés dans une grotte, sans aucun repère temporel, sans accès au monde extérieur. Pas de parents pour vous demander d’aller au lit le soir. Pas de réveil pour vous sortir de vos rêves le matin. Continuerez-vous à percevoir le temps qui passe ? Garderez-vous le même rythme qu’en surface, une phase active d’une douzaine d’heures suivie d’une période quasi équivalente de sommeil ? Ou bien vous retrouverez-vous complètement déréglés ?
Inutile de tenter l’expérience, d’autres l’ont testé pour nous. Depuis 1962, des volontaires s’enferment dans le noir pour faire avancer la science. La plupart s’isolent un mois ou deux. En 1969, Milutin Veljkovic était resté un peu plus d’un an dans une caverne en Serbie. Son record a-t-elle raconté plus tard. Lorsqu’on est venu la sortir de sa grotte le 14 avril 2023, elle pensait y avoir passé entre 160 et 170 jours. Cela faisait en réalité 510 jours qu’elle vivait seule sous terre. Plus d’un an et demi ! Autrement dit, le temps tel qu’elle le ressentait sous terre s’était écoulé trois fois moins vite que dans la réalité. Pratiquement tous ceux qui ont vécu ce genre d’expérience évoquent ce ralentissement du temps. Les jours sont plus longs, ils dépassent nos 24 heures.