L’immensité de l’empire conquis par les Mongols contraste avec le faible nombre des conquérants. Certes, les chroniqueurs de l’époque décrivent des masses submergeant les défenseurs sous leur nombre, mais ils ont tendance à comptabiliser dans l’effectif non seulement les civils mongols – femmes, enfants – et les troupeaux qui nomadisaient à la suite des soldats, mais aussi les alliés des envahisseurs. Ces derniers fédéraient en effet tous les peuples des steppes qu’ils soumettaient ou traversaient en leur faisant miroiter la perspective du pillage des villes. À l’issue des combats et malgré les massacres – l’historien Franck McLynn (voir bibliographie p. 31) estime qu’ils ont causé 37,5 millions de morts sur un siècle, mais ce chiffre est controversé –, les peuples conquis demeuraient en nombre bien supérieur à celui des conquérants – lesdits massacres visant précisément à dissuader toute rébellion future.
Absorbés par leur conquête
Aussi les historiens tendent-ils à considérer que, si l’Empire mongol commence à disparaître progressivement de la carte du monde à partir du milieu du XIVe siècle, à peine un demi-siècle après son apogée, c’est parce que les conquérants ont été peu à peu absorbés par les peuples conquis. Par mariage, par assimilation, par conversion religieuse, par simple faiblesse démographique, les Mongols se seraient en quelque sorte autodissous.
En fait, cette interprétation, longtemps dominante dans l’historiographie occidentale, a été fortement inspirée par les historiographies nationales des grands pays conquis – l’Iran, la Russie, la Chine – pour lesquelles la conquête mongole n’aurait été qu’une brève parenthèse dans le récit millénaire de civilisations dont