LE DOSSIER
Combien de maisons d'écrivain avez-vous visitées au cours de vos lectures? Celle de Colette, à Saint-Sauveur-en-Puisaye, qu'elle ressuscite dans ? Menabilly, le manoir de Daphné du Maurier,? Celle de la famille Pagnol, à La Treille, cette « Bastide Neuve » qui ne l'est plus depuis longtemps, où se déroulent ses romans mémoriels? Une maison, dans un roman, n'est pas toujours un simple cadre: elle peut devenir récapitulation du livre, métaphore de son intrigue – pas un hasard si un incendie dévaste Manderley ou si la Maison Usher d'Edgar Poe s'écroule dans un étang après la mort des derniers de la lignée… Dans ce dossier, nous vous proposons d'aller visiter des maisons bien réelles autant dire, de poursuivre la découverte des auteurs et autrices qui les ont habitées par d'autres moyens que la lecture. Car les maisons d'écrivain sont des lieux muséaux paradoxaux, qui n'ont pas été conçus pour être visités et tant mieux: cela permet d'y sentir la présence de l'ancien propriétaire, surtout quand les restaurations ont été bien menées. Ainsi la maison de Zola, regarnie, dans la mesure du possible, des objets disparates que l'écrivain chineur y avait accumulés… Par ailleurs, nous nous sommes interrogés: que signifie, pour un écrivain d'origine modeste, comme Camus, l'achat d'une maison à Lourmarin? Assurément pas la même chose que pour un Dumas élevant, à Port-Marly, un délirant château de Monte-Cristo à sa gloire, inauguré devant des foules d'invités… Mais ces demeures assurent aussi la permanence du souvenir de leur ancien propriétaire, au moins dans la région. L'esprit de l'écrivain est là, et, pour le faire parler, nul besoin de spirites ni de tables tournantes: il suffit d'ouvrir ses livres.