Certes, il faut se rendre à l’évidence, un tel exploit n’est pas pour tout de suite. Car pour creuser un tunnel à travers les milliers de kilomètres de roches de plus en plus chaudes, molles et comprimées (jusqu’à 5 500 °C pour 3 millions de fois la pression atmosphérique) qui forment le cœur de notre planète, il nous faudrait construire ses murs dans un matériau hyperrésistant (afin de contenir la pression infernale) et parfaitement étanche à la chaleur. Et puis ça serait bien aussi que ce matériau soit facile à couler, comme du béton ! Et ça existe ? Ben non, pas encore. On le baptisera donc « unobtainium », substance merveilleuse grâce à laquelle les scénaristes de science-fiction réalisent tous leurs rêves… Imaginons : nous avons notre tunnel en unobtainium de 10 m de diamètre et de 12 742 km de profondeur qui traverse la Terre de part en part, en passant par son centre. Avant d’y lâcher une capsule pleine de passagers comme dans le film Total Recall, jetons un coup d’œil prudent à l’intérieur.
De l’air presque liquide
Notre premier souci, c’est l’air. À la surface de la Terre, la pression atmosphérique n’est autre que le poids de la colonne d’air qui s’appuie sur notre tête et sur nos épaules et qui monte jusqu’à l’espace (à environ 100 km d’altitude). En fait, on peutpèse 800 kg ! Et il y a pire ! 1 200 km plus bas, la pression atteint 100000 atmosphères et là, d’après des expériences menées ces vingt dernières années, son oxygène devient solide : il cristallise sous la forme de paillettes rouges, qui sont plus denses que le reste de l’air hypercritique et qui vont donc « couler » comme des cailloux plongés dans l’eau. Du coup, dans les trois quarts du tunnel, l’atmosphère ne contient pratiquement que de l’azote (qui constitue 80 % de l’air), parce que l’oxygène devenu solide aura migré vers le centre de la Terre. Pas de pot : notre tunnel est désormais obstrué par un bouchon de neige d’oxygène compactée de plusieurs centaines de kilomètres d’épaisseur ! Vous voyez qu’on a bien fait de ne pas y jeter tout de suite la capsule et ses passagers. Une conclusion s’impose donc : IL NE FAUT PAS laisser l’air entrer ! Le tunnel doit être maintenu sous vide et doit déboucher à l’intérieur d’un bâtiment hermétique muni d’un sas. Ces précautions étant prises, lâchons notre capsule dans le trou. Instantanément, tous les passagers se retrouvent en impesanteur et ça va durer tout le trajet. La raison est simplement que, dans le vide, tous les corps chutent de la même façon sous l’effet de la . Les passagers et tous les objets autour d’eux tombent à chaque instant à la même vitesse que les murs de la cabine, d’où l’impression de flotter. Sachez-le : l’impesanteur n’est qu’un autre nom qu’on donne à la chute libre !