Voir un lion ou un léopard bondir sur sa proie, un grizzli hargneux se dresser sur ses pattes arrière ou un crocodile entraîner sa victime au fond de l’eau, voilà qui procure un agréable frisson… quand on le regarde à la télé. Imaginez que vous ayez à traverser le territoire de l’un de ces prédateurs quand vous partez en classe ou allez vous promener. L’angoisse ! C’est pourtant ce que vivent de nombreuses populations humaines, de l’Inde à la Tanzanie, en passant par les États-Unis, le Japon ou le Zimbabwe. Car les grands prédateurs peuvent tuer des humains ! Et ils le font. Récemment, dans un district du nord-est de l’Inde, pas moins de neuf personnes sont mortes suite à une attaque par un tigre du Bengale, finalement tué par les autorités en octobre 2022. Dans ce pays, les tigres ont fait 108 victimes entre 2019 et 2022… Tigres, crocodiles, lions, léopards, hyènes, loups, ours, couguars, requins… Presque toutes les espèces de grands carnivores ont déjà fait de l’homme leur proie (voir carte pages 26-27), même s’il est difficile d’avoir une idée précise du nombre de victimes. D’abord, ces prédateurs s’en prennent souvent à des personnes seules. Il n’y a donc pas de témoin. Certains, comme les crocodiles, consomment intégralement leur proie – chaussures comprises ! –, effaçant ainsi toute preuve de leur méfait. Ensuite, la plupart des attaques surviennent dans des pays pauvres où les naissances et les décès ne sont pas toujours déclarés à l’administration. Néanmoins, la situation n’a rien à voir avec celle que vivaient nos lointains ancêtres de la préhistoire. En effet, des espèces prédatrices ont disparu et, pour celles qui restent, les individus sont moins nombreux.
De plus, les animaux sauvages semblent avoir intégré au fil des siècles que l’homme, avec ses armes et ses chiens, est un être à craindre et éviter. « De nos jours, la prédation sur l’homme est relativement rare. Et elle l’est de plus en plus, estime le zoologue néerlandais Hans Kruuk, spécialiste du sujet. Il est même étonnant qu’elle ne soit pas plus fréquente si l’on tient compte de l’augmentation des populations humaines dans les zones où vivent les prédateurs, et de notre vulnérabilité lorsque nous sommes dans la nature. »
Tueurs enragés…
Renaud Fulconis, fondateur et directeur de l’organisation Awely, qui aide les populations des pays en voie de développement à cohabiter avec la faune sauvage, le confirme : Pour les loups, par exemple, plus de la moitié des attaques sur l’homme seraient le fait d’animaux ayant la rage, une maladie qui leur colle un besoin irrépressible de mordre. Quasiment éradiquée d’Europe et d’Amérique, la rage sévit toujours au Moyen-Orient et en Asie où, justement, des attaques de loups enragés se produisent chaque
