Trafalgar, 21 octobre 1805… Un nom et une date douloureux, ceux de l’une des plus graves défaites jamais subies par les armes navales de la France, rejointes dans ce désastre par l’Armada espagnole. Pourtant, au coeur de la mêlée, le combat qui oppose le puissant HMS Victory, massif trois-ponts de premier rang (voir encadré p. 78) percé de 104 sabords, et vaisseau-amiral d’Horatio Nelson, au Redoutable de 74, tourne contre toute attente à l’avantage du second – coûtant au passage la vie à l’amiral anglais. Ce n’est que lorsqu’un, puis deux autres navires britanniques, les HMS Temeraire (98 canons) et HMS Tonnant (un 80 canons français capturé à Aboukir en 1798) se joignent au Victory que le Français, écrasé par les feux croisés, finit par céder.
Ce duel mythique, immortalisé dans plusieurs tableaux tant il résume l’intensité dramatique de la bataille de Trafalgar, est un condensé du combat naval à l’apogée de la marine à voile. Il oppose non seulement deux navires représentatifs du meilleur de l’architecture navale de leurs nations respectives, mais également deux doctrines du combat mises en oeuvre par des professionnels compétents – le commandant du Redoutable, le capitaine de vaisseau Lucas (voir encadré p. 80), est sans conteste l’un des meilleurs officiers de marine français de son temps.
Un duel en pleine bataille
Dresser le tableau de l’affrontement entre les deux vaisseaux ne peut se limiter à compter les canons. Il faut, avant tout, commencer par en peindre l’arrière-plan: celui du choc de deux flottes, 27 navires de ligne britanniques d’une part, 33 franco-espagnols de l’autre. Nelson a fait former ses vaisseaux en deux colonnes, le en tête de celle la plus au nord, qui voguent perpendiculairement à la ligne franco-espagnole (). L’amiral britannique, sûr de la valeur de ses vaisseaux et de leurs équipages aguerris, conscient surtout de la supériorité de son artillerie de marine, vise à disloquer l’escadre adverse en deux points de son centre, transformant la bataille en une série de combats singuliers entre navires, qu’il se sent certain de remporter. À 11 h 45, il envoie son célèbre message « », prélude au