ÉMILE BRAVO
Dupuis, 88 p., 16,50 €
Ce volume 4 clôt une série considérée comme un des grands chefs-d’oeuvre de la bande dessinée franco-belge des G&H ). Il faut lire et mettre entre toutes les mains cette BD désormais classique pour plusieurs raisons. Le trait d’Émile Bravo se glisse avec virtuosité dans un académisme qui ne singe pas les grands anciens – Rob-Vel, Jijé, Franquin… Chaque page, chaque case surprend le lecteur par son inventivité. La conduite des personnages est rigoureuse, elle ne se perd pas en digressions inutiles. Si l’on connaît bien la Seconde Guerre mondiale en général, Bravo nous la fait vivre en Belgique, avec ses réseaux de résistance, ses collabos, et la traque puis la déportation des Juifs belges. Ils étaient 50 000 en Belgique avant 1940: 25 000 environ périront dans les camps nazis. Les héros de l’histoire, Spirou et Fantasio, ont bien changé. Plus de benêt prétentieux, plus de gentil groom: place à deux hommes confrontés à des choix qui les engagent à la vie, à la mort. Les autres Belges qui les entourent forment une galaxie attachante au sein de laquelle l’auteur fait surgir des personnages historiques comme le grand peintre Félix Nussbaum, ami de Spirou qui disparaît dans le dernier convoi parti de Belgique, le 31 juillet 1944. Rendons hommage au superbe travail de coloriste de Fanny Benoit, qui nous replonge dès les premières pages dans les sombres années 1940.