Chéri, fais-moi peur!
’avoue, le féminisme, j'y connais rien. Attention, j’te dis pas qu’une bonne manif de Femen, volutes au vent, ne retient pas mon attention sur BFProutTV quand je zappe en faisant la vaisselle, mais que veux-tu, dans la vie, je n’ai que deux centres d’intérêt: ma femme et la bécane. Du coup, j’ai pas le temps d’être intelligent, de regarder des émissions ou même les infos qui me permettraient pourtant d’engranger quelques points de plus au Trivial Poursuit. J’ai surtout plus envie de pleurer mon impuissance face à ce monde débile, qui floute les zizis rigolos des vieux au camping naturiste, et laisse les malheureux se noyer dans la même mer où ils se trempent. Tu vois, je suis un con, et j’ai rejeté le reste du monde pour me concentrer sur l’essentiel: ma femme et ma bécane. Comme beaucoup, notre vie de jeune couple motard était faite d’amour et de sans plomb 98. Partant en vacances sur les routes du Moto Tour, se claquant des étapes à 11 cols dans les Alpes, sacoches au vent sur notre ZXR, s’enivrant de routes et de paysages jusqu’à tomber d’amour sous notre petite tente le soir. Je rêvais d’être pilote depuis tout petit. Et comme tous les petits garçons, mon rêve n’a pas changé, je n’ai jamais grandi. Pour les filles, en revanche, c’est pas souvent la même messe. Les comédies romantiques et les salons du mariage se chargent de leur expliquer rapidement que l’enfance, c’est fini, et que le véritable but de la vie est d’avoir un beau mari (qui prendra finalement du bide), une belle maison (à crédit sur 25 ans), des enfants polis (qui écouteront Jul) et que animées par cette copine déjantée qui assure que 95% des hommes pensent que Clitoris est une île grecque. Bref, tu penses bien que j’allais pas échanger mon ZXR contre un Qashqai et un labrador, et que j’ai travaillé madame au corps pour que la moto reste dans nos vies, tout en lui cartographiant dans le détail l’ensemble de l’archipel hellénique… 14 ans après, elle est toujours là, même sur les courses, à regarder le plus grand de ses gamins (moi) se dépouiller, sans jamais participer.
