Un nouveau voisin
Depuis sa prime enfance, Gustave faisait partie de cette catégorie de gens préférant l’ombre à la lumière, la magie de l’imaginaire aux dures réalités de l’existence. D’une timidité maladive, il avait toujours eu des difficultés à communiquer avec les autres. Ce handicap avait encore renforcé sa tendance à se réfugier dans son propre univers. À l’école, les enfants ne le comprenaient pas et la réciproque était également vraie. Gustave avait l’impression de venir d’une autre planète tant il se sentait à part. Qui plus est, de nature calme et pacifique, il ne savait pas répondre aux attaques ni aux moqueries de ses camarades, qui le traitaient de mauviette ou de demeuré. Pas plus qu’il ne savait se servir de ses poings quand on s’en prenait à lui physiquement. À toutes ces agressions, il ne savait qu’opposer son doux regard rêveur.
Son véritable réconfort, il le trouvait auprès de ses grands-parents à qui sa mère, jeune femme excentrique et extravertie de dix-huit ans, avait confié sa garde. Gustave n’avait été qu’un accident de parcours dans sa vie d’adolescente. Elle n’avait pas souhaité lui sacrifier sa liberté ni sa jeunesse. Et encore moins son envie de découvrir le monde. Plusieurs mois après la naissance de son fils, elle avait fait ses bagages et s’était envolée pour visiter l’Europe. Une fois ou deux, elle avait envoyé une carte postale, puis n’avait plus donné de nouvelles. Ses parents n’en avaient pas moins continué à choyer et élever l’enfant comme ils l’avaient toujours fait.
Gustave aimait passer du temps auprès de son grand-père. Avec lui, tout paraissait simple et facile. Entre eux, pas besoin de longs discours, un regard ou un geste suffisaient parfois. À ses côtés, il avait découvert l’art de la menuiserie, appris à apprécier chaque étape consistant à transformer des planches de bois en un meuble à la facture unique. Depuis l’élaboration du plan détaillé à la réalisation finale. Un héritage dont Gustave avait fait son métier. Au moins, au milieu de ses outils et des copeaux, il se sentait à sa place. Dans la petite entreprise où il avait
