Les hommes de sa vie

Alix avait été réveillée par l’odeur du café, ou par les bruits familiers dans la cuisine, ceux de quelqu’un qui s’affaire en essayant de ne pas trop se faire remarquer, par respect pour le sommeil de l’autre. Sans ouvrir les yeux, elle avait passé son bras sur la partie du lit, encore tiède, où Nicolas aurait pu se trouver – ce qui aurait été somme toute inquiétant, laissant alors imaginer qu’un intrus cagoulé s’était introduit dans la maison. Elle n’avait trouvé personne sous sa main et avait été rassurée. Nicolas n’était pas toujours si matinal. C’était même une exception à inscrire sur les tablettes pour les générations futures. Il n’aimait rien tant que s’étirer longtemps entre les draps, partageant son affection matinale entre Alix, si celle-ci était d’humeur, et son oreiller, qui lui ne regimbait jamais à ses étreintes encore engourdies de sommeil.

Mais ce jour, elle se l’était rappelé soudain pour l’avoir oublié une fraction de seconde, était celui de son rendez-vous. Visiblement, Nicolas, lui, ne l’avait pas omis et s’était fait fort de la mettre dans les meilleures conditions en la déchargeant comme il le pouvait des petits soucis quotidiens. Bon, préparer un petit déjeuner n’était pas non plus référencé parmi les douze travaux d’Hercule, mais c’était une attention qui la touchait.

– Ça va ? lui avait-il demandé en levant un sourcil interrogateur au-dessus du grille-pain.

L’accueil était simple, presque rudimentaire, mais elle savait qu’il y mettait une once supplémentaire de sincérité et d’empathie qui en faisait une véritable question. Elle s’était assise à la table de la cuisine et il l’avait embrassée sur le front, comme pour ne pas la déranger outre mesure.

– Ça va, lui avait-elle répondu de la même manière.

Et il avait dû se contenter de ça. Elle n’avait guère été prolixe non plus durant tout le petit déjeuner. Il avait fait la vaisselle dans l’évier, mais ça, c’était habituel, son rôle dévolu puisqu’elle préparait généralement le café. En la quittant pour aller travailler, il lui avait posé le rituel baiser sur les lèvres, le même