Diapason

RÉCITALS

VARDUHI ABRAHAMYAN MEZZO-SOPRANO

YYY « Rhapsody ». Airs de Rossini (Semiramide, La donna del lago), Gounod (Sapho), Gluck (Orphée et Eurydice), Saint-Saëns (Samson et Dalila), Meyerbeer (Le Prophète). BRAHMS : Rhapsodie pour contralto. KOMITAS : Krunk.

Les Musiciens du Prince-Monaco, Gianluca Capuano.

Decca. Ø 2019. TT : 1 h 12’.

TECHNIQUE : 3,5/5

Succédant à Javier Camarena dans la collection « Mentored by Bartoli », Varduhi Abrahamyan entend rendre hommage à Pauline Viardot (1821-1910). Voix superbe, étendue, d’une grande richesse de timbre, infailliblement conduite, vocalises d’une remarquable précision dans les cabalettes (autant de qualités reconnues à la fille de Manuel Garcia) : la mezzo arménienne, entendue à Paris en Isabella (L’Italienne à Alger), à Pesaro en Arsace (Semiramide), confirme qu’elle est une authentique rossinienne. On déplorera seulement une tendance à chanter alla Bartoli, les récitatifs surtout, artificiellement agités – sa « marraine » la rejoint pour le Duettino d’Elena et Malcolm dans La donna del lago. L’opéra français flatte la sensualité de la voix, qu’elle soit Sapho ou Dalila, alors que « Donnez, donnez » de la Fidès du Prophète donne parfois dans la grandiloquence. D’une telle rossinienne on attendait le redoutable « O prêtres de Baal », encore plus après ce spectaculaire « Amour, viens rendre à mon âme » de Gluck avec la cadence écrite par Berlioz et Saint-Saëns pour Pauline.

Mais à quoi bon cette Rhapsodie de Brahms, certes créée par la Française en 1870, si c’est pour en livrer cette interprétation pâteuse, vocalement et orchestralement hors de propos ? A défaut de s’ajuster au reste du programme, le Krunk de Komitas (hommage aux victimes du génocide arménien de 1915, où se déploient toutes les harmoniques de la voix) étreint au moins par sa douloureuse intensité. L’orchestre (sur instruments anciens) est lui aussi beaucoup plus pertinent quand il s’éloigne de Brahms… Didier Van Moere

FREDDIE DE TOMMASO TÉNOR

YYYYY « Passione ». Airs et mélodies de Innocenzi, Tosti, Buzzi-Peccia, De Capua, Falvo, Tagliaferri & Valente, Bellini, Puccini, Respighi, Leoncavallo, Trapani & Lange, Cardillo, Gastaldon.

London Philharmonic Orchestra, Renato Balsadonna.

Decca. Ø 2020. TT : 53’.

TECHNIQUE : 4/5

L’étoile de Freddie De Tom-maso, vingt-sept ans, invité par Londres ou Vienne, monte déjà très haut. Le ténor anglo-italien, prix Francisco Vinas en 2018, dédie son premier récital à Franco Corelli, né il y a tout juste un siècle. Le titre, « Passione », est celui d’une célèbre chanson napolitaine que l’idole affectionnait particulièrement. Le programme est d’ailleurs un bouquet d’airs populaires.

Timbre aux superbes harmoniques moirées, émission plus centrale et plus couverte, parfois très sombrée, que celle d’un Corelli ou d’un Pavarotti, plus proche d’un Domingo, avec un médium riche et un aigu bien accroché, De Tommaso déploie une ligne de chant à la fois généreuse et châtiée, exempte des débraillements auxquels ne répugnaient pas toujours ses devanciers – rappelons-nous Del Monaco chantant Passione dans la Chauve-Souris viennoise de Karajan.

A peine perçoit-on un peu de tension dans Nebbie de Respighi ou Core ’ngrato de Cardillo, autre tube napolitain. Si elle irradie, la voix peut aussi s’alanguir en demi-teintes veloutées que le musicien se garde de détimbrer. La volubilité ne perd pas ses droits pour autant (Marechiare de Tosti, Lolita de Buzzi-Peccia, jubilatoires). Reste que nous aurions préféré l’entendre d’abord dans des airs d’opéras, regret avivé par ces Sole e amore ou , que Puccini recyclera dans et . Une des révélations de ces dernières années, à suivre de très, très près. A l’unisson, Renato Balsadonna fait briller son orchestre sans dégouliner.

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