Précision et bavures du viseur Norden
En 1941, avant l’attaque de Pearl Harbor, le nouveau chef des Army Air Forces, le gen. Henry “Hap” Arnold, réunit cinq officiers pour plancher sur une doctrine de bombardement en s’entourant de deux économistes spécialistes de l’Allemagne – mais en négligeant les informations des services de renseignement – pour définir les cibles prioritaires du territoire allemand. Leur souci était d’éviter le bombardement des civils parce qu’ils estimaient, comme Roosevelt, que cela ne servirait qu’à renforcer leur résistance. Il est évident que ce sont le désir de s’émanciper et les conceptions de Douhet qui avaient fait naître au sein d’un très petit nombre d’officiers américains dans l’entourage du premier commandant de l’Air Service, le gen. William Mitchell, l’idée du bombardement de haute précision bientôt résumé par l’image d’une bombe capable de frapper un tonnelet de cornichons (pickle barrel) 6 km plus bas.
La doctrine américaine face à la réalité
Ce petit cénacle dressa donc une liste de cibles comme autant de piliers qu’il suffirait de saper pour provoquer l’effondrement de l’économie allemande. Extrapolant les données d’entraînements au bom- bardement au cours desquels, de 1930 à 1938, plus de 200 000 bombes d’exercice avaient été lâchées (la plupart du temps par très beau temps, en dessous de 1 700 m sur des cibles parfaitement visibles au milieu d’étendues désertiques et plates), et en spéculant sur la “précision probable” des viseurs Norden à venir, il conclut que la destruction totale d’une seule de ces cibles imposerait la mise en oeuvre de 1 100 avions. Avant décembre 1941, il évalua par conséquent la force aérienne stratégique nécessaire en Europe à 6 834 avions de bombardement lourds en première ligne (soit 13 668 t de bombes), 1 078 en réserve, avec une production mensuelle
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