Le bois de la discorde
10 RÉSUMÉ : Cette fois, la bataille électorale est bien engagée, et le fils Grandperrin est prêt à tous les coups bas. Non seulement il a réussi à persuader Aurore de se rendre à son meeting plutôt qu’au rassemblement de la liste d’André Thouvenot, sur laquelle figure aussi Jean Boiscolas, mais en plus il a laissé entendre que ce dernier aurait collaboré avec les Allemands pendant la guerre. Ce qui attriste le plus Jeanjean dans cette histoire, c’est que sa fille ait pu croire une chose pareille. Mais là, il a dépassé les bornes : Stéphane Grandperrin a aussi coupé deux sapins qui bordaient la parcelle de Jean… Au moment de voter, les adversaires se retrouvent à la mairie. (Voir Veillées nos 3446 et suivants.)
Grandperrin entrait dans la mairie à grand fracas, suivi de quelques-uns de ses ouvriers et de sa secrétaire.
– Oui, monsieur, il a le droit de vote, rétorqua Jeanjean, lui répondant. Montre ta carte, Monmon.
En fait, Monmon n’avait jusqu’alors jamais été inscrit sur aucune liste électorale, mais rien ne l’en avait légalement empêché. Au cœur des débats depuis des mois, il s’était intéressé et avait fini par dire que lui aussi, il voulait voter.
On avait donc fait les démarches et, le matin même encore, on l’avait supplié de ne pas se tromper de bulletin… Mais il était ressorti triomphalement de l’isoloir en criant, sous les rires des électeurs présents :
– Voilà papa, j’ai bien voté pour André. Tu veux voir ?
Jeanjean l’avait poussé vers l’urne et avait soupiré de soulagement quand le « a voté » avait enfin été prononcé.
La famille déjeuna à la ferme Thouvenot. On était confiant, sans trop, pour ne pas tenter le diable. Mais le temps parut long jusqu’à la fermeture du bureau de vote. On envoyait de temps à autre Monmon en éclaireur voir s’il y avait beaucoup de votants. Il revenait à chaque fois en disant que oui, il y avait « bien du monde ».
Puis vint l’heure fatidique du dépouillement. Curieusement, l’excitation dont Jeanjean avait fait preuve tout au long de
