L’enfant retrouvé du Jiangsu
Yao Jia Xing, 83 ans, se souvient très bien du jour où on l’a retrouvé étalé au sol, le nez en sang à côté de son tricycle électrique. C’était l’an dernier. L’engin venait de voler dans les plumes d’une dizaine de poules. Le vieil homme se demande encore ce qu’elles pouvaient bien faire là, à cette heure-là. Voilà vingt ans que M. Yao emprunte ce chemin. Il le connaît comme sa poche. C’est celui qui mène à l’usine de son fils aîné, Zhengyun. L’homme s’y rend tous les jours, à heure fixe, pour nourrir les quelques canards que personne n’a réussi à déloger à la construction des bâtiments. Shanghai est à deux heures de route. M. Yao n’y a jamais mis les pieds. Sa vie est ici, à Mocheng, une petite ville de la province du Jiangsu. Avant, autour de chez lui, il y avait des champs. Ils ont disparu sous les usines. Celles de son quartier appartiennent à ses deux fils. L’un a fait fortune dans le textile, l’autre dans les matériaux de construction. Les deux sont riches, très riches, à avoir voiture avec chauffeur, hommes de main, vêtements de luxe et enfants inscrits dans les meilleures universités américaines. Lorsqu’il va nourrir les canards, M. Yao ne monte jamais dans les bureaux. Là-haut, ce n’est pas son monde. Lui a passé sa vie dans les champs, sans quitter ses bottes et son vieux jogging.
À 250 kilomètres de Mocheng, la ville de Wuxi. En ce mois de septembre 2018, Li Yongguo est comme chaque vendredi matin dans le bureau de l’association qu’il a créée en 2010, À la recherche d’un proche du Jiangsu. L’homme a 50 ans
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