Jean-Paul Dubois
“Il sait mieux que personne porter un regard amusé et distancié sur le monde”
LE LIVRE. « Nous entrons dans un âge sombre », répète aujourd’hui Jean-Paul Dubois, qui sait pourtant mieux que personne porter un regard amusé et distancié sur ses contemporains et le monde qui l’entoure. Il faut dire que ce gaucher contrarié, bourru et tendre, léger et grave, n’est rassuré ni par les gouvernants – il ne vote pas –, ni par l’état de notre planète – les arbres qu’il aime tant sont menacés –, ni par un au-delà plus lumineux – il rejette la spiritualité pour avoir subi la violence de l’autorité religieuse dans son enfance.
Cet ancien grand reporter a donc organisé sa vie pour échapper à tout cela: fuyant le salariat, il s’est mis à écrire des livres. Une écriture concentrée sur un ou deux mois de l’année pour se ménager de grands moments de rêve. « Cultiver le temps libre vous permet de savoir profondément ce qu’est le bonheur d’être en vie. » Le voilà donc aujourd’hui, à 69 ans, à la tête d’une œuvre majeure: une quinzaine de romans et le prix Femina en 2004 pour Une vie française, fresque géniale sur nos familles de l’après-de Gaulle. Ayant ainsi, d’une certaine façon, résumé ses origines, rien d’étonnant à ce que Jean-Paul Dubois soit parti si souvent vers le lointain, et notamment de l’autre côté de l’Atlantique pour des reportages. Auteur de L’Amérique m’inquiète et de Kennedy et moi, il a si bien décrit les États-Unis, qu’il ne pouvait plus, avec Trump, y retourner. Voilà pourquoi son nouveau roman nous emmène plutôt à Montréal et dans le Canada des grands espaces.
Dans , Paul (le Paul de tous ses livres) est le gardien attentif et attachant d’un drôle d’immeuble, avant de goûter à la prison pour une raison que l’on ne découvre qu’à la fin. Ce fils de pasteur danois nous touche profondément, qu’il survole les lacs et les forêts ou qu’il soit enfermé dans une cellule avec un improbable hells angel. Il est confronté à des morts violentes, des histoires de dentistes et de solitudes intérieures. Grâce à lui, on retrouve avec bonheur l’univers singulier,
