FESTIVAL PHOTOSENSIBLE
Mais un trio de mousquetaires inspirés a alors cette idée géniale et folle: faire d’Arles sa terre d’accueil. Les trois compères – le photographe Lucien Clergue, qui a déjà exposé au Museum of Modern Art (MoMA), Jean-Maurice Rouquette, conservateur du musée Réattu, et l’écrivain Michel Tournier,, seule émission télévisée consacrée à cet art mal aimé – lancent les premières Rencontres de la photographie. Un festival de quatre jours durant lequel une poignée de photographes (Édouard Boubat, Jean Dieuzaide, Jean-Claude Gautrand, Todd Webb…) se réunissent pour sortir de leur isolement et confronter leurs points de vue. En quelques années, s’appuyant sur l’intuition qu’il faut offrir aux festivaliers une expérience globale, les fondateurs créent une communauté, investissent des lieux d’exception, proposant, à côté des expositions, des projections, workshops, débats… Ansel Adams, Brassaï, Lartigue, Cartier-Bresson, Mary Ellen Mark, Marc Riboud, Nan Goldin et bien d’autres débarquent au milieu des Arlésiens éblouis. Le festival a sa semaine d’ouverture, ses vernissages huppés, son prix du livre, ses ferrades en Camargue dans la famille du mécène Luc Hoffmann. Au fil des ans, le succès ne se dément pas, émaillé de tempêtes et d’exploits. Au nombre de ces derniers : la création de l’École nationale supérieure de la photographie en 1982 et, à la prochaine rentrée, son transfert dans un nouveau bâtiment inauguré cet été. Ou encore la renaissance des Ateliers SNCF grâce à la Fondation Luma, dont la présidente Maja Hoffmann soutient les Rencontres depuis bientôt vingt ans. Au total, 1 234 expositions, 26 directions artistiques, une fréquentation de 140 000 visiteurs en 2018, avec 160 galeries éphémères dans le festival Off. Aujourd’hui cinquantenaires, les Rencontres affichent une vigueur insolente. Leur directeur Sam Stourdzé a concocté , cocktail bien dosé de rétrospectives et de découvertes, servi dans des lieux splendides ou inédits. Parmi les incontournables, l’exposition « Toute une histoire ! » révèle un échantillon de la très riche collection constituée de tirages offerts par les photographes programmés depuis 1970. À la fréquenter, on comprend que l’expérience initiée par trois amis dans une petite salle de l’hôtel de ville est allée bien au-delà de leurs espérances. En quelques décennies, les Rencontres d’Arles sont devenues une référence absolue, contribuant, selon leur souhait, au rayonnement international de la photographie.
