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(É)perdu: Journal intime d'un tour du monde improvisé
(É)perdu: Journal intime d'un tour du monde improvisé
(É)perdu: Journal intime d'un tour du monde improvisé
Livre électronique135 pages1 heure

(É)perdu: Journal intime d'un tour du monde improvisé

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À propos de ce livre électronique


À 30 ans, l’auteur claque la porte d’un quotidien bien rangé, et d’une carrière prometteuse dans les médias, pour s’élancer sac au dos, dans onze mois de voyage. Ce qui ne devait être qu’une pause devient, par la force des événements, un tour du monde improvisé. Du Vietnam au Laos, en passant par l’Indonésie et l’Australie, il marche, il doute, il écrit. Au fil de ces 100 000 kilomètres parcourus, quelque chose en lui recommence à respirer. C’est l’histoire d’un homme — mais surtout celle de chacun. De celles et ceux qui se sentent à l’étroit dans leur quotidien. De ceux qui rêvent de sens, de souffle, de simplicité. De ceux qui ne veulent plus seulement exister, mais vivre. "(E)PERDU" est le journal intime d’un homme en quête de sens. Un récit brut et lumineux, comme une pause existentielle dans une époque trop rapide.
LangueFrançais
ÉditeurPublishroom
Date de sortie3 juin 2025
ISBN9782386259234
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    Aperçu du livre

    (É)perdu - Christopher Quarez

    Chapitre 1

    Le choix

    « La vie est une succession de choix

    qu’il faut savoir assumer ensuite. »

    (Joël Dicker)

    Oraison (France), 29 juillet 2022

    J-11. À quelques pas du vide. Le grand saut. L’heure des au revoir. Le regard inquiet de mes parents. Quelques cartons, empilés dans un coin de la maison. Et ce sac à dos de 65 litres, dérisoire pour contenir une vie entière.

    Paris. Mon travail. Mon appartement. Tout ce que j’étais jusqu’ici tient désormais dans ce sac. Je devrais être excité. Euphorique, même. Mais une sensation plus lourde me colle à la peau, comme si ce bagage pesait plus que son propre poids. Comme s’il contenait tout ce que je laissais derrière moi.

    Tiraillé entre la promesse d’une liberté infinie, le désir de partir à la découverte du monde, et de me réinventer. Et de l’autre, une angoisse persistante, comme si tout ce que je connaissais, tout ce qui faisait partie de ma vie, filait entre mes doigts. Mon cœur balance entre l’excitation et la peur.

    Je devrais être serein, mais je me sens vulnérable. C’est l’heure des au revoir, mais aussi de cette prise de conscience que, malgré la promesse de l’aventure, il y a des choses que je ne pourrai jamais retrouver une fois que le pied sera mis hors de ce seuil. Et je me demande si ce voyage me fera grandir ou si, au contraire, il me plongera dans un vide que je n’avais pas anticipé.

    Dans ce courant de pensées, en plein cœur de cette transition, un message inattendu me ramène. Gabrielle. C’est bien la dernière chose à laquelle je m’attendais !

    Elle savait pour mon départ. Elle veut me voir. Mon alarme intérieure se déclenche. J’ai beau l’entendre hurler, je ne l’écoute pas.

    Je réponds à son message.

    Québec (Canada), 17 septembre 2022

    Jour 37. — Tu ne peux pas être heureux avec quelqu’un si tu n’es pas heureux avec toi-même.

    La phrase tombe, sèche, comme une sentence. Le ton est froid. Il contraste avec la chaleur moite de l’été qu’on vient de passer dans le sud de la France, quelques semaines avant mon départ pour l’Australie.

    Un contraste saisissant, comme l’est notre relation. Tantôt brûlante, tantôt glaciale.

    À l’image de ce bar de la rue Saint-Jean, presque vide pour un jeudi soir, où l’ambiance semble hésiter entre l’intimité et le malaise. Elle est là, en face de moi, les yeux dans sa pinte. Moi, je scrute ses silences. On parle, mais rien ne s’échange vraiment. Je ne sais plus sur quel pied danser. Sommes-nous un couple ? Des amis ? Des étrangers qui essaient de sauver ce qui n’existe peut-être déjà plus ?La bière a un goût amer. Comme si elle hésitait elle aussi.

    Puis on se lève, presque mécaniquement. Les mots sont rares, les gestes aussi. En sortant, j’ai levé les yeux. J’ai lu le nom de l’endroit : Le Sacrilège. Ça ne s’invente pas. Tout prend sens. Nous étions là, attablés, à profaner un sentiment noble, celui de l’amour.

    En face, l’église Saint-Jean-Baptiste. Sur le parvis, un dernier baiser. Puis elle disparaît dans la nuit. Emportant avec elle un court chapitre de ma vie. Court, mais suffisant pour tout faire basculer.

    Sous une pluie fine, à la nuit tombée, je longe, hagard, cette rue Saint-Jean pour retourner à mon hôtel. J’essaie de comprendre. J’essaie de mettre un semblant de raison dans tout cela : comment ai-je pu perdre la tête à ce point ? Comment en suis-je arrivé là ? Comment ai-je fait pour tomber si bas ?

    Aéroport international Montréal Trudeau (Canada), 18 septembre 2022

    Jour 38. Une nuit blanche passée à essayer de répondre à ces interrogations. Le film tourne en boucle dans l’avion au-dessus de l’Atlantiqueet m’écrasait contre le hublot, où défilait l’immensité noire.

    Je croyais qu’elle était la femme de ma vie, occultant qu’elle en avait décidé autrement une première fois pour nous deux. Après seulement quelques mois de relation, la nouvelle était tombée, foudroyante, par SMS : Chris, j’ai fait une fausse couche. Je tiens pas à ce qu’on aille plus loin. Je te demande de respecter mon silence.

    Après plusieurs tentatives désespérées, elle obtient ce qu’elle voulait : mon silence, au prix d’un conflit intérieur assourdissant. Un uppercut. Brutal. Implacable. Personne ne m’avait jamais frappé aussi fort qu’elle. Et dans son sillage, elle avait laissé un vide impossible à combler.

    Voilà que l’histoire se répète presque en tous points de l’autre côté de l’Atlantique, où elle vit désormais. Nos chemins avaient pourtant bifurqué : elle, au Canada, moi, en Australie. J’aurais probablement dû y voir le signe d’une telle distance qui nous séparait. Mais est-ce que 14.000 kilomètres suffisent vraiment à éteindre un sentiment ? Au fond, ce ne sont que trois coups d’avions, et quarante heures de voyage passées entre les airs et les aéroports. Pas pire, dirait-on en bon canadien !

    Alors à qui la faute si je me retrouve désormais à errer à l’étranger ? Personne d’autre que moi-même. C’est comme si je savais au fond de moi que je faisais fausse route depuis le début. Je le savais, mais je me suis entêté. Pas de visa, pas de travail, quelques économies… Ce plan était voué à l’échec !

    Mais je voulais y croire encore. Je pensais que c’était la seule façon de réparer ce qui avait été brisé en moi. Oui, c’est ça ! Peut-être que j’espérais que tout se réparerait : la rupture brutale, le rejet, le silence atroce, la perte d’un enfant qu’on n’a jamais vraiment pleuré à deux. Je cherchais une seconde chance. Pour nous. Pour moi. Pour ce qu’on aurait pu être. Le combat entre l’illusion du « peut-être » et la réalité du « non » fait du mal. J’ai eu peur d’accepter que ce fût vraiment fini, et je n’étais pas prêt à l’admettre.

    Mais parfois, il faut un électrochoc. Un déclic. N’importe quoi, pour remettre du mouvement dans l’inertie. Alors, j’ai ouvert mon ordinateur, tapé « destinations bon marché depuis Montréal », et attendu un signe.

    Il est apparu sous la forme d’un mot : Indonésie.

    Ubud (Bali, Indonésie), 22 septembre 2022

    Jour 42. La pluie, fidèle compagne de mes errances, continue de tomber sans relâche. Mais ici à Bali, elle a quelque chose de différent : elle apaise, sublime les rizières verdoyantes qui s’étendent devant moi. Un calme religieux plane, contrastant avec la tempête qui m’habite.

    J’ai beau être lucide, je m’accroche à mon téléphone, envoyant des messages dans l’espoir de la faire revenir. Mais ses réponses se raréfient, jusqu’à disparaître. Et dans ce silence, je m’enfonce un peu plus. Je m’en veux. Je lui en veux. Je m’en veux de surcroît d’inquiéter mes proches qui me voient me perdre ainsi. Gabrielle a toujours eu cette faculté de déclencher des alarmes autour de moi. Quand elle est réapparue dans ma vie, mes proches l’ont vue venir. Ils ont préféré se taire, par respect, mais ils savaient.

    Je suis à Bali. Et je persiste à me demander comment j’ai pu en arriver là.

    Sous le porche de mon bungalow en bois, je contemple la pluie, le regard perdu. Jusqu’à ce que celui-ci se porte sur une silhouette familière qui fend l’allée. Je reconnais la jeune femme belge avec qui j’ai partagé un taxi depuis l’aéroport la veille. Nous n’avions échangé que quelques mots pendant les deux heures de trajet, épuisés par nos voyages respectifs.

    Elle s’approche avec un sourire hésitant.

    — Toi aussi, tu ne trouves pas le sommeil… Je peux m’asseoir ?

    J’acquiesce sans une parole. Elle s’installe à côté de moi, et nous restons un moment à observer la pluie, dans ce matin silencieux. Puis elle brise le silence.

    — Je ne t’ai pas demandé dans la voiture… Mais qu’est-ce qui t’amène à Bali ?

    Je soupire, cherchant mes mots.

    — Moi-même, j’essaie de comprendre.

    Elle esquisse un sourire bienveillant.

    — Par où commencer, dans ce cas ?

    Je prends cette question comme une invitation. Les mots sortent, hésitants, puis s’enchaînent. Je lui raconte tout. Gabrielle. La seconde chance. Le parachutage. Pour finir par cette phrase que je me répète en boucle :

    — J’ai tout gâché. Je suis un monstre. Je m’en veux.

    Elle m’écoute, patiente et attentive. Puis, doucement, elle répond :

    — Tu sais… Aimer, c’est laisser l’autre libre de choisir. Si elle a choisi de partir, peut-être que l’aimer vraiment, c’est accepter ça. Mais si elle revenait un jour, souviens-toi de t’aimer toi-même. Parce qu’elle a déjà choisi, une fois, de ne pas t’aimer. Et tu mérites quelqu’un qui choisira de t’aimer, toi.

    Ubud (Bali,

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